Le Sénat à majorité de droite a adopté jeudi en nouvelle lecture la proposition de loi socialiste renforçant la lutte contre la prostitution tout en rejetant à nouveau, contre l'avis du gouvernement, la pénalisation des clients prévue par le texte.
Retour à l'Assemblée nationale.C'est la troisième fois que les sénateurs refusent ce dispositif, au cœur de la proposition de loi. 195 sénateurs, Les Républicains (LR), les écologistes et 14 RDSE, à majorité PRG, ainsi que 14 UDI-UC et 15 socialistes ont voté pour la version du texte modifiée par le Sénat. 91 socialistes, 9 centristes, le groupe Communiste républicain et citoyen (CRC) et les 3 sénatrices RDSE ont voté contre, soit 123 sénateurs en tout. La proposition de loi va à présent repartir à l'Assemblée nationale qui aura le dernier mot et rétablira l'article sur la pénalisation des clients. Députés et sénateurs avaient échoué à trouver une version commune à l'occasion d'une commission mixte paritaire.
Une violence "intolérable". Au cours du débat, les sénateurs ont rejeté des amendements socialiste, communiste et du gouvernement visant à rétablir la pénalisation des clients. "Cet article est indispensable à l'équilibre et à la cohérence du texte de loi. Il réaffirme clairement la position abolitionniste de la France et permet d'affirmer concrètement que nul n'est en droit d'exploiter la précarité et la vulnérabilité ni de disposer du corps d'autrui pour lui imposer un acte sexuel par l'argent", a déclaré Maryvonne Blondin (PS), un avis partagé par Laurence Cohen (CRC). Pour Laurence Rossignol, ministre des Familles, de l'Enfance et des Droits des Femmes, il s'agit de réaffirmer que "l'achat d'actes sexuels, comme toutes les formes de violence, ne saurait être toléré".
Se donner bonne conscience ? La rapporteur de la commission spéciale, Michelle Meunier (PS), a souligné, en le regrettant, que "la pénalisation des clients constitue le seul point sur lequel la commission a modifié ce texte". Elle a en revanche estimé que le texte "affirme symboliquement ce qui n'est plus acceptable dans une société où femmes et hommes sont égaux". Esther Benbassa (écologiste) a estimé pour sa part que "pénaliser les clients, c'est se donner bonne conscience". "Mais que deviendront ces femmes ?", a-t-elle demandé en accusant les auteurs du texte espérer "sans doute tirer un bénéfice politique de leur position".