Son vœu de silence aura duré huit longs mois. Dans une interview à L’Express, Raymond Domenech sort enfin de son mutisme, à peine brisé dans l’intervalle par quelques phrases lâchées ici ou là, et par une publicité toute en ironie pour un site de poker en ligne. "Tout le monde parle à ma place. J'ai envie de rétablir ma vérité. Je ne suis pas l'abruti que l'on décrit", explique en préambule Raymond Domenech.
"Une bande de sales gosses inconscients"
Mais c’est sur la grève des joueurs et sur le "bus de la honte" que l’entraîneur le plus détesté de France était le plus attendu. Raymond Domenech justifie ainsi sa décision de lire lui-même le communiqué des joueurs. "Ça faisait plus d'une heure qu'on était là. Il fallait bien que quelqu'un prenne ses responsabilités et arrête cette mascarade", s’agace le Lyonnais de naissance. "Toutes les caméras étaient braquées sur le bus, des centaines de gamins attendaient sur le bord du terrain. On était la risée du monde. J'ai dit: 'On arrête, je n'en peux plus !" Personne ne voulait lire ce machin! J'y suis allé. Si j'avais réfléchi deux secondes, je serais parti..."
Contrairement à la Fédération française de football (FFF), qui a suspendu cinq joueurs de 1 à 18 matches, Raymond Domenech se montre en revanche incapable d’identifier d’éventuels meneurs. "S'il y en a, je ne les ai pas vus. A chaque fois que je remontais [dans le bus], il n'y avait plus personne...", assure-t-il. "A ce moment-là, je me dis qu'ils sont devenus fous et qu'ils ne se rendent pas compte. Aujourd'hui, je sais que j'avais tort : ils savaient très bien ce qu'ils faisaient. Ils ont même fermé les rideaux du bus pour se cacher des caméras. [...] Avec le recul, je les vois surtout comme une bande de sales gosses inconscients."
"Je n'accepte pas la critique des politiques"
L’ancien sélectionneur, qui allait en Afrique du Sud confiant - "je pensais que nous serions champions" -, assume également sa part de responsabilité dans la piteuse élimination de son équipe dès la phase de poules du Mondial. "Soyons clairs : je me suis planté, je n'ai pas dû choisir les bons joueurs ni trouver les mots qu'il fallait", concède-t-il, sans oublier d’écorner ses détracteurs de l’époque. "Moi, je ne me suis jamais occupé de vaccins", ironise-t-il à l'évocation de Roselyne Bachelot. "Quand, je ne suis pas compétent, je me tais." Les joueurs auraient pleuré lors de l'allocution de la ministre des Sports ? "De rire, peut-être", s'interroge un Raymond Domenech sarcastique.
Interrogé sur les critiques émises à son encontre par les anciens internationaux devenus consultants (Bixente Lizarazu, Christophe Dugarry, Frank Leboeuf) , Raymond Domenech a la dent dure. "Si ces gens-là veulent parler de morale et donner des leçons, c'est bon, il n'y a plus de souci à se faire !", sourit-il, avant de conclure : "je n'accepte pas la critique des politiques, ni celle des anciens joueurs reconvertis dans le journalisme, mais cela ne m'empêche pas de tirer mon propre bilan."
Enfin, Raymond Domenech, sans emploi fixe depuis son licenciement pas la FFF, évoque son avenir. "Mon problème, c'est que je voudrais tout faire. Même la campagne électorale !", explique l'ancien sélectionneur. "Je n'ai surtout aucune envie de polémiques. On m'a fait des propositions pour le théâtre, pour le cinéma... Rien à la télévision, non. Sincèrement, comment peut-on m'imaginer dans une émission de téléréalité?", rétorque-t-il à la rumeur qui le voit bientôt dans Club VIP, la future émission de TF1. Et dans le foot ? "J'ai encore besoin de balayer certains souvenirs avant de pouvoir démarrer une nouvelle aventure. C'est comme en amour: il faut avoir oublié une femme pour pouvoir en aimer une autre", répond-il, dans le plus pur style Domenech.