L'Académie française a dévoilé le quatrième et dernier tome de la neuvième version de son dictionnaire ce jeudi. La dernière édition en date, la huitième, remontait à 1935, tandis que la première fut achevée en 1694.
La neuvième édition du Dictionnaire de l'Académie française a été solennellement remise au président Emmanuel Macron ce jeudi, consacrant une quarantaine d'années de travail sur cet ouvrage aujourd'hui contesté. Fondée en 1634 pour harmoniser la langue, l'Académie a pour mission d'écrire de A à Z ce dictionnaire qui fait plus ou moins référence. La dernière édition en date, la huitième, remontait à 1935, tandis que la première fut achevée en 1694.
Le président de la République est arrivé dans l'après-midi à l'Académie, où il a prononcé un discours devant les "Immortels", la ministre de la Culture Rachida Dati et des invités, a constaté un journaliste de l'AFP.
"Vous êtes les gardiens de notre langue. Et vous devez l'éclaircir pour ses centaines de millions de locuteurs partout dans le monde", a-t-il affirmé. "Conservateurs, révolutionnaires, vous êtes, permettez-moi de le dire, en même temps l'un et l'autre". Cette neuvième édition compte désormais 59.000 mots.
Des mots modernes et d'autres non
Les nouveaux mots inscrits dans cet ouvrage sont l’air du temps. Le "télétravail", la "télémédecine", la "visioconférence", "vegan", le "vibromasseur", "rancard", "rembobiner", "rocambolesque", "voyoucratie", "super-héros", "sourdingue", "taylorisme", "tartempion" ou "yuppie" ont intégré l'ouvrage. À la lettre W, le "wokisme" est défini comme un "courant de pensée né aux États-Unis dans les années 2000, qui prône l'éveil des consciences aux inégalités structurant les sociétés occidentales".
Dans les dernières pages, le terme "zadiste" s’inscrit dans cet ouvrage pour qualifier "un militant qui, pour empêcher la réalisation d'un projet d'aménagement prévu dans un lieu donné, occupe illégalement ce dernier". Les mots "zonard" et "zouk" ont aussi rejoint la dernière lettre de l'alphabet.
Un dictionnaire contesté
Le Dictionnaire suscite, dans la communauté scientifique, des commentaires très variés, entre ceux qui jugent l'outil obsolète et ceux qui lui trouvent des mérites, à côté de ses rivaux édités par des entreprises privées comme le Larousse et le Robert. "Que les neuf éditions soient disponibles gratuitement sur Internet relève aussi d'un service rendu unique au monde pour la population partageant le français", souligne le linguiste Jean Pruvost, candidat malheureux à l'Académie en 2021 et 2022, interrogé par L'Express .
"Le travail actuel de l'Académie à ce dictionnaire n'a plus de sens, tant sur le plan économique que scientifique. Les académiciens n'ont pas les compétences techniques et scientifiques", d'après le Collectif des linguistes atterrés, dans Libération .
Sur France Inter jeudi matin, une passe d'armes a opposé une membre de ce collectif, Julie Neveux, à un académicien, Antoine Compagnon. L'une déplorait que, dans la définition de "mail", il n'y ait pas de mention du courrier électronique. Le second relevait qu'il y avait un lien vers "Dire, ne pas dire" pour déconseiller cet anglicisme.
Emmanuel Macron a défendu le travail des académiciens, rarement des spécialistes du français. "Ceux qui définissent la langue ne sont pas forcément des linguistes, mais aussi des écrivains. (...) Il est important que ce soit des écrivains qui s'occupent de la langue. Ils en ont le goût, l'usage", d'après lui.