Emmanuel Macron rencontre mardi les salariés de l'usine Whirlpool, à Amiens, reprise par un industriel picard.
La scène est l'une des images marquantes de la campagne présidentielle passée : dans l'après-midi du mercredi 26 avril, trois jours après le premier tour, Emmanuel Macron se rend sur le parking de l'usine Whirlpool d'Amiens, quelques heures après une visite à l'improviste de son adversaire Marine Le Pen. Interpellé, chahuté, le futur chef de l'État s'explique pendant une heure face aux grévistes qui protestent contre l'annonce, en janvier dernier, de la fermeture du site de production. Cinq mois après son élection, Emmanuel Macron est retourné mardi dans l'usine reprise depuis par un industriel picard.
Soulagement. Les pneus ne déversent plus leur fumée dans le ciel amiénois, les ouvriers ne sont plus en grève pour alerter sur leur situation. L'industriel Nicolas Decayeux a été choisi pour reprendre le site, avec un projet formaté pour 277 salariés (sur 280) et une restructuration des activités vers les casiers intelligents réfrigérés, ainsi que sur la production de chargeurs pour des véhicules électriques. Un soulagement pour beaucoup. "On est déjà restés 25 ans, maintenant il n'y a plus de boîtes où l'on peut rester autant. J'ai déjà connu des reclassements dans l'usine, j'ai fait le lave-linge, j'ai fait le sèche-linge, là je ferai les boîtes réfrigérées. Déjà on a une vision sur le futur, donc on aura un emploi en CDI. C'est franchement top", se réjouit Thierry.
Problème avec les intérimaires. Pour les sous-traitants, en revanche, le tableau est bien plus sombre. L'entreprise Prima, 56 salariés et une activité tournée vers la production de pièces en plastique pour Whirlpool, n'a pas de repreneur. Chez les intérimaires aussi, la visite d'Emmanuel Macron sonne comme une pure opération de communication. "Il revient pour se mettre la victoire sur le dos, c'est tout. C'est un dégoût, parce que plus les gouvernements viennent, pire c'est. Nous, la classe ouvrière, on se sent vraiment traînés dans la boue alors que sans nous, la France ne tourne pas", rejette Christian, qui a boudé le chef de l'État.
François Ruffin avait échangé quelques mots avec Emmanuel Macron le 26 avril. Le médiatique député amiénois de La France insoumise se plaint aujourd'hui d'une "opération Potemkine" destinée à "repeindre la façade", alors que la situation lui paraît intenable pour de nombreux intérimaires délaissés par le plan de reprise : "Je suis tombé sur des gens à la gare qui me disaient 'comment ça se fait moi, ça fait cinq ou dix ans que je suis en intérim chez Whirlpool et puis là ils m'ont pas rappelé. Qu'est-ce que je deviens ?' Comme ils savaient qu'ils risquaient d'avoir des problèmes avec les vieux intérimaires, ils leur ont dit 'on va faire un délai de carence'. Ils ont rembauché des jeunes intérimaires juste pour cette année", croit savoir le journaliste-reporter. Malgré le sauvetage de l'usine, tout n'est pas rose chez les Whirlpool d'Amiens.