Le cardinal Philippe Barbarin, relaxé la semaine dernière à l'issue de son procès pour non-dénonciation des abus sexuels d'un prêtre, a confié au Point que cette affaire l'avait "changé", mais qu'elle resterait "toujours collée" à son visage.
"Tourner la page"
"Cette affaire restera attachée à mon nom et me collera toujours au visage. Je resterai celui qui n'a pas dénoncé des actes odieux", a regretté le prélat dans un entretien publié mercredi soir, moins d'une semaine après la relaxe prononcée par la cour d'appel de Lyon qui l'a, dit-il, "réconforté". L'archevêque de Lyon a annoncé à l'issue de son procès qu'il allait de nouveau remettre sa démission au pape pour "tourner la page" de cette affaire symbole des défaillances de l'Église face à la pédocriminalité dans ses rangs. Le pape a indiqué qu'il s'accorderait un délai de réflexion pour statuer.
Avec le recul, Philippe Barbarin estime que ces dernières années l'ont "changé". "Des victimes sont venues vers moi de partout, et m'ont aidé à comprendre la gravité et la persistance de cette blessure si profonde qui a bouleversé leur vie", assure-t-il.
"C'est l'opinion publique qui décide"
En mars dernier, le tribunal correctionnel avait condamné le prélat de 69 ans à six mois de prison avec sursis pour ne pas avoir dénoncé à la justice les agressions sexuelles commises par un curé de son diocèse, Bernard Preynat, sur de jeunes scouts entre 1971 et 1991. Comme à son procès, le cardinal répète qu'il ignorait les agissements du prêtre avant de rencontrer une victime en 2014. "Ce n'est qu'à la fin de l'année 2014 (...) que je prends conscience, brutalement, de la réalité des actes commis, de ce qu'ils signifiaient concrètement, de la souffrance des victimes (...) Je me rends compte que je n'ai pas pris les bonnes mesures", explique-t-il.
"Je regrette de ne pas avoir approfondi l'investigation avec Preynat (...) Le scandale a énormément grossi car nous avons trop attendu. Je n'ai jamais voulu ni pensé cacher quoi que ce soit. Apprenant des agressions, je ne me suis jamais dit : 'Pourvu que cela ne se sache pas'", poursuit le Primat des Gaules. Interrogé sur son sentiment de réhabilitation, Barbarin explique: "J'ai été déclaré non coupable. Je suis d'abord citoyen français, et en ce sens, oui, c'est une réhabilitation. Après, c'est l'opinion publique qui décide".