Après son passage en commission spéciale, le projet de loi sur la fin de vie a été fortement modifié par rapport au texte prôné par le gouvernement. La Société française d'accompagnement et de soins palliatifs considère même que "les parlementaires ont davantage ouvert l'accès à la mort provoquée que ne l'ont fait les deux pays les plus permissifs sur l'aide à mourir que sont la Belgique et le Canada".
Que reste-t-il de l'équilibre prôné par le gouvernement après son passage en commission spéciale de l'Assemblée nationale ? Alors que le texte doit être examiné dans l'hémicycle à partir de lundi prochain, le projet de loi sur la fin de vie a été dépouillé de tous ses garde-fous. Plusieurs critères qui devaient encadrer le suicide assisté ont été supprimés, malgré les appels à la prudence d'Emmanuel Macron et malgré la mobilisation des soignants. Une chose est sûre, les débats entre les députés s'annoncent électriques, tant le sujet est délicat et tant il a été bouleversé en commission.
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Des critères trop flous
L'euthanasie, qui ne devait pas être considérée comme un soin, fait ainsi son entrée, contre l'avis des professionnels de santé, dans le Code de la santé publique. Réaction ulcérée de la Société française d'accompagnement et de soins palliatifs (SAFP) qui considère qu'"en cinq jours de travail seulement, les parlementaires ont davantage ouvert l'accès à la mort provoquée que ne l'ont fait les deux pays les plus permissifs sur l'aide à mourir que sont la Belgique et le Canada."
Au cœur des débats, le critère selon lequel les patients doivent avoir leur pronostic vital engagé à court ou moyen terme pour être éligible à l'aide à mourir. Un critère trop difficile à évaluer selon plusieurs députés et qui a été remplacé par la notion de phase avancée ou terminale de la maladie. Mais les médecins dénoncent une délimitation trop floue ou trop large. En clair, une personne atteinte d'un cancer à un stade avancé, mais avec plusieurs mois ou plusieurs années d'espérance de vie, pourrait rentrer dans le champ d'application du texte. Idem pour des patients atteints de maladies chroniques.
L'absence de collégialité médicale
De plus, l'article cinq, peut-être le plus important du projet de loi, a, lui aussi, du plomb dans l'aile. Dans cet article, le terme suicide assisté qui consiste, pour le patient, à s'administrer une substance létale est conservé, tout comme l'euthanasie à titre exceptionnel, c'est-à-dire l'injection, par un professionnel de santé, en cas d'empêchement du malade. Sauf qu'un amendement remet tout cela en cause en laissant le choix entre suicide assisté et euthanasie au patient.
Le délai de réflexion de 48 heures du malade est, lui aussi, remis en cause. Plus de collégialité médicale non plus pour qu'une décision aussi grave soit prise. D'un texte équilibré voulu par le gouvernement, on a basculé dans un projet très permissif. L'exécutif pourra-t-il le corriger ? C'est toute la question.