Faillites en série, journées à rallonge, solitude… le mal-être des agriculteurs français est devenu un sujet reçurent ces dernières années. Environ un agriculteur se suicide tous les deux jours, selon diverses études. Mais outre les contraintes financières qui renforcent leur précarisation, les paysans français sont aussi minés par une crise morale inédite, et qui interroge le sens même de leur profession. "Les agriculteurs sont indéterminés dans leur situation sociale. Il faut en permanence qu'ils se justifient", relève ainsi au micro d'Eva Roque, sur Europe 1, François Purseigle, sociologue de l’agriculture et ingénieur agricole.
Des métiers controversés. "Au-delà des crises économiques, s'ajoutent des crises morales, ce sont des métiers controversés, aujourd'hui être éleveur ça ne va pas de soi", explique ce chercheur. "On remet en cause leur activité même, et ça c'est très dur", poursuit François Purseigle qui cite notamment les crises sanitaires, les controverses sur les techniques et leur impact sur l'environnement, ou encore la défiance sur l'alimentation, "alors même que les agriculteurs sont attendus [sur cette question]"."Il y a une pression qui s'exerce différemment. Quand vous êtes seul pour vivre cette pression-là, contrairement aux années 1940 et 1950 où l'on était en famille et en famille élargie, c'est plus dur", ajoute-t-il.
La transmission à la jeune génération de plus en plus complexe. "Ma conviction profonde, c'est que les agriculteurs, en particulier les jeunes, doivent devenir les premiers militants de la transition écologique", a martelé Emmanuel Macron samedi, lors de son discours pour l'inauguration du Salon de l'agriculture. Mais dans les exploitations, la transformation des pratiques et le passage de flambeau sont loin de se faire sans difficultés, quand ils ne suscitent pas carrément des réticences.
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"Il n'y a jamais eu autant de micro-exploitations et de très grandes exploitations. Au milieu de tout ça, on a une exploitation familiale qui s'efface. Pourquoi ? Parce qu'elle traverse des difficultés sans précédents, notamment en matière de reprise", explique François Purseigle. "La transmission est compliquée, elle ne va pas de soi. Même s'il y a un désir d'agriculture, on a des jeunes qui ne veulent pas reprendre sur le modèle de leurs parents ou grands-parents".
En France, 30.000 exploitations cessent leur activité chaque année, pour des raisons économiques ou faute de repreneur, et pourtant, 70.000 offres d'emploi dans le secteur agricole cherchent toujours des preneurs.