1h30 d'horreur. Les images, filmées en caméra cachée par l’association L214 sont insoutenables. Des animaux sont envoyés à l’abattage à coups de crochets ou de décharges électriques par les employés de l’abattoir de Mauléon-Licharre dans les Pyrénées-Atlantiques. Bovins et ovins sont saignés, et pour certains découpés, alors qu’ils sont encore conscients. 1h30 d’horreur captée par cette association qui milite contre la maltraitance animale (attention les images peuvent choquer), qui relance le débat sur les méthodes d’abattage des animaux, d’autant que l’abattoir visé est certifié bio et Label Rouge. Que prévoit la loi ? Voici les principaux points qui encadrent les abattoirs :
- Le bien-être animal est une priorité. Depuis 2013, tous les abattoirs de France sont tenus de désigner dans leur personnel "un responsable du bien-être des animaux, qui est garant de la bonne application des mesures relatives au bien-être des animaux", explique le ministère de l’Agriculture. Le personnel de tous les abattoirs français et européens doivent dont être formés afin de ne pas faire souffrir les animaux, et ce, dans toutes les phases d’acheminement de l’animal jusqu’à son abattage.
- Étourdir l’animal est obligatoire. C’est justement l’un des points sur lesquels l’association L214 souhaite alerter. Dans la vidéo, nous pouvons en effet voir un animal se faire découper en deux alors qu’il est encore conscient. Un point sur lequel la réglementation est pourtant très claire : un animal doit être "maintenu dans un état d’inconscience et d’insensibilité jusqu’à sa mort", sauf si l’abattage se pratique selon un rituel religieux.
- Quelles sont les règles pour étourdir un animal ? Plusieurs méthodes sont possibles pour étourdir un animal, toutes détaillées dans un arrêté gouvernemental en date de 1997. Ainsi, selon la loi, un animal peut-être étourdi à l’aide d’un pistolet à tige perforante (un procédé légal qui est par ailleurs mis en cause dans la vidéo publiée par L214), par percussion à l’aide d’un pistolet d’abattage (un procédé également critiqué par L214 mais pourtant légal), par électrocution ou Electronarcose (une décharge électrique traverse le cerveau de l’animal), ainsi que par une exposition au dioxyde de carbone. Et, quelle que soit la méthode utilisée, elle doit maintenir l’animal inconscient jusqu’à sa mort.
- Quelles sont les règles pour un abattage rituel ? Dans le cas d’un abattage rituel, qu’il soit halal ou casher, l’étourdissement de l’animal n’est pas obligatoire. Ce type d’abattage doit obligatoirement se faire dans "des abattoirs agréées bénéficiant expressément d’une autorisation à déroger à l’obligation d’étourdissement", explique le ministère de l’Agriculture. Cette distinction est faite car ces abattoirs doivent être équipés de "matériels de contention conformes" permettant "d’immobiliser les animaux avant leur saignée". Cet abattage rituel fait l’objet d’une série de dérogations prévues par le droit de l’Union Européenne qui, autorise en théorie, uniquement l’abattage lorsque l’animal est étourdi préalablement. Par ailleurs, les sacrificateurs doivent être titulaires d’un certificat de compétence Protection animale (CCPA) et être habilités par des organismes religieux agréés par le ministre de l’Agriculture que sont la Grande Mosquée de Paris, la Mosquée de Lyon et la Mosquée d’Evry pour l’abattage halal et le Grand Rabbinat de France pour l’abattage casher.
- Quelles sont les règles pour un abattage bio ou Label Rouge ? Dans sa vidéo l’association L214 pointe du doigt le sort réservé aux animaux dans cet abattoir des Pyrénées-Atlantiques d’où sortent des produits bio et Label Rouge. Mais est ce que finalement ces labels changent les pratiques d’abattage ? Pas vraiment. En effet, ces labels concernent avant tout les méthodes d’élevage. Par exemple un poulet estampillé bio ou Label Rouge aura été élevé 81 jours minimum contre 40 jours pour un poulet sans label. En ce qui concerne l’abattage en tant que tel, un abattoir doit obtenir un certificat AB (pour agriculture biologique) pour pouvoir tuer et découper des animaux issus de la filière biologique. Mais finalement, ce certificat, qui ressemble beaucoup à celui pour le Label Rouge concerne avant tout le temps de transport de l’animal, qui ne doit pas dépasser une journée. Les animaux élevés en agriculture biologique doivent également être placés dans un parc à part dans l’abattoir et, il est interdit de tranquilliser les animaux avec des calmants pendant le transport. Après, tout comme l’abattage classique, les animaux se doivent d’être étourdis avant d’être abattus. En résumé, les failles mises en évidence par l’association L214 ne sont pas liées au fait que l’abattoir filmé soit bio et Label Rouge, car les règles ne changent pas.
- Un vétérinaire est-il toujours présent ? Le ministère de l’Agriculture n’impose pas la présence en continu d’un vétérinaire dans les abattoirs. En revanche, les Directions départementales chargées de la protection des populations y effectuent des contrôles réguliers pour vérifier le bon déroulement "des opérations d’immobilisation, d’étourdissement, d’abattage et de mise à mort", précise le ministère. Le matériel est également vérifié pour s’assurer qu’il est utilisé "dans des conditions conformes à la réglementation".
"Deux abrutis". Malgré ces contrôles vétérinaires et la réglementation, l’abattoir de Mauléon-Licharre dans les Pyrénées-Atlantiques est aujourd’hui pointé du doigt, à juste titre. "J'ai eu envie de vomir", a déclaré Gérard Clémente le directeur de l’abattoir. "Personne n'aurait imaginé que ça pouvait se passer. J'en ai discuté avec la vétérinaire qui était en larmes, personne n'aurait pu s'imaginer que ça se passait chez nous", a-t-il ajouté, expliquant que les maltraitances étaient le fait "de deux abrutis". "Deux abrutis" qui devront s’expliquer puisque L214 a porté plainte pour maltraitance, sévices graves et actes de cruauté.
De son côté, Stéphane Le Foll a demandé une inspection de tous les abattoirs français d’ici un mois.
Maltraitance animale à #Mauléon : suspension activité de l’abattoir, inspections ds tous les abattoirs d'ici 1 mois pic.twitter.com/OAjZyRPANZ
— Stéphane Le Foll (@SLeFoll) 29 mars 2016