Rarement une affaire avait autant déchaîné l’opinion. Et la décision de la cour d’appel de Paris ne devrait pas faire retomber la tension. Selon des sources judiciaires, la demande de libération conditionnelle de Jacqueline Sauvage a été une nouvelle fois rejetée. Le parquet général ne s'y était pourtant pas opposé. Selon les avocates, la cour d'appel demande, dans ses motivations, lui d'accepter "pleinement sa peine et les conditions de son exécution, de sortir du discours de survictimisation et d'approfondir les efforts d'introspection".
Jacqueline Sauvage avait été condamnée en octobre 2014, puis en appel en 2015, à dix ans de réclusion criminelle pour le meurtre de son mari violent. Ses trois filles avaient témoigné à charge contre leur père, expliquant avoir été violées et battues comme l'était leur mère. La cour avait néanmoins systématiquement rejeté l’excuse de légitime défense, notamment en raison des circonstances du meurtre : trois balles dans le dos. Devant l’émoi suscité par sa condamnation, le président de la République, François Hollande, lui avait accordé une grâce partielle.
Une première demande refusée. Mais celle-ci ne remettait pas en cause le fond de sa condamnation pour "meurtre aggravé" et ne permettait pas à cette femme de 68 ans "de présenter immédiatement une demande de libération conditionnelle", avait indiqué l’Elysée à l’époque. Jacqueline Sauvage a donc dû déposer une demande en bonne et due forme auprès du tribunal d’application des peines de Melun. Demande rejetée le 12 août, à la surprise générale.
Malgré un comportement jugé correct en détention et des rapports d’experts ne voyant aucun risque de récidive avéré, le tribunal lui avait reproché "de ne pas assez s’interroger sur son acte". Les magistrats ont également estimé que Jacqueline Sauvage ne présentait pas des conditions de garanties suffisantes. Habiter chez sa fille à moins de 15 kilomètres du lieu du meurtre, "compte-tenu des soutiens dont elle bénéficie et de la médiatisation des faits, risquerait de la maintenir dans une position victimaire". Ses avocates avaient alors dénoncé "un véritable acharnement judiciaire".
Elles avaient néanmoins changé de stratégie pour la décision en appel, optant pour la discrétion puisque la surmédiatisation des faits était l’un des éléments expliquant le refus de libération. Elles avaient également proposé une nouvelle adresse de logement, chez une autre de ses filles dans le Sud-Ouest de la France. Lors d'une audience qui s'est tenue à huis clos le 27 octobre, l'avocat général ne s’était pas opposé à sa demande.
Et maintenant ? Jacqueline Sauvage, qui a déjà purgé plus de trois ans de sa peine, principalement au titre de la détention provisoire, pourra déposer un nouveau dossier de libération conditionnelle devant le tribunal d'application des peines de Melun. Mais compte-tenu de la lassitude qu’elle avait exprimée après le premier rejet de sa demande, cette hypothèse est très incertaine. D’autant que du fait des réductions de peine automatiques, Jacqueline Sauvage pourrait être libérée en juillet 2018.