Du choc Brésil-Allemagne (1-7) en demi-finales de la Coupe du monde à l'impossible retour de Floria Gueï en finale du 4x400 m des championnats d'Europe d'athlétisme, le service des sports d'Europe 1 se souvient, souvenirs à vifs et émotions à fleur de peau, des grands moments de l'année sportive 2014.
François CLAUSS, chef du service des sports
La défaite du Brésil face à l’Allemagne en Coupe du monde. Dans la ville des chercheurs d’or, il y a ce matin-là comme une électricité singulière dans l’air. Jour férié, comme à chaque fois que la Seleçao se produit. Dans le centre-ville, ils sont venus en famille, de Rio, de Sao Paulo ou de Porto Alegre, issus des classes moyennes supérieures, prix des places oblige, et arborent tous la tenue auriverde pour une longue procession vers le stade. Mais, au-delà de la ferveur joyeuse des incontournables bandas de samba et des vendeurs ambulants de caïpirinha à chaque carrefour, on ressent sous ce ciel gris d’orage comme une sourde inquiétude prémonitoire.
Depuis le début du tournoi, tout le monde sent l’implacable machine allemande monter en puissance face à ce Brésil qui semble lui au contraire si fragile, porteur de bien trop d’espoirs sur des épaules tant friables. Neymar, blessé en quarts de finale, accompagne ses camarades dans le vestiaire et à l’échauffement, comme s’il était aussi de son devoir, au-delà de sa blessure, de transmettre ce génie et cette énergie de victoire dont il semble être le seul dépositaire. En entrant sur la pelouse, David Luiz, extatique, s’adresse au ciel. L’hymne national entonné par 50.000 voix a capella résonne encore dans la tête. Mais un match ne se joue pas dans le ciel. Un match ne se joue pas avant.
En 20 minutes, c’est histoire d’un aussi impensable qu’historique effondrement. Le Brésil, comme abasourdi, comme paralysé va encaisser 5 buts en une mi-temps, 4 en 6 minutes. Du jamais-vu dans l’histoire du football à ce niveau. Ça ne se reproduira jamais plus. De cette soirée, restent des images inoubliables: les supporters brésiliens quittant le stade avant la fin, impensable au pays du football sacralisé. La fête avortée dans Belo Horizonte, inimaginable au pays de la fête institutionnalisée. Les joueurs brésiliens hagards qui pleurent et prient sur la pelouse, consolés par leurs bourreaux d’un soir. La grande classe de la Nationalmannschaft qui attendra que le stade se vide de ses supporters brésiliens pour aller communier avec son public.
Cette nuit-là, ceux qui ne pleurent pas parlent jusqu’au bout de la nuit… comme s’il fallait exorciser l’humiliation. Débutent sur les plateaux de télévision d’interminables talkshows en forme de psychanalyse collective. En 24 heures, « le jaune Brésil » qui enflammait les artères de toutes les villes du pays, disparaît des fenêtres, des voitures et des devantures de cafés. Ce soir-là, ceux qui ont rêvé avec le Brésil de Pelé sont revenus sur terre : la terre du football moderne, efficace et standardisé proposé par le magnifique modèle allemand. Oui, ce soir-là, à Belo Horizonte, c’était bien plus qu’un match de foot.
Christophe LAMARRE
La victoire de la France sur l’Espagne en Coupe du monde de basket. L'Espagne des frères Gasol et de Serge Ibaka (entre autres) se présente en grandissime favorite de sn quart de finale face à des Français affaiblis par les absences de Tony Parker, Alexis Ajinça et Joakim Noah entre autre. Ce sera l'une des victoires les plus retentissantes du basket français.
