Le ver de terre disparaît peu à peu. Cette bête qui vit sous nos pieds est menacée par l'homme et par les pratiques de l'agriculture intensive. Ainsi, dans les sols français cultivés avec des engrais chimiques et des pesticides, on trouve au moins deux fois moins d'espèces de ver de terre que dans les prairies. Et dans certaines exploitations, ils ont presque totalement été éradiqués, ont constaté depuis des années des microbiologistes des sols.
>> Quelles sont les conséquences de cette disparition progressive ? Et pourquoi s'inquiéter de ce phénomène ? Christophe Gatineau, agronome et cultivateur, auteur du livre Eloge du ver de terre, invité mercredi au micro de Wendy Bouchard, dans Le tour de la question sur Europe 1, nous éclaire.
>> De 9h à 11h, c’est le tour de la question avec Wendy Bouchard. Retrouvez le replay de l’émission ici
Sans eux, les sols seraient morts
Les vers de terres, dont l'espèce la plus connue est le lombric, sont des êtres essentiels à la biodiversité. Sans eux, nos sols ne pourraient pas se nourrir. "Ils sont la colonne vertébrale des sols. Ils fabriquent la fertilité, ils rajeunissent les sols, ils oxygènent les sols. Or les plantes, les racines des plantes et les animaux ont besoin de cet oxygène pour se développer", rappelle Christophe Gatineau. En labourant les sols, parfois jusqu'à deux mètres de profondeur, les lombrics permettent aussi aux végétaux d'avoir un meilleur accès à l'eau. Ainsi, "les sols où il n'y a plus de vers de terre deviennent stériles", expliquait également Huvert Reeves, invité en mai sur Europe 1.
Ce travail de labour est essentiel pour l'homme. "On a fini par croire que notre alimentation venait des supermarchés, mais on a oublié que ce n'était qu'un intermédiaire et que notre nourriture vient des sols", pointe l'auteur d'Eloge du ver de terre. "Sans sol, on ne pourra pas se nourrir et cela pose un problème pour le devenir de l'humanité".
Ce sont de super "recycleurs"
Le ver de terre est aussi utile pour recycler les déchets de l'homme. "Il passe son temps à récupérer de la nourriture. Il aime les oignons, les choux et même la viande", précise Christophe Gatineau. Une fois digéré, il transforme ces aliments en compost, qui peut ensuite être réutilisé.
D’après une étude du ministère de l’Agriculture, de l’Alimentation et des Affaires rurales de l’Ontario, au Canada, une masse de 1,5 kg de vers de terre (soit à peu près 7. 500 vers de 0,2 g chacun) pourrait ainsi éliminer les déchets organiques d’un ménage de deux personnes, rappelait la revue trimestrielle We Demain, en mai.
Ils sont intelligents
S'il n'est pas encore considéré officiellement dans la loi française comme un animal, le ver de terre est pourtant doué de sensibilité. "Les grands chercheurs qui ont travaillé sur cet animal, et notamment Darwin, qui a observé les vers de terre pendant 40 ans, cite vingt fois dans son livre le mot intelligence pour parler des vers de terre. Il rappelle qu'ils ont conscience de leur environnement", détaille Christophe Gatineau.
Cet animal possède notamment la capacité de choisir sa nourriture. Et s'il estime qu'il ne peut pas la digérer, il va la mettre à composter. "C'est ce qu'il fait avec les feuilles. Il les met de côté dans son terrier et il laisse les champignons les décomposer avant de les consommer", ajoute le spécialiste. "Il n'y a pas que les humains et les fourmis qui cultivent leurs nourritures, les vers de terre aussi".