Les abonnés de Canal+ qui ont suivi le huitième de finale de Ligue des champions entre l'Atlético de Madrid et le PSV Eindhoven (0-0, 0-0 a.p., 8-7 aux tirs au but) ont eu bien du courage. Car on ne peut pas dire que les "Colchoneros", comme on surnomme les joueurs du deuxième grand club de Madrid, aient pratiqué à cette occasion un "football total", comme on le nommait du temps de Johan Cruyff. Et voilà que se profile le Barça de la "MSN" Messi-Suarez-Neymar en quarts de finale. Le raccourci est vite fait : on va assister mardi 5, pour l'aller, et le mercredi 13, pour le retour, à une opposition de style entre l'attaque et la défense, le spectacle et l'ennui, presque entre le Bien et le Mal. Le Barça et l'Atlético, nouveaux rivaux, sont-ils si différents ?
Il y a un élément concret, sur lequel on peut s'appuyer pour comparer ces deux équipes : les chiffres. Depuis le début de la saison de Liga, le Barça a inscrit la bagatelle de 87 buts. L'Atlético, lui, n'en a marqué que 51, soit 36 de moins. Mais il n'en a encaissé que 15, soit 11 de moins que le Barça. Sur le papier, c'est un vrai choc attaque-défense qui s'annonce entre les deux premiers du championnat d'Espagne (le Barça compte six points d'avance à sept journées de la fin).
Deux styles opposés. Depuis la saison 2013-14 où l'Atlético avait éliminé le Barça en quarts de finale de la Ligue des champions avant de lui ravir le titre, cette affiche est devenue un "second clasico", comme l'a concédé dans un récent éditorial Alfredo Relaño, directeur du quotidien sportif madrilène As. "Il y a la rivalité Madrid-Barcelone, il y a un haut niveau compétitif, il y a deux styles de jeu face à face. Bref, l'émotion est là." Deux styles de jeu. Difficile à nier. D'un côté, il y a le clinquant catalan, son jeu offensif spectaculaire et sa ligne d'attaque de rêve "MSN". De l'autre, il y a la rigueur madrilène, le collectif bien huilé et une défense de fer incarnée par l'Uruguayen Diego Godin.
Les rencontres entre les deux équipes ont souvent été très âpres, très disputées, et les "Blaugrana" n'ont pas été les derniers à se jeter dans la bataille. Car même s'il fait jouer son équipe de belle manière, Luis Enrique le joueur était connu surtout pour son tempérament de feu. Dans ce domaine, son vis-à-vis Diego Simeone reste une référence. Il est fort probable qu'on assiste d'ailleurs mardi soir au Camp Nou à une rencontre d'une folle intensité.
Attention aux raccourcis. Interrogé sur l'Atlético de Madrid, lundi, en conférence de presse, le défenseur du Barça Gérard Piqué a reconnu : "Cette équipe est devenue la deuxième d'Espagne, comme le prouve le classement du Championnat. Ce sera plus difficile que samedi (face au Real Madrid). C'est une équipe qui te complique davantage les choses parce qu'elle se replie bien derrière, elle sort en contre et elle a en outre des variantes, comme contre le Betis Séville l'autre jour". Piqué a tout compris. Si l'Atlético se repose avant tout sur sa défense, il est aussi capable de s'adapter. Et, samedi dernier, c'est l'Atlético qui a signé un score "barcelonesque" face au Bétis Séville (5-1) quand les Catalans, eux, étaient battus par le Real (2-1).
Résumer l'Atlético à sa seule dimension défensive et physique est donc réducteur. Ce serait oublier que les "Matelassiers" (traduction de "Colchoneros") comptent dans leurs rangs de superbes manieurs de ballon, comme son capitaine Gabi ou Koke. Et puis il y a "notre" Antoine Griezmann, que Simeone n'hésite pas à comparer à "son" Ronaldo. "C'est la même dépendance que pour le Barça avec Neymar, Messi, Suarez, la même que pour le Real avec (Cristiano) Ronaldo", a même résumé le technicien argentin. Lors de ce quart de finale Barça-Atlético, la roublardise ne sera pas d'un seul côté. Le talent non plus.