Depuis plusieurs mois, et plus encore ces dernières semaines, les départements alertent un peu partout en France : attention aux arnaques à l'isolation. Profitant d'un dispositif existant depuis 2005 et régi par la loi POPE, le programme fixant les orientations de la politique énergétique, de nombreuses entreprises véreuses proposent en effet des isolations "à un euro"... qui s'avèrent, en réalité, des leurres. Europe 1 a enquêté.
"Je me suis dit qu'ils me prenaient un peu pour une buse"
Ces entreprises démarchent elles-mêmes les particuliers en leur proposant de profiter de ce dispositif alléchant : un euro contre la promesse d'économiser 30% sur leurs dépenses d'énergie. Elles appellent, envoient des mails, reviennent souvent à charge... Et n'hésitent pas à utiliser des logos officiels, de la République française ou du ministère de la Transition écologique. Mais une fois le contrat signé, les propriétaires déchantent.
"Le premier soir, j'ai constaté que le travail était un peu bâclé, que les plaques n'étaient pas jointes les unes aux autres", témoigne auprès d'Europe 1 Pascal, qui a contacté l'une de ces entreprises pour isoler le toit de sa maison dans le Var. "Pour éviter des découpes, ils se sont arrêtés à 15 cm des murs", ajoute-t-il. "Quand je leur ai fait remarquer, ils m'ont dit que c'était normal, que c'était du polystyrène expansé, que ça allait gonfler avec l'humidité. Je me suis dit qu'ils me prenaient un peu pour une buse. Depuis un mois aujourd'hui, je n'ai plus de nouvelles de personnes."
Un préjudice qui se chiffre en millions d'euros
Qu'y gagne l'entreprise ? Pour un euro payé par Pascal, l'artisan a touché.... 4.000 euros, facturés aux fournisseurs d'énergie. C'est là que se trouve le cœur de cette arnaque, qui touche des milliers de personnes selon les professionnels. Si aucune statistique nationale n'existe pour l'instant, chaque département commence à recenser les cas, en forte augmentation. Malfaçons, cloisons percées, toitures qui s'effondrent, incendies... Outre le préjudice, qui se chiffre en millions d'euros, ces "travaux" peuvent s'avérer dangereux pour les particuliers.
Et certains n'hésitent pas à souligner la responsabilité du gouvernement dans ces arnaques. "L'objectif de la politique énergétique française, c'est de rénover 500.000 bâtiments et logements par an", pointe Jean-Baptiste Lebrun, à la tête du réseau CLER pour la transition énergétique. "En se focalisant sur ce chiffre-là, ils mégotent un petit peu sur les procédures de contrôle, sur l'efficacité des travaux, sur le fait que ça s'inscrive dans un projet global d'amélioration du confort et de l'efficacité énergétique de chaque bâtiment.... Et malheureusement en voulant prendre des raccourcis, le gouvernement le fait pas les choses comme il faut."
Pour y remédier, le spécialiste propose de nommer systématiquement un expert indépendant en amont, afin de venir évaluer la situation avec le particulier avant le début des travaux.