Le procès du frère de Mohamed Merah, jugé pour complicité des tueries de Toulouse et de Montauban en mars 2012, est entré dans sa deuxième semaine. Mardi, c'est un témoin et rescapé des attaques qui s'est exprimé devant la cour d'assises spécialement composée, compétente pour juger des faits de terrorisme. Après ce témoignage, le principal accusé a exprimé de timides regrets pour la toute première fois. Une mise en scène dénoncé par les familles des victimes.
"Une haine, une volonté de vouloir tuer". Yacov Soussan était bénévole à l'école juive de Toulouse ou Mohamed Merah a tué un enseignant et trois enfants. Le 19 mars 2012, il a assisté à la scène, et lui-même échappé à la mort. "Il avait son casque mais on sentait une détermination dans ses tirs, dans ses actes. C'était extrêmement précis", se souvient-il. "Je sentais une haine, une envie de vouloir tuer, d'abattre le plus de personnes possibles. Ce sont des moments qui me poursuivent pour le reste de ma vie."
"Il a bien hésité". En s'exprimant, Yacov Soussan ne regarde pas Abdelkader Merah. Pourtant, celui-ci choisit ce moment pour livrer des sentiments jusque-là jamais entendus de sa bouche par la cour. Lorsqu'il se lève pour répondre, il commence par un silence. Puis, il ôte ses lunettes, s'essuie un œil et bafouille légèrement. la salle est suspendue à ses mots. "Je suis guidé par l'émotion", dit-il, avant de dériver vers une étrange extrapolation religieuse. "De croyant à croyant, s’entre-tuer pour rien, c'est de l'incompréhension". A quelques mètres de lui, les familles ressortent écoeurées, comme Samuel Sandler qui a perdu son fils et ses deux petits-enfants : "Il a bien hésité, il cherchait ses mots, ce n'est pas sorti du cœur en tout cas. C'est sorti parce qu'il pensait que devant la Cour, il fallait faire quelque chose."
"Je vois la tristesse". Quelques instants plus tard, Abdelkader Merah va plus loin, en s'adressant aux familles. "Je vois la tristesse dans leurs yeux. Ils pourraient être comme une grande sœur pour moi ou comme une mère fatiguée." Des propos qui choquent Naoufal Ibn Ziaten, frère d'un soldat assassiné : "Il n'a pas de compassion, pas de pitié. Il regarde avec un regard très froid, déterminé." Sèchement, l'avocate recadre l'accusé en le ramenant à la réalité des hommes : "C'est parfaitement insupportable d'entendre que c'est une affaire entre croyants", dit-elle.