Et si l'équipe suisse s'était faite hara-kiri ? La demi-finale du Masters 100% helvétique entre Roger Federer et Stan Wawrinka, qui a approché les 3 heures (2h48), samedi soir, a laissé des traces : psychologiques pour Wawrinka, qui a eu quatre balles de match avant de s'incliner au jeu décisif du troisième set, et physiques pour Federer, contraint de déclarer forfait à quelques minutes de sa finale face à Novak Djokovic, dimanche, en raison d'une douleur au dos. "J'ai tout essayé depuis hier (samedi), les anti-douleurs, le repos, jusqu'au dernier moment, mais je ne peux pas m'aligner", a expliqué Federer, qui s'est présenté lui-même sur le court après la finale du double. "Je ne peux pas jouer, c'est trop risqué à mon âge."
Federer s'explique au micro de l'ATP (en anglais) :
Quelques minutes plus tard, Federer, relativement décontracté, a expliqué devant les caméras de l'ATP : "je me suis bien senti toute cette semaine jusqu'à ce jeu décisif, hier (samedi). J'ai senti que mon dos me jouait des tours. J'ai tout essayé dès la nuit dernière, les traitements, les médicaments, pour guérir le plus vite possible mais je n'ai pas senti d'amélioration aujourd'hui (dimanche). Je n'avais pas de journée off pour récupérer. Je n'avais pas assez de temps pour me remettre et je ne pouvais pas espérer jouer. Peut-être que dans quelques jours, ce sera mieux mais aujourd'hui, ce n'était pas assez. (...) Quoi que ce soit, peut-être des spasmes dans le dos, ce n'est jamais agréable. Je reste positif et j'espère que ça va disparaître très vite. Mon objectif, maintenant, est de me remettre de cette blessure le plus vite possible, de me rendre en France puis de me préparer sur terre battue en vue de la finale de la Coupe Davis."
"Un secret bien gardé." Quelle est l'étendue de la blessure du n°2 mondial ? Difficile de le savoir avec précision. "Personne ne sait exactement ce qu'il a", considère l'ancien capitaine de l'équipe suisse, Marc Rosset. "Je pense qu'il y a lui, "Seve" Luthi (capitaine de l'équipe suisse, ndlr), son entourage, le médecin de l'équipe suisse, qui sont au courant. C'est un secret qui va être bien gardé, donc il est difficile d'émettre la moindre opinion par rapport à sa blessure." Pour le journaliste de la télévision suisse RTS Hervé Borsier, il est inenvisageable que Federer ait fait une croix sur une finale de Masters pour une blessure bénigne : "quand on connaît Roger Federer, son respect du circuit, du tennis, du public, même par rapport au Masters, un tournoi qu'il a souvent gagné (six fois, ndlr), on sait qu'il ne s'est pas aligné aujourd'hui parce qu'il ne pouvait pas donner son maximum, qu'il ne pouvait pas espérer battre Novak Djokovic. On peut penser qu'il cherche à se préserver par rapport à la Coupe Davis parce que c'est l'un des seuls trophées qu'il n'a pas remportés mais je ne pense pas une seconde que Roger Federer puisse tricher sur son état de santé." Vainqueur à six reprises du Masters, Federer, âgé de 33 ans, n'a encore jamais remporté la Coupe Davis, dernier grand titre qui manque encore à son palmarès avec la médaille d'or olympique en simples.
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"Un point d'interrogation." De son côté, Djokovic, vainqueur de son quatrième Masters - son troisième de rang -, a expliqué après la remise du trophée : "je ne pense pas qu'il ait cherché à s'économiser, à se préserver avant la Coupe Davis. Après une finale de Grand Chelem, celle du Masters est le match le plus important de la saison. Il n'a déclaré forfait que trois fois en plus de 1.000 matches, il n'y a rien à lui reprocher." Ce n'est en effet que la troisième fois que le Suisse, qui n'a jamais abandonné, déclare forfait avant une rencontre. Ce n'est évidemment pas un chiffre anodin. "J'ai parlé avec lui ensuite", a confié Djokovic. "Pour la Coupe Davis, lui-même ne sait pas. Il y a un point d'interrogation."
L'autre motif d'inquiétude pour le clan suisse réside sur le lieu de la blessure : le dos, qui a déjà fait souffrir Federer par le passé. "C'est quand même ce qui l'a tenu à l'écart en 2013 où il servait très mal à cause de ça", relève Patric Hagelauer, ancien directeur technique national (DTN) du tennis français. "Il avait chuté au classement, son niveau n'était plus du tout le même. Entre un Federer qui sert très bien et un Federer qui sert moyennement, ce n'est pas du tout la même histoire. Il va falloir qu'il s'habitue à la terre battue, donc il va falloir qu'il y passe du temps. (...) A partir du moment où on ne peut plus bouger le dos correctement, on est vraiment affaibli. Il suffit de peu de choses pour que la technique se dérègle, même si on s'appelle Federer. C'est inquiétant pour les Suisses."
"Il avait du mal à marcher correctement." Mais le témoignage le plus fort reste celui de Fabrice Santoro, qui était à Londres. "Il n'a pas déclaré forfait pour se ménager mais parce qu'il était dans l'incapacité de jouer un match de tennis", a insisté l'ancien vainqueur de la Coupe Davis. "Il fallait le voir arriver au stade ce matin, il avait même du mal à marcher correctement. Aujourd'hui, combien de temps lui faudra-t-il pour récupérer ? Personne ne le sait, ni lui ni son staff. Je suis inquiet pour lui, pour le public de Lille en général. Que les gens soient pro-France ou pro-Suisse, tout le monde veut voir jouer Roger Federer. Une finale sans sa présence serait un coup dur." Le feuilleton de la semaine a commencé...