Les Français terrassent les Espagnols au terme d'un match hallucinant de maîtrise tactique et collective. Le sélectionneur Vincent Collet est le maître tacticien de ce chef-d’œuvre stratégique qui stupéfait les Espagnols. Agressée par la pression défensive des Bleus, privée d'adresse, la Roja finit par s'effondrer chez elle, devant un public médusé. Pau Gasol quitte ce mondial abasourdi, sonné et asphyxié par la défense Française. Il quitte la scène internationale sur la pointe des pieds. D'un pas aussi lourd que lent, il prend le chemin du couloir qui mène aux vestiaires. Il ralentit puis s'arrête net. Il sait que les Français ne sont pas loin, derrière lui, alors il fait demi-tour et s'en va saluer Vincent Collet d'un "bravo, bien joué". Les Français avaient été accueillis par les insultes des spectateurs, ils repartent avec les honneurs. Après la rencontre, les applaudissement et les pouces levés remplacent les doigts et les bras d'honneur exécutés trois heures auparavant…
Rémi BOSTSARRON
L’étapes des pavés sur le Tour de France. Christopher Froome, le poignet endolori par sa chute de la veille, qui tombe encore, et encore, et se réfugie dans la voiture de son directeur sportif. Nibali, déjà en jaune, qui semble voler sur les pavés, intouchable, alors qu’il n’a jamais couru Paris-Roubaix. Contador, Peraud, Pinot, qui s’accrochent à leur vélo pour tenter de limiter la casse. Lars Boom qui lève les bras, épuisé, euphorique, méconnaissable, le visage et le maillot maculé de boue. C’est ça, le mariage pluvieux et dantesque du Tour et des pavés.
Cyrille de la MORINERIE
La finale de snowboardcross aux Jeux olympiques de Sotchi. J’étais à Sotchi pour couvrir les JO. Le 18 février à 8h50, je prends l’antenne pour la finale de snowboardcross en plein milieu de la chronique de Nicolas Canteloup. Comment garder son sérieux alors que j’entends dans mon micro-casque les blagues potaches de notre imitateur maison et les fous rires qui l’accompagnent ? La course commence et me voici en train de commenter avec comme consultants d’un jour… Dominique Strauss-Khan ou Nicolas Sarkozy ! La course est très serrée et lorsque Pierre Vaultier franchit la ligne d’arrivée, je crie : « champiooonnn olympiiiiiiiquue !!! » En plus, l’histoire est belle…Pierre Vaultier avait été gravement blessé au genou deux mois plus tôt.
Nicolas ROUYER
La victoire de la Suisse et de Federer en finale de la Coupe Davis. On m'a souvent demandé si j'"étais" plutôt Nadal ou Federer. J'ai toujours répondu que j'aimais le tennis. Et que donc, forcément, j'"étais" Federer. Car le Suisse ne joue pas au tennis. Il EST le tennis. Et le voir évoluer trois jours de suite sur la terre battue lilloise, en finale de la Coupe Davis, en clôture de l'année tennistique, a été un ravissement. Arrivé touché au dos, il a mis une journée pour dérouiller. La deuxième, il a gagné. La troisième, il a régalé. Ce jour-là, Richard Gasquet, le "Mozart du tennis", a appris une nouvelle partition. Federer a le talent des virtuoses : chacun de ses gestes semble si naturel que l'on oublie le travail de répétition qu'il y a derrière. Dans quelques années, ceux qui ont vu Federer jouer - et ceux qui l'ont vu gagner la Coupe Davis à Lille -, mesureront leur chance d'avoir vu évoluer le plus grand et surtout le plus beau tennisman de tous les temps.
Julien FROMENT
Le record du monde de Renaud Lavillenie. Il y a des records qui sont plus marquants que d'autres. Qui plus est quand il s'agit d'un Français, dans un domaine, l'athlétisme, où les Tricolores sont - encore - trop rares à effacer les meilleures marques mondiales. Ce record du monde de Renaud Lavillenie, on le sentait. Seul au monde depuis sa médaille d'or olympique à Londres en 2012, Lavillenie devait effacer des tablettes le vénérable Sergueï Bubka. C’était la suite logique. Et Lavillenie, garçon à l'ambition débordante, a su choisir son moment pour réaliser cet exploit. C'est-à-dire à Donetsk, chez "l'Ours" ukrainien Bubka lui-même. Assurément le plus grand exploit et la plus belle émotion sportive de l'année.
