Une révolution pour l'Église catholique de France. La Conférence des évêques de France a inauguré lundi à Paris un "tribunal pénal national épiscopal" pour juger efficacement et dans un lieu unique les délits commis au sein de l’Église. Une première mondiale qui était une recommandation de la Ciase, la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l'Église, qui avait évalué il y a un an à près de 330.000 mineurs victimes d’abus sexuels depuis 1950 (dont 216.000 par des prêtres).
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Les membres du tribunal prêtent serment sur la Bible
Cette instance judiciaire n’a pas d’équivalent à l’étranger. Elle peut traiter, dès aujourd’hui, d’affaires d’agressions sexuelles sur majeurs, de délits financiers ou d’abus d’autorité, en vue d’écarter ou non de l’Église les catholiques impliqués, qu’ils soient clercs ou non. Ces jugements se faisaient jusqu’ici dans les diocèses. Ils ont désormais un caractère national, pour des peines plus harmonisées à l’échelle du pays et moins influencées par des intérêts locaux.
Au siège de la Conférence des évêques de France à Paris, dans la chapelle Saint-François-de-Sales, la cérémonie d’inauguration commence par une messe. Parmi les fidèles, huit prêtres et cinq laïcs, dont quatre femmes, tous bénévoles pour endosser de nouvelles fonctions au sein du nouveau tribunal national épiscopal dont ils font partie. Chacun d’entre eux est appelé par Monseigneur de Moulin-Beaufort, président de la Conférence des évêques de France, pour prêter serment sur la Bible.
Pas de jugement concernant les abus sexuels sur mineurs
Les juges nommés par les évêques sont présidés par un vicaire général, l’abbé Albert Jacquemin. Ils peuvent désormais prononcer des peines d’exclusion de l’Église, allant jusqu’à l’interdiction de donner ou de recevoir des sacrements. Chaque affaire peut être signalée soit par les diocèses, soit par des fidèles directement au Promoteur de justice, sorte de procureur de la République. "Ça va éloigner toutes les affaires des diocèses et c'est ce qu'on appelle le dépaysement, c'est une garantie supplémentaire d'indépendance", souligne au micro d'Europe 1 Ambroise Laurent, secrétaire général adjoint à la Conférence des évêques de France.
Mais Rome garde la main sur les affaires les plus sensibles puisque les violences sexuelles sur mineurs continueront à être jugées au Vatican. Sauf si ce nouveau tribunal, unique en son genre, fait office de jurisprudence en se voyant déléguer le traitement de certains cas par le Saint-Siège.