Le parquet de Thionville, en Moselle, va poursuivre ArcelorMittal pour "gestion irrégulière de ses déchets" pour avoir déversé sans autorisation sur un crassier des eaux usées, présentées en juin 2017 par un intérimaire comme des rejets d'acide, a-t-il indiqué vendredi.
Une enquête préliminaire avait été ouverte à l'été 2017 pour "atteinte à l'environnement" après la diffusion de vidéos "laissant apparaître des déversements par la société d'un liquide de couleur jaunâtre, qualifié de rejets acides par l'auteur de la vidéo", a rappelé dans un communiqué Christelle Dumont, procureure à Thionville.
Le produit déversé serait issu d'une cuve de stockage d'eaux usées. Les investigations, menées par la police judiciaire de Metz et l'Office central de lutte contre les atteintes à l'environnement et à la santé publique, ont déterminé "que le produit déversé sur le crassier est issu d'une cuve de stockage d'eaux usées relevant de la ligne de décapage et de régénération d'acide", a-t-elle ajouté. "Tout au plus, il peut être reproché à la société ArcelorMittal une gestion irrégulière de ses déchets, délit puni de deux ans d'emprisonnement et 75.000 euros d'amende, qui fera l'objet de poursuites par le parquet", a indiqué Christelle Dumont.
Pas d'impact significatif sur l'environnement. L'une des deux citernes du camion apparaissant sur les images, filmées en décembre 2016, contenait "de l'eau usée avec un faible pourcentage d'acide chlorhydrique", est-il détaillé. La seconde citerne renfermait "de l'eau usée avec un faible pourcentage d'acide chlorhydrique et une concentration conséquente de boue d'hydroxyde de fer". "Si la lagune boues diverses du crassier de Marspich a vocation à accueillir, en vertu d'un arrêté préfectoral, les boues d'hydroxyde de fer, elle n'est, cependant, pas autorisée à recevoir les eaux usées", a observé Christelle Dumont. "Ce déversement, bien que non autorisé dans le cadre de l'arrêté préfectoral, n'apparaît pas avoir eu d'impact sur l'environnement", a-t-elle précisé, s'appuyant sur des prélèvements réalisés par la Direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement.
Dans un communiqué, ArcelorMittal insiste sur le fait que "aucune accusation de déversement d'acide, de pollution sur le site de Florange ou de fraude n'est retenue" et qu'il "fera valoir sa position et ses arguments de défense" concernant le déversement considéré comme non autorisé par le parquet. Les avocats de l'intérimaire, qui avait réalisé les vidéos, considèrent eux que les conclusions de la procureure excluant un impact sur l'environnement sont "bien timides et surtout sans proportion avec la gravité des révélations" de leur client.
Une plainte sera déposée pour "mise en danger de la vie d'autrui". Sur les vidéos, l'intérimaire, employé par un sous-traitant d'ArcelorMittal à Florange, se disait contraint de déverser sur le crassier de Marspich de l'acide servant à décaper l'acier. Les élus locaux s'étaient inquiétés d'une éventuelle pollution des cours d'eau. Le groupe sidérurgique avait nié toute responsabilité dans ces "prétendus versements" et ordonné l'ouverture d'une enquête interne "pour faire toute la lumière sur les faits". "Une plainte sera déposée pour mise en danger de la vie d'autrui et autres infractions", avec demande d'indemnisation, affirment les avocats de l'ancien employé qu'ils présentent comme "ostracisé et ainsi sans emploi" depuis ses révélations et "endur(ant) de lourdes conséquences médicales du fait de son exposition à l'acide".