Parmi les 10.000 candidats au concours écrit de professeur des écoles, la reporter d'Europe 1. Virginie Salmen a passé les épreuves de français et de maths et a rencontré les autres participants pour mieux comprendre comment les enseignants de demain sont recrutés.
Les futurs professeurs des écoles viennent à peine de terminer les écrits du concours qui leur permettra d'enseigner en école maternelle et élémentaire. La reporter d'Europe 1 s'est glissée mardi parmi les candidats pour passer elle aussi les épreuves écrites de français et de maths et ainsi mieux comprendre comment ces enseignants sont recrutés.
Un parc des expositions transformé en salle d'examens
La première épreuve de ce concours, c'est d'abord de se rendre dans le centre d'examen. Quelque 10.000 candidats sont convoqués au Parc des expositions de Villepinte, en Seine-Saint-Denis, à 35 minutes de RER du centre de Paris, alors que 88.000 personnes candidatent sur l'ensemble de la France. Un "no man's land" d'immeubles, de banques, avec une ou deux sandwicheries, selon la reporter Virginie Salmen. Le rendez-vous est donné au hall 3 dans l'une des immenses salles du parc des expositions. Là, des dizaines de petites tables blanches sont alignées, à perte de vue.
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Questions de grammaire et analyse de texte pour l'épreuve de français
Les candidats s'installent, au commandement du micro qui retentit dans tout le hangar, pour une épreuve de quatre heures de français, lundi, puis de 4 heures de maths mardi. La première épreuve, sur laquelle Virginie Salmen a planché, était une analyse de texte sur "la dynamique de la révolte" autour de quatre extraits d'Antigone d'Henry Bauchau, Aristophane, Zola et Camus. Il y avait également des questions de grammaire poussée, bien au-delà du niveau des cours d'école élémentaire, avec des nuances subtiles entre proposition circonstancielle de concession et proposition circonstancielle de conséquence, par exemple. Puis les candidats ont dû répondre à des questions sur les programmes scolaires.
Probabilités et géométrie pour l'examen de maths
Quant à l'épreuve de maths, "c'est vraiment des maths", confirme l'une des candidates, qui a pourtant fait des statistiques une bonne partie de sa carrière. Au programme donc, on trouve des calculs de probabilité, des fonctions, et bien sûr les théorèmes de Pythagore et Thalès, des souvenirs qui ont échappé à la mémoire de Virginie Salmen pour les exercices de géométrie.
Les épreuves en elles-mêmes sont assez exigeantes et il faut avoir un bon niveau de connaissances pour avoir une bonne note à la fois en français et en maths, note la journaliste candidate d'un jour. Néanmoins, même ceux qui ont des notes médiocres peuvent être sélectionnés : il suffit d'avoir entre 5 et 7 sur 20, suivant les années, pour être admissible en banlieue parisienne où les besoins en profs sont énormes. Après ces deux premiers examens écrits, les candidats retenus seront convoqués dans un mois pour passer des épreuves orales.
Une vocation plutôt qu'une motivation par le salaire
Qui sont les candidats qui passent ces concours ? La plupart d'entre eux sont des étudiants entre 22 et 25 ans avec un bac +5 - qui est le niveau requis pour se présenter - qui sont des femmes à 80%. Leur point commun est souvent l'envie de travailler auprès des enfants. Certains parlent même d'une "vocation".
"Le salaire [n'est pas un critère déterminant] parce que dans la formation du citoyen lucide, l'argent ne fait pas le bonheur", explique Dimitri au micro d'Europe 1. "Je pense qu'on peut s'épanouir sans argent. Et pour la relation aux parents, à chacun son rôle. Nous, on est formés à enseigner et à moi de les convaincre que ce que je fais, c'est bien. Et s'ils ne sont pas d'accord, qu'ils ne m'apprennent pas à faire mon métier, je ne leur apprends pas à faire le leur."
Devenir enseignant, une rêve de reconversion professionnelle
À côté de ces étudiants, on rencontre des centaines de cadres du privé, dont une majorité de femmes, qui ont souvent la quarantaine et qui sont en quête de sens dans leur travail qui viennent passer le concours. Par exemple, Romain, 42 ans, a été cadre marketing dans de grands groupes. Mais il y a deux ans, il a tout envoyé balader pour réaliser son rêve. Un choix qui implique aussi de profonds changements de vie. "Le problème du salaire se pose puisque je le divise quasiment par trois", détaille-t-il.
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"Mais l'avantage que j'ai par rapport à des jeunes de 25 ans, c'est que j'ai 20 ans de carrière. J'ai eu l'occasion de me constituer un petit patrimoine qui me rendra les choses plus faciles. Mais à Paris, avec un salaire de 1.600 euros brut par mois pour commencer, c'est clair qu'on ne peut pas se loger seul. Je vais changer d'appartement en m'éloignant du centre pour aller en grande couronne." Et ces milliers de candidats de tous horizons se retrouvent dans les hôtels premiers prix du parc des expositions dont la nuit passe pour l'occasion de 30 la nuit à 120 euros.
La région parisienne, un concours plus ouvert
Certains candidats viennent de l'autre bout de la France parce qu'il y a plus de postes de professeurs ouverts en région parisienne et donc plus de chance de réussir le concours. "Je viens d'Orange, à quatre heures de train", explique Fanny. "Le Sud est très très demandé, donc il y a peu de places. Et n'ayant pas un niveau extraordinaire, je me suis dit que j'allais aller là où le niveau est un petit peu plus faible et donc où j'ai plus de chance." La jeune femme envisage donc de s'installer en région parisienne malgré le "manque de soleil et de cigales, mais on va s'y faire", assure-t-elle.