Les débats s'annoncent longs et intenses. L'examen du projet de loi sur la réforme des retraites débute lundi à l'Assemblée nationale, après un mouvement de grève d'une longueur inédite ayant paralysé les transports durant les mois de décembre et de janvier. Alors que, lundi, une nouvelle "journée morte" est prévue dans les transports, Europe 1 fait le point sur les principaux points de la réforme prévue par le gouvernement.
Un système de retraite "universel"
Le futur système couvrira "l'ensemble des personnes travaillant en France, sans exception" : salariés du privé et des régimes spéciaux, fonctionnaires, magistrats, militaires, agriculteurs, travailleurs indépendants. Tous les actifs nés à partir de 1975 cotiseront à une nouvelle "Caisse nationale de retraite universelle" qui chapeautera les 42 régimes existants - avant, peut-être, de les absorber.
En commission, les députés ont symboliquement acté la future hausse des salaires des enseignants, en isolant dans un article spécifique du projet de loi cette "garantie", amendement qui devra toutefois être revoté en séance. Pour répondre notamment à la grogne des avocats, ils ont aussi voté en faveur d'un abattement sur les cotisations des professions indépendantes, disposition qui devra aussi être confirmée dans l'hémicycle. Ils ont aussi prévu que les régimes de retraite complémentaire pourront puiser dans leurs réserves financières pour aider à la transition vers le régime universel dans des conditions fixées par ordonnance. Quant aux employeurs des régimes spéciaux, ils pourront prendre en charge pendant la période de transition les écarts de cotisation salariale des employés concernés.
Les députés ont également inscrit "en dur" une des ordonnances sur le "droit à l'information" des retraités, les oppositions critiquant de façon récurrente la trentaine d'ordonnances programmées. Dans un souci d'"exemplarité", les députés ont aussi prévu que la réforme s'appliquera dès 2022 pour les parlementaires entrant en fonction.
Et par points
Le montant de la retraite dépendra du nombre de points accumulés "tout au long de la carrière professionnelle" et non plus de la durée de cotisation (en trimestres) et du salaire de référence (25 meilleures années dans le privé, 6 derniers mois dans le public). Unité de compte fondamentale du futur système, le point aura une "valeur d'acquisition" (durant la carrière) et une "valeur de service" (pour le calcul de la pension), qui ne pourront pas baisser, ni augmenter moins vite que l'inflation. Cette règle sur l'évolution de la valeur du point, qui figurait déjà dans le projet de loi ordinaire, a été ajoutée par les députés au projet de loi organique.
La valeur du point sera calculée à l'aide d'un "nouvel indicateur" de l'Insee sur "l'évolution du revenu moyen d'activité par tête", la gauche critiquant un "amateurisme coupable" en fondant un modèle sur "un indicateur qui n'existe pas" à ce jour. Autre sujet sensible, la prise en compte de la pénibilité de certaines professions, sur laquelle les discussions avec les partenaires sociaux n'ont pas encore abouti.
Âge d'équilibre et système de "bonus-malus"
L'âge légal de départ restera maintenu à 62 ans (ou moins pour certaines professions), mais il faudra "travailler un peu plus longtemps" pour toucher une retraite à taux plein. Un "âge d'équilibre", assorti d'un "mécanisme de bonus-malus" de 5% par an, aura ainsi pour objectif "d'inciter les Français à partir plus tard avec une meilleure pension".
Dans un premier temps, le gouvernement envisageait son entrée en vigueur dès 2022, pour le porter progressivement à 64 ans en 2027. Face à l'opposition des syndicats, cette "mesure de court terme" a été retirée du projet de loi, une "conférence des financeurs" devant proposer d'ici fin avril d'autres moyens "d'atteindre l'équilibre financier".
Certains départs anticipés conservés
Les fonctionnaires exerçant certaines "fonctions régaliennes" (policiers, douaniers, surveillants pénitentiaires, contrôleurs aériens) pourront toujours partir en retraite à 57, voire 52 ans. Idem pour les militaires, qui garderont le droit de toucher une pension après 17 ou 27 années de "services effectifs".
Pour les autres fonctionnaires des "catégories actives" et les salariés des régimes spéciaux, l'âge légal sera progressivement relevé à 62 ans, mais l'extension du "compte pénibilité" et de la retraite pour incapacité permanente déjà en vigueur dans le secteur privé permettra à certains de cesser le travail à 60 ans.
La retraite progressive étendue
La retraite progressive, qui permet de toucher une partie de sa pension en continuant de travailler à temps partiel, sera étendue aux salariés en forfait-jours, aux régimes spéciaux et aux agriculteurs. Les règles du cumul emploi-retraite seront modifiées pour que ceux qui touchent une pension à taux plein puissent engranger des points supplémentaires quand ils reprennent une activité.
Pension minimum
Les futurs retraités "ayant effectué une carrière complète" recevront si nécessaire "des points supplémentaires" afin que leur pension atteigne 1.000 euros net en 2022, puis 83% du Smic net en 2023, 84% en 2024 et 85% en 2025.
Droits familiaux et conjugaux
Chaque enfant donnera droit à "une majoration en points de 5%", attribuée par défaut à la mère mais que les deux parents auront "la possibilité de se partager". Un bonus supplémentaire de 2% sera accordé pour le troisième enfant et réparti à parts égales entre le père et la mère, à moins qu'ils en décident autrement.
La pension de réversion garantira au conjoint survivant, à partir de 55 ans et après au moins deux ans de mariage, "70% des points de retraite acquis par le couple". Ces règles ne s'appliqueront toutefois "qu'à partir de 2037", pour les personnes ayant intégré le système universel. Les droits des conjoints divorcés seront précisés ultérieurement par ordonnance.