TÉMOIGNAGE - Dans le quartier de la Busserine, les familles cohabitent avec les trafiquants de drogue qui opèrent sous leurs fenêtres. Céline, mère célibataire avec quatre enfants à charge, s’est battue pendant des années pour faire sortir son fils David d’un réseau de dealers. Dans le podcast “Dans les yeux d’Olivier”, elle témoigne.
“Quand on vit dans un quartier, on sait comment ça se passe. Il suffit de se mettre à la fenêtre.” Dans les quartiers Nord de Marseille, le trafic de drogue mine le quotidien des habitants. Il y a quelques années, Céline, mère de famille, a déclaré la guerre au réseau de stupéfiants qui a fait plonger son fils David. Dans le podcast “Dans les yeux d’Olivier”, elle raconte son histoire à Olivier Delacroix et ses efforts pour sauver son fils.
Aide-soignante dans une maison de retraite, Céline travaille beaucoup pour nourrir ses quatre enfants, qu’elle élève seule. Sa plus grande peur a toujours été d’être trop peu présente à la maison et de ne pas arriver à empêcher ses enfants de tomber dans le trafic de drogue. Habitante du quartier de la Busserine depuis 17 ans, elle est consciente de la facilité avec laquelle certains jeunes sont happés par ces réseaux de délinquance. Au micro d’Olivier Delacroix, elle explique : “Il y a trois raisons d’entrer dans un réseau. La première, c’est l’argent. La deuxième, c’est la notoriété, parce qu’ils ont besoin de se montrer, de montrer qu’ils existent, de rouler des mécaniques. La troisième, c’est le cannabis...” Au début, Céline remarque le décrochage scolaire de David. Mais ce n’est que lorsqu’une voisine lui rapporte avoir vu son fils en train de faire le guet qu’elle commence à avoir des doutes sur ses activités. Puis c’est une deuxième, et ensuite une troisième personne qui l’avertissent des comportements étranges de David. Céline comprend alors que ce qu’elle a toujours redouté pour ses enfants est arrivé.
Myriam, la petite soeur de David, a dix ans lorsque son aîné intègre le réseau de dealers. Mais malgré son jeune âge, elle comprend vite qu’il est désormais guetteur, ou “chouffe”. Son travail consiste à prévenir les “charbonniers”, ceux qui s’occupent de la revente de la drogue, de l’arrivée de la police par un cri d’alerte. A Olivier Delacroix, elle explique comment l’adolescent a pu en arriver là : “Les premiers pas dans le réseau, c’est aller chercher une casquette ou aller acheter un sandwich pour celui qui ‘chouffe’. Après, ça devient ‘garde la monnaie’, puis ‘tu veux plus de sous ?’, qui deviennent ‘tu me remplaces une demi-heure ?’. Et comme ça, ils se lient d’amitié.”
Au sein du foyer familial, la tension monte. Les conflits se font de plus en plus récurrents. Céline vit dans l’angoisse de ce qui pourrait arriver à son fils. “Chaque fois que je rentrais du boulot, c’était : Il est où ? Qu’est-ce qu’il fait ?” se souvient-elle. Céline refuse de le laisser gâcher sa vie de la sorte. “Parfois, avec l’argent gagné, il m’achetait des courses, et ça partait directement à la poubelle, car je ne voulais rien d’illicite chez moi”, affirme-t-elle.
Pendant trois ans, Céline lutte coûte que coûte pour sortir son fils David du trafic. Mais l'adolescent refuse de l'écouter et, pire, il monte en grade au sein du réseau, devenant revendeur. Elle prend alors une décision radicale : l’emmener à la police. “J'ai amené mon fils à la brigade des Stups à Marseille. Là, je me suis dit : soit il fait de la prison, soit il meurt”, confie-t-elle dans le podcast “Dans les yeux d’Olivier”. Toutefois, face à son refus de dénoncer les membres du réseau, sa plainte n’est pas enregistrée. Mais rien qu’en parlant du réseau de trafiquants à la police pour obtenir de l’aide pour son fils, Céline s’est exposée, elle et les siens, à des représailles.
Lorsque sa visite des Stups est ébruitée dans le quartier, elle ne tarde pas à recevoir des menaces verbales. Les trafiquants tentent même de mettre le feu à sa cuisine pour l’intimider. La situation dégénère pour son fils, que Céline retrouve en train de se faire battre par les membres du réseau. “J’ai récupéré mon fils, je l’ai amené à l'hôpital, et là, c’est la seule fois où il m’a dit : ‘Maman, aide-moi’.”Céline décide de prendre les choses en main et confronte celui s’occupe du réseau. Elle le menace de ne pas le lâcher s’il ne laisse pas partir David. Suite à cela, elle embarque son fils en Algérie pour les trois mois de l’été. A leur retour, il n’y a plus aucun signe de menace du réseau. Les trafiquants semblent être passés à autre chose. Mais David, lui, est terrifié. Il refuse de sortir de chez lui de peur de se faire agresser, et reste des mois cloîtré dans sa chambre.
Au sein du foyer, la tension retombe et petit à petit, mère et fils se retrouvent. C’est dans le rap que David finit par trouver une échappatoire. “C’est une période noire de sa vie qu’il tente aujourd’hui d’effacer”, confie Céline. “Aujourd’hui, il est marié et papa, il veut avancer. Il s’est excusé et il se rachète chaque jour.”
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