Dimanche dernier, dans l'avion qui le ramenait au Vatican, le pape François a raconté une anecdote rapportée par un père français. Son fils de dix ans aurait exprimé l'envie de devenir une fille. Le souverain pontife s'est emparé de cette histoire pour fustiger une nouvelle fois l'enseignement d'une "théorie du genre" qui serait toujours en cours dans les collèges français. Dans le contexte de cette polémique, des associations de parents baptisées "vigi-gender" refont surface.
Un livret en forme de manuel scolaire. Ces dernières semaines, ces parents d'élèves ont envoyé 20.000 brochures dans les écoles publiques et privées. Il s'agit d'un livret de cinquante pages, disponible sur le site de "Vigi-gender", intitulé "Le genre en images". Sur la première page, on découvre une collection d'images où la frontière entre les sexes paraît floue : la photo d'un homme qui attend un enfant, un livre pour enfant avec une petite fille qui dit "Je veux un zizi", ou encore l'image de la chanteuse transgenre autrichienne Conchita Wurst.
Le Pape a parlé de "libri di scuola" et non des seuls manuels de collège. La #TheorieDuGenre est présente dans manuels SES et SVT et livres pic.twitter.com/s1WxMrKzqo
— VigiGender (@VigiGender) 3 octobre 2016
Les professeurs rejettent en bloc. La suite du livret met en scène des extraits de manuels scolaires de classe de Première, en SVT par exemple, avec les passages où la question de l'identité sexuelle est abordée. Des brochures qui tentent de déconstruire une certaine idée de la théorie du genre. Pour Christophe Chevalier, du syndicat des enseignants de l'Unsa, il s'agit tout simplement de propagande.
"Ces livrets sont des livrets qui disent des contre-vérités notamment sur la théorie du genre. On a reçu ces livrets et on ne savait pas trop quoi en faire. Donc évidemment on ne les distribue pas. Les enseignants ne distribuent pas des brochures qui ne sont pas neutres et ils n'ont pas à faire de prosélytisme pour qui que ce soit."
Pourquoi une telle initiative maintenant ? Les manuels scolaires n'ont pas changé, mais c'est sans doute la perspective électorale qui motive ces collectifs de parents, issus de la Manif pour tous ou de réseaux catholiques intégristes. Implantés dans plusieurs départements, ils organisent des réunions auprès des autres parents d'élèves, demandent à ce que les professeurs diffusent leurs livrets auprès des élèves. Ils espèrent bien peser dans les débats qui concernent la famille.
Puisqu'il paraît difficile de revenir sur le mariage pour tous, ces activistes maintiennent leur position sur l'interdiction de la Procréation Médicalement Assistée (PMA) pour les couples homosexuels ou encore la reconnaissance des enfants nés d'une mère porteuse. Ils ont profité du coup de projecteur du Pape sur leur cheval de bataille pour annoncer l'organisation de leur prochaine manifestation nationale le 16 octobre, soit deux ans après leur dernière mobilisation.
La position du pape viendrait-elle des "vigi-gender" ? Impossible à dire car l'entourage du pape refuse de donner l'identité du père de famille cité par le souverain pontife. On ne sait donc pas s'il est issu de telles mouvances anti-genre. Mais une certaine correspondance pourrait attiser toutes les curiosités. Dimanche, le Pape a déclaré : "À son fils de 10 ans qui rentre de l'école, ce père a demandé : - Toi, que veux-tu faire quand tu seras grand ? - Je serai une fille !"
Une anecdote très ressemblante apparaît dans le livret de "vigi-gender" : "Propos d'un garçon de retour de l'école : 'Quand je serai grand, on me fera une opération. On enlèvera mon zizi, on me fera un trou, et je deviendrai une fille.' Interrogé par ses parents, il a répondu que c'était la maîtresse qui expliquait qu'on pouvait faire ça."