Julien RICOTTA
Les hymnes sud-américains à la Coupe du monde. Le spectacle débutait avant même la rencontre, cet été, à la Coupe du Monde, avec les hymnes nationaux des équipes d'Amérique du Sud. Quand le disque s'interrompait, les supporters du Brésil, de la Colombie, et du Chili continuaient de chanter, a capella. Un vacarme assourdissant descendait alors des tribunes : le stade tremblait, les joueurs étaient au bord des larmes. Et que dire de la ferveur des "hinchas" de l'Argentine, battus en finale… Des instants magiques.
Alban LEPOIVRE
Deux Français sur le podium du Tour de France. Depuis 1997, la France attendait un Tricolore sur le podium. Ca valait (presque) le coup d’attendre. En 2014, ils sont deux à être montés sur la "boîte" : Jean-Christophe Peraud 2e et Thibaut Pinot 3e. Quatorze ans séparent ces deux champions à la trajectoire si différente. Peraud, vice-champion olympique de VTT presque anonyme derrière Julien Absalo à Pékin, venu tard sur la route. Pinot le surdoué, révélé sur la route du Tour en remportant une étape à 22 ans. Tout les sépare. Mais ces deux coureurs ont pourtant réussi à réconcilier le grand public avec le cyclisme francais et le grand rendez-vous sportif de Juillet. Peut-être de bon augure pour 2015...
Marie GUIDAT
Le titre de champion de France de Toulon en Top 14. Samedi 31 Mai 2014, 21 heures, après 22 ans d’attente et deux finales consécutives perdues contre Toulouse et Castres, le RCT décroche enfin le Bouclier de Brennus tant attendu pour son fantasque président Mourad Boudjellal (victoire 18-10 face au CO). Au-delà du résultat, ce match a également marqué la fin de carrière du grand Jonny Wilkinson, auteur de 15 des 18 points de son équipe. Pas spécialement supportrice de Toulon, le déroulement du match, l’émotion de la dernière de Wilkinson et l’entrain de notre duo de commentateurs Simon Ruben et Eric Blanc au coup de sifflet final, a fait de ce grand moment de sport une belle émotion de radio.
Simon RUBEN
La médaille d’or du relais féminin 4x400 m aux championnats d’Europe. Un relais en athlétisme est beau. Accumulant au fil des foulées les tensions des quatuors en action. Culminant parfois dans l'égarement tragique du témoin. Le 17 août, ce fut tout le contraire pour le relais français. Floria Gueï démarre le dernier tour en quatrième position. Loin du podium. Sur 400 m, se déroule alors une course magique. Âmes, cœurs et corps s'emballent. Et l'humain qui regarde devient celui qui court dans une communauté d'effort qui transcende. L'espace et le temps en fusion, la Française revient sur le groupe de tête. Et Gueï déchire la ligne d'arrivée avec une étincelle d'avance. Un relais en athlétisme est beau. Et celui-ci, sans doute un peu plus que tous les autres.
Corinne BOULLOUD
Impossible de n'avoir qu'un seul coup cœur. Donc j'en ai choisi plusieurs. Je me suis "limitée à quatre". Le coup de cœur de la "performance absolue" au perchiste Renaud Lavillenie : comment oublier ses 6,16 m sous les yeux de Sergueï Bubka, à Donetsk, en février, avant un 3ème titre consécutif européen cet été ! Un coup de cœur "carnivore" au nageur Florent Manaudou : 10 médailles rien que pour cette année, 4 en or aux championnats d’Europe en grand bassin puis 6 dont 3 en or aux récents Mondiaux en petit bassin ! Il poursuit brillamment la saga Manaudou, dix ans après les premières médailles de Laure aux JO d’Athènes. Un coup de cœur de "légende" pour Roger Federer : il fait mal à l’équipe de France mais apporte à la Suisse son premier Saladier d’Argent. La Coupe Davis est enfin propriété de Federer et pendant ce temps, en France, ça se chamaille. Les lendemains de défaite sont toujours indigestes ! Et le "grand" coup de cœur pour le navigateur Loïck Peyron, vainqueur de la Route du Rhum à sa 7ème tentative. Il complète un palmarès déjà riche de nombreuses victoires en courses au large et en plus, c’est vraiment "un mec" bien !