À 32 ans, Stéphanie a pu en partie échapper aux hésitations du corps médical grâce à l'expérience de sa sœur, frappée par l'endométriose dès la puberté. Au micro d’Olivier Delacroix, sur Europe 1, elle revient sur son engagement pour faire sortir cette maladie de l'ombre.
À 32 ans, Stéphanie souffre d'endométriose, une maladie gynécologique qui touche entre 10 et 15% des femmes. C'est à cause du calvaire de sa sœur, elle-même atteinte par cette pathologie, qu'elle a pu être rapidement diagnostiquée quand la plupart des patientes doivent souvent faire face à des années d'errance médicale. Au micro d’Olivier Delacroix sur Europe 1, Stéphanie explique comment ce qu'a vécu sa sœur a influencé son propre parcours, mais aussi déterminé son engagement pour une meilleure prise en charge des malades.
"Ma sœur a eu une puberté précoce, dès l'âge de 10 ans. Elle a rapidement connu des cycles abondants et douloureux, l'empêchant parfois de suivre l'école. La première pilule, à 16 ans, a un peu atténué les choses, jusqu'à une reprise des douleurs vers 20 ans, lorsqu'elle l'a arrêtée, avec de fortes douleurs lombaires. J'ai vu ma sœur marcher avec une béquille pendant deux ans. À l'époque, on attribuait ça à une hernie discale qui n'était pas assez importante pour être opérée.
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Les médecins qui la suivaient à l'époque ne faisaient pas de lien entre tous ces symptômes et l'endométriose. Son gynécologue, comme souvent dans le cas des femmes qui en souffrent, lui disait que c'était normal, que c'était dans la tête […]. Progressivement, on ne sait plus quel symptôme est le premier tellement c'est récurrent. Mais ce qui l'inquiétait, c'est qu'elle ne tombait pas enceinte […] et qu'elle avait des kystes ovariens de plus en plus gros. Mais ça n'alertait aucun médecin.
Fin 2015, la jeune femme est hospitalisée d'urgence pour ce qui s'apparente à une crise d'appendicite
Elle est allée jusqu'au bloc opératoire et, sitôt ouverte, elle a été recousue. Le chirurgien a découvert que ce n'était pas du tout l'appendicite. Elle n'a pas encore entendu le mot 'endométriose' à ce moment-là, mais elle a été redirigée vers le CHU le plus proche avec un centre spécifique dédié à l'endométriose. Début 2016, un professeur spécialiste de la maladie a posé pour la première fois un diagnostic, à un stade déjà très avancé. Elle a été opérée dans la foulée, puis a subi à nouveau une opération cette année, avec des atteintes très importantes aux ovaires, sur les trompes et les intestins.
Face au calvaire de sa sœur, Stéphanie n'a pas vu arriver les signes avant-coureurs de la maladie
Au début, je n'avais pas du tout imaginé que je puisse être atteinte. J'ai eu une puberté à un âge normal, et pas de douleur qui m'empêche d'aller à l'école […]. J'ai pris pendant 15 ans la pilule, sans aucun problème. [Il y avait] des douleurs de temps en temps, mais pas plus fortes que pour d'autres femmes… J'imagine. Pour moi, tout se passait bien.
[…] Si j'ai eu la chance d'avoir un diagnostic assez tôt, c'est grâce à ma sœur. Elle a un rôle prépondérant dans tout ça. Mon histoire ne peut pas aller sans la sienne. Elle est la principale personne à avoir insisté pour que je fasse un dépistage - si l'on peut appeler ça comme ça -, quand je lui ai parlé des symptômes qui commençaient à se déclarer. Elle s'est renseignée de son côté auprès des spécialistes qui la suivaient et qui lui ont expliqué que les sœurs des patientes atteintes ont un risque six fois supérieur de développer la maladie. Mes symptômes ont fini par se déclarer suite à un arrêt de pilule. J'ai fait les démarches grâce à elle.
Pour éviter aux malades d'avoir à connaître la même errance médicale que sa sœur, Stéphanie milite au sein de l'association Endofrance
J'ai essayé d'accompagner ma sœur dans ses démarches et sa souffrance. […] Parfois, j'étais assez interloquée des avis qu'elle pouvait avoir de la part du corps médical avant d'être prise en charge […]. On lui a dit des choses tellement étonnantes et aberrantes parfois que ça a vraiment motivé mon engagement. Moi-même, dans mon parcours, quand j'ai voulu savoir si je l'avais ou pas, j'ai dû faire des démarches seules, notamment pour trouver un spécialiste radiologue qui soit capable de voir les lésions d'endométriose. Cet isolement m'a vraiment donné envie de m'engager pour accompagner les femmes qui se posent des questions et qui ne savent pas à qui s'adresser."
Douleurs chroniques et infertilité
La cause de l'endométriose est encore mal connue, ce qui explique en partie la difficulté du corps médical à établir un diagnostic. Cette maladie se caractérise par un épanchement de la muqueuse utérine en dehors de l'utérus, avec pour principal symptôme des règles très douloureuses. "La théorie la plus probable est que, sous l'effet des contractions, qui sont très importantes pendant les règles au niveau de l'utérus, le sang va passer par les trompes, ce que l'on appelle 'le flux rétrograde'", explique au micro d'Europe 1 Benjamin Merlot, gynécologue chirurgien à la clinique Tivoli-Ducos à Bordeaux.
"Le sang va se retrouver en situation pelvienne, c'est-à-dire dans le bas du ventre. Chez les patientes qui développent une endométriose, ces cellules issues des règles vont créer une inflammation majeure, à l'origine des premiers symptômes, principalement des douleurs pendant les règles", poursuit le spécialiste. "Puis, au fur et à mesure du temps, ces cellules s'agrippent aux tissus, développent des adhérences, des kystes et des nodules. Ils vont faire évoluer les symptômes de la patiente vers des douleurs de plus en plus importantes, en dehors des règles et pendant les rapports", indique encore Benjamin Merlot qui a mis en place un hôpital de jour dédié à la prise en charge de l'endométriose.
Les symptômes et l'intensité des douleurs sont très différents d'une patiente à une autre. Surtout, le ressenti n'est pas toujours corrélé à l'ampleur de l'atteinte. L'endométriose a deux conséquences majeures : des douleurs pelviennes chroniques qui peuvent avoir un impact social important et des problèmes d'infertilité.
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