Pourquoi le reconfinement va être (encore) plus dur psychologiquement

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Les Français s'apprêtent à revivre, au moins pour quatre semaines, un nouveau confinement après celui du printemps. Mais contrairement aux deux mois sous cloche de mi-mars à mi-mai, les restrictions actuelles devraient être plus difficiles à supporter, selon la psychologue clinicienne Catherine Tourette-Turgis.
ANALYSE

La crainte de nombreux Français s'est vérifiée mercredi soir, sur les coups de 20h15 : face à la progression extrêmement rapide du coronavirus, Emmanuel Macron a annoncé un reconfinement général de la population pour au moins quatre semaines, avec la possibilité de voir ces restrictions de déplacement durer plus longtemps. Quel impact ce confinement va-t-il avoir sur une société déjà marquée par le premier confinement du printemps ? Pour en discuter, Catherine Tourette-Turgis, psychologue, sociologue et professeure à Sorbonne Université, était l'invitée d'Europe 1, jeudi matin.

Selon Catherine Tourette-Turgis, six mois après la fin du premier confinement, "on a comme une rechute". "On voyait bien en septembre qu'il y avait moins d'anxiété, moins de dépressions, etc. Mais là, il faut reprendre ce traitement douloureux qui est le fait de retourner, même si les restrictions sont allégées, se confiner."

"Effet rechute"

Pourtant, il serait illusoire de penser revivre la même chose qu'au printemps, en raison de cet "effet rechute" : "Ça ne pourra pas être pareil", affirme la spécialiste. D'abord, il n'y aura peut-être pas de fêtes pour les soignants, qui sont épuisés. Les malades sont parfois blâmés sur le thème de 'Vous saviez comment il fallait se protéger'. Ça va être différent, complexe."

Le ton du chef de l'État a lui aussi changé : du "nous sommes en guerre" très militaire du printemps, Emmanuel Macron a préféré affirmer que la France était "submergée" par la seconde vague de coronavirus. "Cela instaure un climat psychologique de catastrophe naturelle", selon Catherine Tourette-Turgis, d'après qui "les risques de déprime et d'effondrement" sont notables avec un "sentiment de perte de contrôle du système sanitaire". Elle souligne aussi la "porte ouverte vers l'inventivité et la créativité sociale", insistant sur le "manque de narratif" de l'exécutif pour aider les Français : "Il n'y a pas de mise en récit."

La clé de la prévention

Dans ces conditions, comment tenir psychologiquement ? Sur le confinement, "toutes les études montrent qu'il faut être présent, accompagner, soutenir, se soucier, mettre en place de la télé-intervention (on parle de télé-thérapie), quoi que ce soit qui pourra être bon pour la personne", martèle la psychologue. Pour elle, "on y arrive par le travail de proximité", avec des efforts de "chacun dans son groupe social, dans son immeuble", etc.

L'accent doit aussi être mis sur la prévention, avec la nécessité de "l'humaniser, l'individualiser, la différentier et l'inventer". "Si on veut motiver, il faut faire rêver sur la prévention", estime Catherine Tourette-Turgis, appelant de ses vœux "des récits sur la manière d'arriver à mettre en place une prévention jusqu'à l'oubli. Une prévention qui marche est une prévention qui devient systématique. On n'en est pas là."