Un Français sur dix pense que l'attentat du 11 décembre à Strasbourg était une "manipulation du gouvernement pour détourner l'attention" en plein mouvement des "gilets jaunes", selon une étude de l'Ifop pour la Fondation Jean Jaurès et l'observatoire Conspiracy Watch*, publiée mercredi. Cette enquête a soumis aux personnes interrogées les 10 théories du complots plus répandues, mais aussi une étude plus poussée sur l'attentat de Strasbourg.
D'après l'étude, réalisée fin décembre, 65% des personnes interrogées pensent que "cet attentat a été perpétré par Cherif Chekatt, un sympathisant de l'organisation djihadiste Etat islamique". En revanche, 13% croient que "des zones d'ombres subsistent dans cette affaire et (qu') il n'est pas vraiment certain que cet attentat ait été perpétré par Cherif Chekatt", et 10% approuvent l'idée qu'"il s'agit d'une manipulation du gouvernement pour détourner l'attention des Français et créer de l'inquiétude dans la population en plein mouvement des gilets jaunes".
Deux Français sur trois insensibles aux théories du complot. Les autres résultats de l'enquête confirment globalement les enseignements d'une première étude publiée en janvier 2018 par la Fondation Jean Jaurès et Conspiracy Watch : elle montre ainsi que deux Français sur trois sont relativement hermétiques aux théories du complot. Mais si 35% des personnes interrogées n'adhèrent à aucune thèse complotiste, 21% en croient au moins cinq.
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L'industrie pharmaceutique, première cible des complotistes. Interrogés sur les théories les plus connues, 43% des sondés croient que "le ministère de la Santé est de mèche avec l'industrie pharmaceutique pour cacher au grand public la réalité sur la nocivité des vaccins". Ce qui en fait la thèse complotiste la plus partagée, devant l'idée que le décès de Lady Diana serait "un assassinat maquillé" (34% d'adhésion), celle que les illuminati sont une société secrète qui cherche à manipuler la population (27%) ou que l'immigration serait délibérément organisée pour remplacer la population européenne (25%).
Des produits chimiques répandus dans le ciel. En outre, 22% des sondés estiment qu'"il existe un complot sioniste à l'échelle mondiale", 17% que "le gouvernement américain a été impliqué" dans la mise en oeuvre des attentats du 11-Septembre. 15% croient aux "chemtrails" (la théorie selon laquelle les traînées d'avions dans le ciel sont la trace de produits chimiques répandus délibérément pour des raisons secrètes) et 9% que l'homme n'est jamais allé sur la Lune. Ces résultats sont moins élevés que dans la première étude publiée l'an dernier, mais cette fois les répondants avaient la possibilité de ne pas se prononcer, ce qui rend la comparaison difficile.
Le "profil type" du complotiste
Par ailleurs, les résultats de cette enquête permette d'esquisser un profil caractéristique du Français sensible aux sirènes des complotisme : en l’occurrence, une personne de moins de 35 ans (55% des personnes croyant à au moins cinq théories du complot, voire plus, sont âgées de 18 à 34 ans) peu diplômée (27% sont non diplômés ou titulaires d'un BEPC, 28% titulaires d'un CAP ou BEP), aux revenus modestes (38% rentrent dans la catégorie "pauvres" de l’étude) et qui vote plutôt pour Marine Le Pen (à 27%) ou Nicolas Dupont Aignan (à 23%).
L'étude montre également que l'attachement à la démocratie décroit avec la croyance aux théories du complot (elle est jugée très importante par 57% des Français, mais par 43% seulement des personnes qui adhèrent à cinq théories du complot ou plus).
*L'étude a été réalisée du 21 au 23 décembre 2018 auprès d'un échantillon de 1.506 personnes représentatif de la population française adulte, constitué selon la méthode des quotas et complété par un second échantillon de 254 personnes de moins de 35 ans (dont les résultats ont été ramenés à leur poids réel dans la population).