Quelque 91.000 policiers, gendarmes et militaires mobilisés, lieux de culte et rassemblements contrôlés : moins d'une semaine après l'attentat djihadiste de Berlin, la France fêtait Noël sous haute sécurité, les autorités appelant toutefois la population à le célébrer dans la "sérénité". "La menace est forte, notre réponse n'a jamais été aussi forte", a déclaré vendredi le ministre de l'Intérieur Bruno Le Roux.
Une fin d'année sous tensions. Alors que la France est en proie à une menace djihadiste sans précédent depuis les attentats de janvier 2015, et que 17 projets d'attentats ont été déjoués sur le sol national en 2016, les dispositifs de sécurité ont été "à chaque fois" adaptés, a aussi affirmé Bruno Le Roux. Ils le sont d'autant plus après l'attaque contre un marché de Noël berlinois lundi, revendiqué par l'Etat islamique, qui a fait 12 morts et des dizaines de blessés, et dont l'auteur présumé, Anis A., a été tué par la police italienne dans la nuit de jeudi à vendredi en banlieue de Milan.
Des agents armés dans les trains. Le "risque" d'un attentat le jour de la célébration par les chrétiens de la naissance de Jésus - qui aurait une symbolique forte pour les djihadistes - existe, même s'il n'y "pas d'éléments formels" sur une menace spécifique, estime le directeur général de la Police nationale (DGPN) Jean-Marc Falcone, dans un entretien au Journal du Dimanche paru samedi. Outre les 91.000 membres des forces de sécurité déployés samedi et dimanche sur le territoire, des agents de la SNCF armés sont désormais présents dans les trains, a annoncé vendredi le président de la SNCF Guillaume Pepy.
2.400 lieux de culte sous surveillance. Quelque 2.400 lieux de culte seront surveillés samedi soir, a détaillé samedi Bruno Le Roux, qui cherche à "rassurer" les croyants sur leur "sécurité". À Paris, quelques heures avant la messe de minuit, devant la cathédrale Notre-Dame, l'esplanade était ceinturée de barrières métalliques. Des policiers en nombre fouillent les sacs des personnes voulant accéder à l'édifice, demandent d'ouvrir les manteaux.
Fouilles à l'entrée des bâtiments religieux. En haut de la butte Montmartre, à l'entrée de la basilique du Sacré-Cœur, autre monument religieux emblématique de Paris, un gardien inspecte les sacs avec une petite lampe torche. Dans ce lieu très touristique, cinq camionnettes de police stationnent d'un côté et cinq autres en bas de l'édifice. Un jeune couple d'Argentins, en voyage à Paris pour quatre jours, se prend en photo devant la basilique et le panorama. Elsa dit être "moyennement rassurée" par la présence policière, mais elle "n'a pas peur". Dans la cathédrale de Strasbourg, l'office obéira aussi à des mesures sécuritaires strictes : contrôles, fouilles de sac, accès et places limitées.
Une capacité de riposte "quasi immédiate". "Pour les messes de Noël les plus fréquentées, identifiées dans certaines grandes villes, nous aurons non seulement une présence policière, mais une capacité de riposte quasi immédiate", assure le DGPN. Un effort accueilli "bien volontiers" par Monseigneur Dominique Lebrun, archevêque de Rouen, car il permettra de calmer "l'inquiétude" de certains fidèles. Il est toutefois "impossible de protéger toutes les églises", a-t-il remarqué au micro de RTL, citant l'exemple de celle de Saint-Etienne-du-Rouvray, dans laquelle un prêtre avait été assassiné fin juillet par deux djihadistes se réclamant de l'EI.
"Un dispositif sans précédent" à Lille. Le patron de la police nationale explique aussi que des "réévaluations" sécuritaires ont été faites localement. Ainsi à Lille, où 1.250 effectifs sont mobilisés, "un dispositif sans précédent" a été mis en place, selon le préfet. Des blocs de béton d'une tonne ont été posés à des endroits stratégiques du centre-ville ainsi qu'aux abords de l'immense centre commercial Euralille. Les mêmes blocs "anti-véhicules" sont employés à Marseille, en plus de barrières, plots métalliques et d'une forte présence policière et militaire, pour protéger le marché de Noël, situé sur l'emblématique Vieux-Port.
"Vivre librement". "Peur ? Bien sûr que ça fait peur. Mais on fait avec", reconnaît Massimo Esposito, un touriste italien. "C'est la même chose en Angleterre. Ça ne nous change pas vraiment", commente Key Saunders, une Britannique en croisière sur la Méditerranée. Le ministre de l'Intérieur incite les Français à "faire preuve de vigilance et de sérénité". "On peut sortir, faire la fête, aller chez des amis, aller aux offices religieux. J'invite chacun à vivre librement".