Le gouvernement monte au front pour défendre le méga-fichier controversé regroupant la quasi-totalité des Français. Après Bernard Cazeneuve, le ministre de la justice Jean-Jacques Urvoas a à son tour justifié son soutien au TES (titres électroniques sécurisés), qui suscite de vives inquiétudes pour les libertés publiques. "C'est une action du gouvernement dont je suis, par définition, solidaire", explique le garde des Sceaux dans un entretien au Télégramme, rappelant que ce fichier ne relève pas de sa compétence mais "essentiellement" de celle "du ministère de l'Intérieur".
Urvoas, opposant à un projet similaire en 2012. Baptisé "Titres électroniques sécurisés" (TES), le nouveau fichier réunit dans une seule base les données (identité, couleur des yeux, domicile, photo, empreintes digitales...) des détenteurs d'un passeport et d'une carte d'identité nationale. Jean-Jacques Urvoas s'était opposé en 2012, au nom du groupe socialiste, à la création par la droite d'un fichier comparable.
Il estime aujourd'hui qu'il n'y a "aucune volte-face" ni "aucune incohérence" de sa part, "les deux fichiers étant différents". Le Conseil constitutionnel avait jugé que le projet de l'ancienne majorité portait une atteinte disproportionnée au droit au respect à la vie privée parce qu'il permettait une identification, y compris à des fins judiciaires, à partir des empreintes digitales.
La crainte d'un détournement de la vocation du fichier. Interrogé sur la crainte de voir évoluer la vocation du fichier sous la houlette d'un autre gouvernement, le ministre reconnaît que "cette possibilité existe", mais souligne que dans ce cas, "le Conseil d'État aurait à émettre un avis". "Cette modification ne pourrait se faire dans le secret d'un bureau (...) et "aucun gouvernement ne peut passer outre le Conseil constitutionnel et sa décision de 2012 continuera à s'imposer", fait-il valoir.
Quand aux critiques sur l'absence de débat au parlement sur un projet d'une telle ampleur, Jean-Jacques Urvoas rappelle que la loi "Informatique et Libertés" prévoit la possibilité de création d'un tel fichier par décret". La CNIL (commission nationale de l'informatique et des libertés), le gendarme de la vie privée, avait pourtant suggérée "l'organisation d'un débat parlementaire" face aux "enjeux soulevés" par le TES.