Des élus de tous bords (ou presque), mais aussi des anonymes et des artistes, vont se joindre aux policiers, mercredi en début d’après-midi devant l’Assemblée nationale. Mais les syndicats ont prévenu : ils empêcheront toute récupération politique. Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, dont la présence annoncée a suscité la polémique, ne devrait d’ailleurs rester que quelques minutes.
Ils ont appelé à un soutien le plus large possible. Un appel aux Français qui englobe forcément les personnalités politiques. Mais les policiers qui manifesteront mercredi après-midi devant l’Assemblée nationale ne veulent pas être l’objet de récupération politique. Les syndicats, sur ce point, sont unanimes. Ils ne veulent pas que la présence de nombreux élus de tous bords - La France insoumise exceptée -, mais aussi et surtout celle du ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, brouille leur message. Ce dernier devrait d’ailleurs se faire discret.
"Un message qui doit dépasser les rivalités politiques et les enjeux électoraux"
"On espère surtout que cette manifestation soit vraiment une réussite", confirme à Europe 1 Grégory Joron, secrétaire général délégué du syndicat Unité SGP Police-FO, syndicat à l'initiative de ce rassemblement décidé après le meurtre d’Eric Masson, tué par un dealer à Avignon. "Je pense qu'on est au-delà de toutes sensibilités politiques. On parle surtout d'un constat de société et de ce qu'on veut pour demain." Même discours du côté de Christophe Rouget, Secrétaire général du Syndicat des cadres de la Sécurité Intérieure (SCSI) : "Ce sera un hommage à nos collègues assassinés, un soutien à la police républicaine. C'est un message qui doit dépasser les rivalités politiques et les enjeux électoraux du moment."
Alors pas question pour les policiers de laisser un quelconque élu faire un discours lors de la manifestation. Personne ne confisquera la parole des policiers et des citoyens, disent les syndicats d’une seule voix. En résumé, les syndicalistes veulent faire de ce rassemblement un moment de cohésion et de soutien populaire, en présence d’anonymes et de personnalités, d’artistes, de familles de policiers et gendarmes victimes. Les élus de tous bords seront les bienvenus, mais aucun responsable politique ne montera à la tribune. "Tous les hommes politiques peuvent venir, mais ils seront considérés comme des citoyens comme les autres", résume Christophe Rouget, secrétaire général du Syndicat des cadres de la Sécurité Intérieure (SCSI).
Darmanin devrait se faire discret
C’est évidemment valable aussi pour Gérald Darmanin. Certes, la présence d’un ministre de l’Intérieur en exercice sera une première dans une manifestation de ce type. Mais cette présence suscite de nombreuses critiques et n’est pas sans risque pour Gérald Darmanin. Son idée de départ, adoubée par Emmanuel Macron, était de montrer l’image du chef au milieu de ses troupes, aux côtés de ses hommes dans la tourmente. Ces derniers temps, la majorité a tenté de balayer d’un revers de mains les accusations de récupération politique ou d’intimidation, la présence du ministre de l’intérieur pouvant, comme l’ont dit certains, empêcher la liberté de ton des fonctionnaires de police en colère.
Mais finalement, Gérald Darmanin n’a que des coups à prendre en participant à ce rassemblement. Avec, d’un côté, le risque qu’il y ait des discours hostiles à la politique du gouvernement, et de l’autre la crainte qu’il se fasse siffler, huer par des policiers ou des manifestants. Ce ne serait pas bon du tout pour son image ni pour celle de l’exécutif. Alors pour limiter les risques, Gérald Darmanin, devrait donc se contenter de passer quelques minutes pour saluer les policiers, au début du rassemblement, avant de s’éclipser.
"Ni déni ni blabla sécuritaire"
Le risque, aussi, est de brouiller le message que veulent passer les policiers : exprimer leur colère et réclamer l’instauration de peines plancher pour leurs agresseurs. "Malheureusement, la plupart du temps, on est souvent sur des peines qui sont en dessous d'un mois d'un an de prison qui, du coup, vont être transformés en peines alternatives", regrette ainsi Grégory Joron, d’Unité SGP Police-FO. "On a des exemples assez précis où, quand quelqu'un est jugé pour avoir infligé 21 jours d'incapacité de travail à un policier, il prend six mois de prison ferme, mais ne va pas en prison. Ça nous pose un réel problème de message envoyé à ses agresseurs et aux policiers."
Et pas question de se laisser bercer par l’actuelle multiplication des propositions de fermeté pénale par des politiques de tous bords. "Nous ne sommes pas dupes. Nous savons qu'il y a une campagne électorale en ce moment. Mais nous voulons être des lanceurs d'alerte, dire que cette haine que nous subissons depuis 30 ans n'est plus acceptée aujourd'hui", affirme Christophe Rouget, du SCSI " Nous voulons avoir un grand rassemblement populaire. J'invite tous les Français à nous rejoindre tout à l'heure, mais il faudra ensuite que ce pouvoir politique ne soit plus dans le déni ou alors dans le blabla sécuritaire. Il faudra des actes rapidement."