Le Salon de l’Agriculture qui se tient chaque année à Paris est une vraie caisse de résonance pour les agriculteurs. L'occasion pour eux d'exprimer toutes les difficultés qu'ils ont à exercer leur métier. Des mouvements qui ne se font pas toujours dans le calme, preuve en est la visite mouvementée du président François Hollande samedi dernier. Mais les mois de contestation, les tonnes de lisier déversées, les enseignes de grande distribution prises pour cible et les routes bloquées, l'image des agricutleurs est-elle entachée ? "La France aime ses agriculteurs, il n’y a pas de doute là-dessus", a répondu sur Europe 1 Maximilien Rouer, un ingénieur agricole, auteur du livre Les agriculteurs à la reconquête du monde.
Une impunité des agriculteurs ? A en croire les récents sondages, les Français sont encore très attachés à leurs agriculteurs. En effet, 70% des consommateurs disent qu’on peut avoir confiance dans nos agriculteurs et 60% d'entre eux estiment qu’on peut payer plus cher pour des produits français. Il existe donc un véritable amour des agriculteurs en France. Pourtant, tout le monde ne partage pas cet avis, notamment lorsque les agriculteurs mènent des actions coup de poing. Des actions qui sont parfois trop peu condamnées selon Germinal Peiro, le député socialiste de la Dordogne. "Est-ce que les agriculteurs sont protégés ? C’est vrai qu’il y a une certaine tradition qui fait que les manifestations agricoles se terminent souvent par des dégâts mais il faut que ce soit publiquement condamné", a estimé l'élu PS.
"Si tous les Français se mettaient à faire la même chose, la vie en société serait impossible. Donc aujourd’hui, je condamne tous les dégâts qui ont eu lieu et c’est vrai qu'il existe une forme d'impunité des agriculteurs qui ne devrait pas exister", a insisté Germinal Peiro. Un point de vue que partage également Julien Aubert, député Les Républicains. Invité d'Europe 1 mercredi, l'élu du Vaucluse a affirmé "qu'il y a un affaiblissement général de l’état de droit. Il suffit de voir comment les 'zadistes' se comportent à Sivens ou à Notre-Dame-des-Landes. Il y a un problème global de société". Cependant, selon lui, les agriculteurs "ont une bonne raison de manifester" car "lorsqu’ils parlent, on ne les écoute pas. Quand ils cassent des choses, cela est condamnable, mais certains sont au bord de la faillite et je peux donc comprendre que certains agriculteurs soient réduits à ces actes extrêmes".
"Les agriculteurs perçoivent trop d'aide". Même si globalement les Français aiment leurs agriculteurs, certains pensent toutefois qu'ils perçoivent trop d'aides financières de l'Etat et de l'Europe. Une réalité qu'admet sans problème Germinal Peiro, le secrétaire national en charge de l'Agriculture au sein du Parti Socialiste. "La situation de l’Agriculture en France est très diverse et on ne peut pas mettre tout le monde sur le même plan", a-t-il toutefois rappelé. "Il y a des agriculteurs qui vivent bien et heureusement. Le secteur agricole est le secteur économique le plus aidé en France et à l’échelle européenne, cela représente 9 milliards d’euros d’aides. A l’échelle de l’Etat, depuis 8 mois, c’est plus d’un milliard d’euros qui a été mis dans le secteur. Mais malgré ses aides publiques, une partie des agriculteurs et notamment des éleveurs n’arrive plus à vivre parce que les prix de leurs produits sont trop bas".
Sans les aides de l'Etat et de l'Europe, tous s'accordent donc à dire que la crise agricole serait encore plus dramatique aujourd'hui. Et pour Julien Aubert, ce problème ne date pas d'hier. "L’erreur à mon avis vient du fait qu’on aurait dû fédérer les agriculteurs pour qu’ils aient leurs propres plateformes de distribution, pour exister face à la concurrence. Nous sommes tous coupables de la crise agricole et les circuits courts ne sont pas l’unique solution", explique le député LR.
Tous coupables. Alors si nous sommes tous coupables, il y a quand même une chose sur laquelle on peut agir : c'est notre manière de consommer. Un seul mot d'ordre donc, favoriser les produits français, même si Maximilien Rouer l'admet, "c’est en partie vrai que les produits français sont un peu plus cher". L'ingénieur agricole remarque toutefois une tendance, c'est que "le consommateur demande aujourd’hui des solutions aux agriculteurs et plus uniquement des produits. Il demande des solutions santé, écolo, religieuses etc. Et pour ces solutions, le consommateur est prêt à payer des prix tout à fait étonnants. Il faut donc essayer de faire cette transition avec les agriculteurs afin qu’ils soient rémunérés pour ce que demande le consommateur". Pour soutenir l'agriculture française, il faut donc consommer français, quitte à se serrer un peu la ceinture. Pour Maximilien Rouer, "c’est tout simplement la mission des consommateurs d’acheter des produits français".