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Matthieu Bock, édité par Ugo Pascolo avec AFP
Selon une enquête menée par l'Ifop pour la fondation Jean-Jaurès et "Charlie Hebdo" publiée mercredi, 49% des enseignants du secondaire se sont déjà autocensurés dans leur enseignement des questions religieuses afin de ne pas provoquer de possibles incidents dans leur classe. Un phénomène qui progresse de "13 points en à peine deux ans", selon l'Ifop.

Une autocensure en hausse. Pour éviter de possibles incidents en classe, 49% des enseignants disent s'être déjà autocensurés dans leur enseignement autour des questions religieuses, un chiffre en hausse depuis 2018 selon une enquête de l'Ifop* pour la fondation Jean-Jaurès et Charlie Hebdo, publiée mercredi. Cette enquête, qui intervient près de trois mois après l'assassinat par décapitation du professeur Samuel Paty, porte sur "les contestations de la laïcité et les revendications religieuses vécues par les enseignants dans l'enceinte scolaire", premier volet d'une série de trois sur ce thème.

49% des enseignants du second degré se sont autocensurés

Ainsi, près de la moitié des enseignants du second degré interrogés (49%) affirment s'être déjà autocensurés dans leur enseignement des questions religieuses afin de ne pas provoquer de possibles incidents dans leur classe. "Un phénomène qui existait déjà avant le meurtre de Samuel Paty et qui progresse de 13 points en à peine deux ans" précise au micro d'Europe 1 François Kraus, directeur du pôle Politique/Actualités à l'Ifop. Une tendance qui se ressent "en particulier chez les jeunes enseignants et les enseignants qui exercent dans les quartiers populaires ou en zone d'éducation prioritaire." 

Dans ce contexte, les enseignements "ont le sentiment d'être plutôt bien soutenus par leur hiérarchie directe, c'est à dire les principaux, les proviseurs", précise-t-il. En revanche, l'enquête montre "très clairement un sentiment d'abandon de la part du rectorat, de l'Académie ou du ministère", affirme François Kraus. "On sent sur ces sujets, comme sur plus largement ceux liés à la discipline ou aux problèmes de sécurité dans les établissements, qu'il y a un manque de soutien de l'administration centrale."

Forte hausse des incidents en EPS

Dans le détail, 40% des professeurs disent avoir connu des incidents liés à la contestation du principe de laïcité sur les questions relatives à la restauration scolaire, une augmentation de 5 points depuis 2018, selon l'Ifop. Près de la moitié (49%) des contestations ou le fait que certains élèves essaient de se soustraire à des activités ou des enseignements interviennent lors des cours d'éducation physique et sportive, un chiffre en hausse de 14 points par rapport à 2018. Elles augmentent aussi lors d'enseignements abordant la laïcité (+12 points), lors de l'enseignement moral et civique (+10 points) ou encore des cours de sciences (+6 points).

En revanche, ces contestations sont en baisse lors d'enseignements d'éducation artistique (-5 points par rapport à 2018) ou encore lors d'enseignements technologiques ou en ateliers professionnels (-5 points).
Interrogés sur la décision de Samuel Paty de dispenser un cours sur la liberté d'expression en s'appuyant sur des caricatures de presse, trois quarts des professeurs interrogés (75%) le soutiennent, 9% pensent qu'il a eu tort et 16% préfèrent ne pas se prononcer.

800 incidents lors de l'hommage à Samuel Paty

Le ministère de l'Education nationale avait indiqué début décembre avoir recensé près de 800 incidents (17% pour apologie du terrorisme) lors de l'hommage rendu à Samuel Paty dans les établissements scolaires. Au total, 44 exclusions définitives ont été prononcées par les établissements et 286 signalements ont été effectués auprès des services police-gendarmerie et 136 auprès des procureurs de la République.

* Enquête réalisée en ligne du 10 au 17 décembre 2020 auprès d'un échantillon de 801 enseignants des premier et second degrés en France métropolitaine.