Plus de 200 millions d'euros en provenance des États-Unis blanchis via des sociétés auvergnates

Le montant de l'argent détourné s'élève à plus de 230 millions d'euros (photo d'illustration). © AFP
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Alain Acco avec M.L , modifié à

Une enquête préliminaire coordonnée par le parquet national financier a révélé un complexe circuit de blanchiment d'argent lié à des jeux en ligne illicites aux Etats-Unis. 

Pendant des années, des dizaines de millions d'euros ont transité via plusieurs sociétés basées... en Auvergne. Selon les informations d'Europe 1, une enquête préliminaire menée par le parquet national financier (PNF), sous l'égide de l'unité de coopération judiciaire de l'Union européenne (Eurojust) et d'Europol, a mis au jour un vaste et complexe circuit de blanchiment d'argent en provenance des États-Unis, qui transitait par six États membres de l'Union Européenne, puis plusieurs centres financiers offshore, notamment en Asie. 

D'importantes sommes en provenance des États-Unis. Les prémices de l'affaire remontent à 2013, lorsque plusieurs banques de Clermont-Ferrand, en Auvergne, remarquent le train de vie inhabituel d'un de leurs clients. Sur les comptes de cet homme d'une quarantaine d'années, marié et père de famille, arrivent d'importantes sommes d'argent en provenance des États-Unis, et rapidement virées à d'autres bénéficiaires. Les établissements bancaires effectuent alors un signalement à Tracfin, l'organisme du ministère de l'Économie chargé de la lutte contre le blanchiment d'argent.

Une dizaine de "coquilles vides" en France. Le dossier est confié au parquet de Clermont-Ferrand, puis au parquet national financier (PNF). L'enquête, menée par la police judiciaire de Clermont-Ferrand et l'office central de lutte contre la corruption et les infractions financières (OCLCIFF), révèle que le quadragénaire reçoit, sur les comptes d'une dizaine de "coquilles vides", des entreprises dédiées au blanchiment, des sommes comprises entre 10 et 700 dollars (9 et 650 euros). Ces dernières proviennent des comptes de particuliers américains, qui misaient sur des plateformes illicites de paris en ligne.  

230 millions d'euros convertis. L'argent transitait ensuite via le Danemark, l'Allemagne, l'Espagne, la Lettonie, la Lituanie et l'Estonie, dont est originaire la compagne du suspect, avant de rejoindre des places offshores à Hong-Kong, Singapour, aux Seychelles et en Nouvelle-Zélande. Grâce à la coopération des magistrats et policiers de ces pays, les enquêteurs ont pu reconstituer l'ampleur des délits, évalués à plus de 230 millions d'euros d'argent illicitement converti et 3 millions d'euros éludés d'impôt sur le revenu.  

Voitures de luxe et cave à vin. Avec le soutien d'Europol et d'Eurojust, les enquêteurs ont mené une quinzaine de perquisitions dans plusieurs pays européens, dans le cadre d'une opération baptisée "play and win" (jouer et gagner). Ces dernières ont permis de saisir quatre voitures de luxe et sept biens immobiliers appartenant au suspect français, au train de vie très élevé. Ce dernier possédait plusieurs dizaines de cartes bancaires. Au sous-sol de sa résidence auvergnate, dotée d'une luxueuse piscine intérieure, les policiers ont découvert une immense cave à vin de luxe, remplie de bouteilles de grands crus. Au total, le montant des avoirs saisis s'élève à 3,5 millions d'euros. 

La suite de l'enquête doit permettre de retrouver l'argent ainsi détourné. Le principal suspect, pas encore mis en examen, risque jusqu'à 10 ans de prison pour fraude fiscale et blanchiment de fraude fiscale en bande organisée.