Plutôt Marine Le Pen ou Jean-Luc Mélenchon en cas de second tour à la présidentielle entre les deux opposants ? "Je peux encore changer d'avis, mais je crois que, s’il fallait choisir entre les deux, et si le vote blanc n’était pas une option, j’irais à 19h59 voter pour Marine Le Pen en me disant, sans y croire, 'Plutôt Trump que Chavez.'" C'est par ces mots que le philosophe Raphaël Enthoven a enflammé le réseau social Twitter et suscité un important tollé. Invité sur Europe 1 mercredi, l'ancien chroniqueur exprime ses regrets d'avoir partagé publiquement son opinion et sa réflexion, mais maintient son analyse.
"Le mea culpa porte sur le fait d'avoir partagé ce qui ne devait pas l'être"
"Je regrette de les avoir dits, pas de les avoir pensés", confie-t-il. Raphaël Enthoven estime que chacun a le droit de "peser le pour et le contre entre deux hypothèses", ce qu'il a fait, mais considère que son erreur a été de "renseigner les gens" sur ce qu'il pourrait faire lui-même. Il reconnaît son tweet comme une "témérité" et juge son partage "idiot" car cela sabre "tout ce que vous avez essayé d'introduire avant d'éventuellement nuancé".
Pour autant, rappelle Raphaël Enthoven, son propos n'était pas un soutien à la candidate du RN. Il essayé d'expliquer que, dans le cas de figure évoqué, un second tour Le Pen-Mélenchon sans possibilité de voter blanc, "les deux représentaient des dangers équivalents". À son sens, "entre la peste et la peste, il fallait viser le calcul d'intérêt", et donc voter Marine Le Pen.
« Imagine, au 2è tour, #Mélenchon se retrouve face à #LePen, tu votes pour qui ? » Tentative de réponse aux innombrables qui m’ont posé cette question dans le week-end.
— Raphaël Enthoven (@Enthoven_R) June 7, 2021
"C'est en ça que j'ai eu tort", appuie le philosophe, parce que la conclusion de son propos "en effaçait la teneur, alors que l'enjeu était de dire que le RN et LFI obéissent à des logiques similaires". Aussi, "le mea culpa porte sur le fait d'avoir partagé ce qui ne devait pas l'être", et pas sur l'analyse qu'il maintient mais aurait dû garder en dehors de Twitter.
"Twitter a le QI d'une poule mais la mémoire d'un éléphant"
Très friand de ce réseau social où il poste habituellement beaucoup, Raphaël Enthoven pense qu'il "y a des choses qu'on ne peut pas mettre sur ce réseau, qui n'y trouvent pas leur place". Cela s'explique notamment, selon lui, par le fait que "Twitter a le QI d'une poule mais la mémoire d'un éléphant", ce qui fait que l'on peut se retrouver "enfermés à jamais" dans des paroles dites avec "la légèreté d'une poule".
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Le philosophe ne compte pas fermer son compte, simplement prendre temporairement de la distance en raison de la polémique, mais il "ne renonce pas du tout à s'occuper de ce réseau, à travailler dessus, à y introduire de la critique autant que possible", prévient-il.
"Le RN n'a aucun besoin d'être dédiabolisé"
Il réfute toutefois les accusations selon lesquelles, avec sa prise de position, il pourrait faire sauter une nouvelle digue face au RN et contribuer à le dédiaboliser. "Le RN n'a aucun besoin d'être dédiabolisé, il y a 30 % de Français capables de voter pour le RN au premier tour. Parler de diable c'est lui donner les conditions du succès", selon Raphaël Enthoven.
De même, il rejette la comparaison "abjecte" et "absurde" avec les propos de certains "bourgeois qui disaient : plutôt Hitler que Blum", lors de l'entre-deux-guerres. Il estime que Blum était un rempart là, ou à l'inverse, "les gens qui se comparent à Léon Blum aujourd'hui se couchent devant le danger objectif que représente l'islamisme et sont les héritiers d'une tradition qui est le contraire de la sienne". De plus, affirme-t-il, "comparer Marine Le Pen avec Hitler, c'est se priver définitivement de s'adresser aux gens" qui votent pour elle.