LÉGENDE - Le speaker historique de la Grande Boucle va arrêter de commenter les étapes après 40 ans de bons et loyaux services.
Daniel Mangeas est plus qu'une voix, c'est une légende. Depuis 40 ans, le speaker officiel du Tour de France berce les passionnés de cyclisme. Mais cette année, les fans de vélo auront forcément un petit pincement au cœur. Car à la fin de cette édition, Daniel Mangeas fera ses adieux au Tour de France. La raison ? "J'ai envie de commenter des évènements plus détendus, de plus petites courses. Le Tour, c'est une grosse pression. A un moment, il faut savoir s'arrêter", explique-t-il au micro d'Europe 1. Après avoir commenté 41 Grandes Boucles, "la voix du Tour" a accumulé une connaissance phénoménale du cyclisme, son sport, sa passion. Europe 1 a rencontré cette encyclopédie vivante du Tour de France qui a commenté 870 étapes depuis ses débuts en 1974.
Le dernier kilomètre du Tour de France 2011 avec les commentaires de Daniel Mangeas :
Mieux que Wikipédia. Prenez un nom au hasard. Vous ne connaissez peut-être pas Kévin Réza, le cycliste français de l'équipe Europcar. Pour Daniel Mangeas, c'est un jeu d'enfant : "il avait gagné 3 étapes du Tour de la Martinique. On rappellera que l'an dernier, sur les routes du Tour de France, il avait réalisé de bons résultats, terminant notamment 5e à Saint-Malo. Il était également dans le top 10 lors de l'arrivée sur les Champs-Elysées." Poursuivons l'expérience avec le coureur britannique Stephen Cummings : "alors lui, il est venu de la piste. Il a été champion du monde de poursuite par équipes, vice-champion olympique. On rappellera qu'il a fini cette année 2e du Tour de Dubaï et il a gagné le Tour Méditerranéen." Vous pouvez vérifier, tout est vrai.
Les débuts en 1974. Il faut dire qu'en 41 ans au poste de commentateur officiel du Tour de France, Daniel Mangeas a côtoyé tout ce qui fait le cyclisme professionnel. L'histoire a commencé en 1974. Agé de 25 ans, il est l'assistant de Pierre Schori, alors speaker officiel de l'épreuve. Daniel Mangeas doit le remplacer au pied levé : "c'était à Saint-Lary-Soulan, lors de la 16e étape. Pierre Schori avait cassé sa courroie de ventilation, donc je suis allé commenter l'arrivée." Et il se rappelle de ce jour comme si c'était hier : "Raymond Poulidor a gagné cette étape ce jour-là. Il avait battu Merckx, Lopez Carril, Ocana, et tous les favoris du Tour de France. C'était une journée historique, Poulidor avait 38 ans quand il a gagné ce jour-là !".
Le dernier des Mohicans. Raymond Poulidor, justement, revenons-y. L'éternel second est l'un des derniers rescapés de cette édition 1974 encore présent sur le Tour de France. Daniel Mangeas raconte avec émotion : "nous avons fait un rapide décompte. De cette édition, il reste Raymond (Poulidor), mais aussi Jean-Pierre Danguillaume, qui est à l'inter-étape, où il accueille les invités. On doit être pas plus de trois ou quatre, 40 ans après." Après toutes ces années, l'amour du cyclisme de ce dernier des Mohicans ne s'est pas étiolé, loin de là : "on a toujours la même jeunesse et la même passion depuis cette date !". Ce qui lui fait dire : "si ma vie était à refaire, je choisirais le même destin".
Des joies et des larmes. Tout au long de son parcours sur les routes du Tour, Daniel Mangeas a tissé des liens privilégiés avec les coureurs cyclistes. Des moments de complicité, des rires, mais aussi des larmes. Dans le journal L'Equipe, il se souvient du jour le plus triste qu'il a vécu sur la Grande Boucle. C'était le 18 juillet 1995, quand l'Italien Fabio Casartelli est mort après une chute dans la descente du col de Portet-d'Aspet, dans les Pyrénées : "Le matin, il était venu seul à la signature (avant le départ, tous les coureurs signent une feuille de présence, ndlr), il était jeune et je l'avais présenté comme un futur grand. Quelques heures plus tard, il n'était plus de ce monde. Jamais la fragilité de l'existence ne m'était apparue aussi forte que ce jour-là." Oui, Daniel Mangeas aura tout vécu sur le Tour de France. Une vie tout entière au service de sa passion.