Des Parisiens qui agitent des tissus au balcon, applaudissent les policiers qui défilent : la manifestation nocturne de policiers vendredi dans la capitale avait des airs de 11 janvier 2015, quand les Français avaient clamé leur attachement aux forces de l'ordre lors d'une marche contre le terrorisme.
Éclairés par les phares des voitures bloquées par leur avancée à contresens en pleine rue de Rivoli, les brassards orange fluo des policiers ressortent dans la nuit. Plusieurs centaines de fonctionnaires progressent au milieu des voitures pour rallier la place de la Bastille depuis l'Hôtel de ville. Rémy Buisine, un community manager de 25 ans, a capté sur Périscope ces instants dans les rues parisiennes :
La #ManifPolice se poursuit Rue de Rivoli au milieu de la circulation ! pic.twitter.com/QD6hlyAKky
— Remy Buisine (@RemyBuisine) 21 octobre 2016
Cinquième soirée de manif. Pour la cinquième soirée consécutive, ils crient leur "ras-le-bol" et réclament plus de moyens et des peines plus sévères pour les agresseurs de policiers, treize jours après l'agression de quatre des leurs à Viry-Chatilllon, dans l'Essonne. Les klaxons enthousiastes des Français au volant et les sonnettes de vélo se confondent avec les cornes de brume et les sifflets des fonctionnaires qui manifestent en civil.
Il est minuit passé. Les fêtards sortent des bars pour s'agglutiner sur le trottoir, lever leur verre de bière aux policiers et les applaudir. Un "Bravo !" jaillit d'une fenêtre en hauteur. Les manifestants lèvent la tête et applaudissent. Les premières notes de La Marseillaise retentissent depuis une terrasse de café, et ils entonnent l'hymne national.
Les policiers partent en manifestation en direction de l'Hotel de Ville en chantant la Marseillaise ! #ManifPolicepic.twitter.com/Vk59PXrsxD
— Remy Buisine (@RemyBuisine) 21 octobre 2016
Des scènes qui rappellent une autre marche, celle du 11 janvier 2015, quelques jours après la tuerie de Charlie Hebdo et la prise d'otages à l'Hypercacher. Près de quatre millions de Français avaient défilé ce dimanche-là à Paris pour dire non au terrorisme. Le peuple français avait alors crié son attachement aux forces de l'ordre, embrassant, acclamant, faisant des haies d'honneur aux policiers et gendarmes qui sécurisaient la manifestation.
"Citoyens, avec nous !". "Policiers en colère, citoyens solidaires !", scandent vendredi soir ces fonctionnaires de région parisienne, visiblement émus par les démonstrations de soutien et de sympathie. A chaque camionnette de police, chaque gyrophare bleu allumé ou chaque sirène qui retentit, la foule acclame et applaudit. Certains automobilistes baissent leurs vitres ou sortent la tête par le toit ouvrant et les remercient, d'autres font le V de la victoire.
"Gazé en 2013 mais pas rancunier"
— Remy Buisine (@RemyBuisine) 20 octobre 2016
Des citoyens venus soutenir les policiers. #ManifPolicepic.twitter.com/YvjZZEpuj1
Altercation en marge de la manifestation. Seul bémol de la soirée, quand deux jeunes hommes invectivent les manifestants en criant "nique la police". Une dizaine de policiers un peu énervés les entourent. S'en suit une vive et courte altercation, qui prend fin lorsqu'un policier au mégaphone lance à ses collègues : "gardez votre calme, soyez professionnels".
Interpellation d'une personne proférant des menaces sur les policiers "Je brule des policiers". #ManifPolice
— Remy Buisine (@RemyBuisine) 21 octobre 2016
"La population a vu qu'il y avait un dysfonctionnement". "J'ai été surpris de voir que beaucoup de gens nous soutenaient... Je pensais qu'on aurait plus de marques d'hostilité", confie Thomas, gardien de la paix de 25 ans qui ne veut pas donner son vrai nom : "La population a réellement compris ce qui se passait. Elle a vu ce qui dysfonctionnait au niveau du service public". Pour Joséphine, 30 ans dont six comme gardien de la paix à Paris, les Français vivent la même chose que les policiers : "Nous aussi on est désespérés (...) On défend des institutions auxquelles on ne croit plus. On est là pour rallumer la flamme", veut-elle croire.
Arrivés au centre de la place de la Bastille, les "Bleus" restent quelque temps puis se dispersent pour aller boire "un dernier verre". Le poing levé, ils chantent encore La Marseillaise, la dernière pour cette nuit.