Mort de Mélinda : 25 ans de réclusion pour le beau-père, 18 ans pour la mère

La petite Mélinda, âgée de 19 mois, était morte après une longue agonie de 17h.
La petite Mélinda, âgée de 19 mois, était morte après une longue agonie de 17h. © AFP
  • Copié
avec AFP , modifié à
La cour d'assises du Nord a condamné lundi le beau-père de Mélinda, ébouillantée en 2016, à 25 ans de réclusion criminelle pour "actes de barbarie". La mère a elle été condamnée à 18 ans d'emprisonnement pour avoir laissé souffrir et mourir la fillette de 19 mois. 

La cour d'assises du Nord a condamné lundi le beau-père de Mélinda, ébouillantée en 2016, à 25 ans de réclusion criminelle pour "actes de barbarie" et la mère à 18 ans d'emprisonnement pour avoir laissé souffrir et mourir la fillette de 19 mois, ont indiqué des avocats des parties civiles. L'homme qui hébergeait le couple au moment du drame a lui été condamné à quatre ans de prison pour n'avoir pas porté assistance à l'enfant, décédée à l'issue d'une agonie de plus de 17 heures. 

Maltraitances pendant des mois

Avant que la Cour ne se retire, tous trois avaient demandé "pardon" pour leurs actes, la mère jurant être "capable de protéger" ses deux autres enfants. A l'issue d'une semaine d'audience "insoutenable" pour les parties civiles, contraintes de "revivre" le calvaire de la petite fille et les maltraitances subies pendant des mois, la Cour a estimé que les "actes de torture et de barbarie" imputés au beau-père étaient caractérisés, sans toutefois suivre totalement l'avocat général, qui avait requis 28 ans. Jason Odin, 25 ans, est condamné à 25 ans de réclusion criminelle assortis de 10 ans de suivi socio-judiciaire pour avoir, dans la soirée du 17 mai 2016 à Neuf-Mesnil, aspergé la fillette avec de l'eau brûlante, la brûlant gravement, avant de l'enduire de crème et de la coucher pour tenter de dissimuler les sévices.

Il est également reconnu coupable de l'avoir maltraitée pendant des mois, lui infligeant coups, bains d'eau glacée, heures "au coin" ou "sous la pluie", lui versant même des seaux d'excréments sur la tête. La mère Ana Maria Barbosa de Sousa, 35 ans, est condamnée pour n'avoir pas empêché le crime de son compagnon, n'avoir rien fait pour secourir son enfant, et l'avoir privée de soins.

"Huis clos sordide"

Pendant cinq jours, magistrats, avocats et experts ont tenté de saisir les contours d'un "huis clos sordide" dans lequel "chacun a continué sa vie, indifférent aux souffrances endurées" par Mélinda, a rappelé Me Hugo Van Cauwenberge, avocat du père de Mélinda. Ils ont détaillé les étapes de cette nuit fatale : les allées et venues dans la chambre de l'enfant, sa "douleur abominable", la dispute du couple puis leurs rapports sexuels. Mélinda vivait "dans un taudis", entourée "de drogue, d'alcool, et de crasse", a lâché un témoin en larmes, le médecin du couple relatant lui la "maigreur" de l'enfant et sa "solitude".

"Je suis responsable", mais "jamais j'ai voulu sa mort !", s'est défendu Jason Odin, niant le caractère intentionnel des blessures comme les maltraitances. Immobile, épaules tombantes, il a assuré "aimer" Mélinda, celle qui l'appelait "papa". La défense a dépeint un "jeune homme déboussolé", au QI faible, pas réellement conscient de ses actes, l'accusation décrivant plutôt un "manipulateur" éprouvant sa "toute-puissance" sur Mélinda. 

Un système "impuissant"

Les accusés "n'apportent aucune réponse" ont déploré les avocats des parties civiles, Me Van Cauwenberge et Sophie Level. "Cette mère est-elle capable d'aimer ?", a demandé mercredi la présidente Anne Cochaud-Doutreuwe. "Comme une enfant", a répondu l'experte psychologue, jugeant Ana Maria Barbosa de Sousa "incapable d'investir une fonction maternelle", concentrée sur ses relations amoureuses houleuses. "En détresse psychologique" selon son avocat, Me Jean-Raphaël Doyer, elle avait déjà perdu sa fille Joulia, décédée en 2013 quand son parrain l'avait laissée tomber. A la mort de Mélinda, elle était poursuivie pour des maltraitances et ses deux autres enfants étaient placés.

Les services sociaux "auraient pu éviter ça", ont jugé Me Nathalie Bucquet et Jean-Philippe Broyart, avocats des associations Innocence en danger et Enfance et partage. Car "dès la fin janvier" le juge des enfants, alerté par un courrier du père de Mélinda, avait saisi l'AGSS (Association de gestion des services sociaux) de Maubeuge, déclenchant une enquête sociale. "Que s'est-il passé (jusqu'à) la première visite de l'éducatrice en avril" puis "entre l'achèvement le 3 mai de son rapport - inquiétant - et sa réception par le juge mi-mai?", se sont interrogés ces avocats, pointant des "délais de traitement trop longs" et un "système" impuissant. Ils entendent désormais engager une action en responsabilité à l'encontre de ces services.