Pas d'annonce, mais la promesse réitérée d'un soutien à long terme de l'État : le Premier ministre Gabriel Attal est revenu jeudi au chevet des habitants du Pas-de-Calais, traumatisés par les épisodes de crues qui touchent depuis novembre leur département, à nouveau inondé localement.
Face aux élus locaux désespérés, aux habitants parfois en larmes ou évoquant leurs "pensées noires", le Premier ministre s'est lancé dans une longue séquence de calinothérapie, un mois après son premier passage dans le département, le jour même de sa prise de fonctions.
La situation est "intenable" pour les habitants, a-t-il convenu lors de ce déplacement à Blendecques et Longuenesse, avant de rappeler ses engagements, notamment la simplification des procédures pour accélérer les travaux ou curer les cours d'eau. Et "éviter qu'en novembre prochain, on se retrouve avec la même chose".
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"Tout ça a été fait", a-t-il dit. Mais "est-ce que tout a été réglé ? Non", a-t-il ajouté, promettant de "continuer à agir" et de revenir dans un mois. Il a annoncé le déblocage de "10 millions d'euros supplémentaires" aux 50 millions promis par Emmanuel Macron pour assister les collectivités, confirmant ainsi le chiffre de 60 millions déjà évoqué mercredi par la porte-parole du gouvernement Prisca Thevenot.
Lors d'échanges avec des commerçants exposant leurs doléances, il a aussi insisté sur l'aide de 5.000 euros qu'ils pourront toucher pour compenser leur perte d'exploitation.
Contraint d'écourter sa visite pour cause de remaniement
Contraint d'écourter sa visite pour cause de remaniement, il a glissé que le drame des inondations lui permettait de prendre "beaucoup de recul" sur les "péripéties politiques" du moment, dans une allusion à la crise ouverte dans la Macronie par les récents propos de François Bayrou .
Face à Gabriel Attal , un habitant qui a tout perdu dans les inondations ne peut retenir ses larmes. "Vous avez le droit de craquer. Ce que vous vivez, beaucoup de Français auraient déjà craqué et ne seraient même pas là pour en parler. Il n'y a pas de honte", lui répond le Premier ministre. "J'ai confiance en vous", lui lance l'homme. Au plus près de la détresse des sinistrés, le Premier ministre a confirmé un grand plan d'aménagement contre les inondations. "Il faut que dans les mois qui viennent, on y aille, pardon de l'expression, mais 'comme des bêtes' pour faire tous les travaux nécessaires, pour qu'à l'automne prochain, on soit beaucoup mieux armés, beaucoup mieux préparés", a insisté Gabriel Attal.
Les habitants attendent la concrétisation des engagements
Simplification des démarches, suppression des normes inutiles... Un élan salué par le maire d'un village en bord de Canche. "Qu'on donne du pouvoir aux gens. Moi, je réclame des grands travaux. C'est nettoyer la Canche. Que le préfet puisse dire 'allez, on y va, on met les grues'", espère l'édile au micro d'Europe 1.
Promesse d'indemnisation, accélération des procédures d'assurance... Typhaine attend toutefois la concrétisation des engagements. "On reste toujours un peu sur la défensive, de voir les actes. C'est vrai que maintenant on veut action, réaction." Gabriel Attal a promis de revenir le mois prochain. "Excellente idée", dit un élu. "Ça va maintenir la pression sur toutes les administrations concernées."
"On craint le pire"
D'autant que le Pas-de-Calais, qui a connu en novembre et janvier deux épisodes de crues de grande ampleur, n'en a pas fini avec les inondations : à une cinquantaine de kilomètres du déplacement ministériel, le fleuve Canche, placé en vigilance orange, est sorti jeudi de son lit, relançant l'inquiétude sur un territoire à bout.
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Ces deux épisodes ont déjà laissé respectivement 6.500 et 2.800 habitations sinistrées, selon la préfecture, qui a comptabilisé près de 300 demandes de relogement temporaire. Le secteur de Brimeux, près de Montreuil-sur-Mer, était "le plus touché" jeudi matin par les crues de la Canche, selon la préfecture.
Un correspondant de l'AFP a constaté dans cette commune de 900 habitants que des routes ont été coupées par l'eau et des jardins inondés. "Nous allons rehausser au maximum nos meubles et nos appareils d'électroménager cet après-midi. Pour la suite, on verra bien, mais on craint le pire pour les heures à venir", confient Tania Selve et Maurice Sammarcelli, deux habitants qui ne peuvent que constater la montée des eaux autour de leur petite propriété achetée en octobre dans cette zone de marais.
Pompes redéployées
"C'est la même situation qu'au mois de novembre et qu'au mois de janvier, ça se répète pour la troisième fois", se désole un riverain, Régis Lacroix, dont le jardin est en partie inondé. Les précipitations doivent se poursuivre jusqu'à vendredi matin, risquant "d'entraîner de nouvelles réactions sur les cours d'eau les plus réactifs", prévient d'ores et déjà Vigicrues.
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Les crues anticipées sur la Canche devraient cependant rester moins importantes qu'en novembre et janvier, précise le prévisionniste. Le préfet du Pas-de-Calais a décidé mardi du "déploiement préventif de sapeurs-pompiers, de policiers et de gendarmes" et du repositionnement sur le terrain des pompes utilisées lors des précédents épisodes, afin de les réactiver rapidement en cas de besoin.
Le préfet a également demandé à VNF (Voies navigables de France) et à l'Institution des Wateringues (les fossés de drainage de cette zone de polder, ndlr) d'activer les "moyens de pompage dont ils disposent pour anticiper la montée des eaux dans les canaux et cours d'eau dont ils ont la gestion". Dans l'Aisne, quatre routes ont également été submergées par les eaux jeudi, entraînant la mise en place de déviations, selon la préfecture.