Trois universitaires formulent des propositions en vue d'améliorer la formation des imams pour mieux contrer les discours radicaux. Ils rendront un rapport jeudi après-midi aux ministres de l'Éducation nationale et de l'Intérieur, Najat Vallaud-Belkacem et Bruno Le Roux.
"Dès lors que l'on s'adresse à des fidèles, il faut être formé". Cette "mission de réflexion", autour de ce chantier relancé après la vague d'attentats ayant frappé la France depuis 2015, a été conduite par une historienne de l'islam, Catherine Mayeur-Jaouen, une juriste spécialiste de la laïcité, Mathilde Philip-Gay, et un islamologue, Rachid Benzine.
"Dans ce domaine, la France est dans une situation de faiblesse par rapport à ses voisins. Dès lors que l'on s'adresse à des fidèles, il faut être formé", souligne Bruno Le Roux dans un entretien paru jeudi dans La Croix. Selon lui, "cette nécessité est d'autant plus impérieuse que les fidèles sont de plus en plus jeunes et sont en recherche d'informations sur l'islam par d'autres moyens, comme Internet".
Quatorze diplômes universitaires. Pourfendant ceux qui voudraient "qu'à terme leur religion soit une religion d'État", il a souhaité des imams "capables" de dire que "c'est une chance d'être en République". "Comme le préconise le rapport, nous nous appuierons sur les quatorze diplômes universitaires, sur le fait religieux et la laïcité, en complétant avec une approche historique de l'islam, de l'anthropologie, de la philosophie", ajoute le ministre chargé des cultes.
Les pouvoirs publics estiment avoir leur mot à dire en la matière, malgré la séparation des cultes et de l'État fondée sur la loi de 1905 : surtout pas en finançant, ni même en organisant des formations théologiques, mais en développant l'enseignement - laïque - de l'islamologie à l'université publique.
Une situation peu enviable pour les imams en exercice. Les attentes sont fortes chez les acteurs de l'islam (entre 4 et 5 millions de croyants) : si la France aux 2.500 mosquées et salles de prière bénéficie de 1.800 imams en exercice, leur situation est souvent peu enviable : statut indéfini, travail mal rétribué voire bénévole, etc. Il y a bien, parmi eux, 300 imams directement "détachés" par des pays d'origine (Turquie, Algérie et Maroc), mais ceux-ci ne sont pas toujours francophones, et leur simple présence accrédite l'image d'un "islam des consulats" que l'État cherche à corriger.
Des partenariats public-privé. Dans un point d'étape présenté en décembre, les trois rapporteurs avaient préconisé de créer des partenariats entre universités publiques et instituts de théologie privés, autour de cinq pôles universitaires pour commencer. Selon l'Intérieur, cette solution de "partenariats" public-privé "présente de grands avantages, notamment celui de brasser les publics et de créer des rencontres, ce qui participe pleinement du principe de laïcité".