Procès Benalla : "Un passeport diplomatique, c’est juste un bout de papier avec un nom"

Alexandre Benalla a tenté de se justifier, jeudi, sur l'utilisation de passeports diplomatiques. © Marion Dubreuil
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Marion Dubreuil , modifié à

La justice reproche à Alexandre Benalla de ne pas avoir restitué ses deux passeports diplomatiques après son licenciement, en juillet 2018. Il a voyagé avec ces documents de service au Maroc, en Turquie, au Tchad et aux Bahamas à de nombreuses reprises entre août et décembre 2018, "par confort", a-t-il expliqué jeudi, au tribunal.

La tension est palpable, ce jeudi, dans la salle d’audience du deuxième étage du tribunal correctionnel de Paris. Alexandre Benalla, sur le banc des prévenus, évite soigneusement de croiser le regard de son ancien patron, Francois-Xavier Lauch, assis face à lui du côté des parties civiles. Et pour cause : l'ancien chargé de mission à l'Élysée est soupçonné de s’être appuyé sur un faux document administratif pour faire renouveler son passeport, faisant croire que cette démarche était validée par celui qui était alors chef de cabinet du président Emmanuel Macron.

La présidente, Isabelle Prevost-Deprez, met les pieds dans le plat : "Je ne veux pas semer la brouille entre vous, mais…" Les positions des deux hommes sont irréconciliables, comme leur place dans le tribunal et leur parcours. D’un côté, il y a un préfet énarque et de l’autre un sans-grade débrouillard. Leurs relations n’ont jamais été au beau fixe, avait expliqué Alexandre Benalla pendant l’instruction. Il n’a d’ailleurs pas averti Francois-Xavier Lauch, qui était pourtant son supérieur, qu’il allait suivre la manifestation du 1er-Mai.

Des fonctions minimes pour Benalla ?

Francois-Xavier Lauch affirme aussi qu’il a découvert rétrospectivement qu’Alexandre Benalla s’était fait faire deux passeports pour "incompatibilité de visa". Un acte complètement injustifié, selon l’ex-chef de cabinet du président.

François-Xavier Lauch (Crédits Marion Dubreuil pour Europe 1)

À la barre, si François-Xavier Lauch veut bien reconnaître des qualités à Alexandre Benalla, comme "sa réactivité" ou "sa force de travail", il s’attache surtout à réduire le champ des fonctions alléguées de l’ex-chargé de mission de l’Élysée. Et notamment sur l’absence de voyage à l’étranger, Alexandre Benalla avait la responsabilité des voyages privés du couple présidentiel. Voilà tout.

Le "mur médiatique" et les passeports

"En quoi cette activité nécessite la détention de passeports diplomatiques ou de service ?", demande la présidente à Alexandre Benalla. Le prévenu explique qu'il s'en sert comme justificatifs d'identité, y compris en France "pour acheter un billet de train ou pour louer une voiture". "Louer une voiture pour emmener le président de la République ?", s’étrangle la présidente. Alexandre Benalla cherche à minimiser l’importance d’un passeport diplomatique : "C'est rien du tout, juste un papier qui comporte votre nom, une adresse, une photo. Ça ne permet rien du tout." "On se demande bien pourquoi on se décarcasse pour en avoir", ironise la présidente.

Alexandre Benalla reconnaît un usage inapproprié des passeports après l’affaire qui éclate en juillet : "Je prends le mur médiatique c’est un peu le bazar dans ma vie. Je n’ai pas de toit. Je vis au jour le jour", rembobine-t-il. Mais l'ancien conseiller d'Emmanuel Macron conteste l’infraction de faux document. Il risque jusqu'à un an d'emprisonnement et 15.000 euros d'amende pour l'usage des passeports hors autorisation et trois ans de prison et 45.000 euros d'amende pour le délit de faux en écriture.