Dire que Philippe Bergeroo se sent comme chez lui au centre d’entraînement des équipes de France à Clairefontaine, dans la forêt de Rambouillet, est un euphémisme. L’ancien gardien champion d’Europe 1984 est rattaché au giron fédéral depuis 1990. Lors de ces deux décennies, il a connu quasiment toutes les sélections, de l’équipe de France A aux sélections de jeunes.
Filles/garçons, pas de différences. Et si coacher des filles est une expérience nouvelle dans sa riche carrière, Philippe Bergeroo écarte d’un revers de main tous les clichés. "On me dit souvent, entraîneur des filles, entraîneur des garçons, ce n’est pas pareil. Et bien, si, c’est la même chose. Je ne fais aucune différence entre garçons et filles", martèle-t-il au micro Europe 1."Ce n’est pas la grande inconnue. Moi, je suis avant tout entraîneur." Les débuts semblent prometteurs dans le jeu. Philippe Bergeroo a troqué le 4-2-3-1 de Bruno Bini pour un 4-4-2 plus offensif. Et cela marche avec deux victoires en deux matches, contre la République Tchèque (2-0) et le Kazakhstan (4-0), en attendant la Pologne, vendredi soir.
Cette philosophie de jeu plaît également aux joueuses, et notamment aux cadres. La milieu de terrain de Juvisy, Gaëtane Thiney (photo), 94 sélections en Bleues et proche de l’ancien sélectionneur Bruno Bini, abonde en ce sens : "c’est un chambreur, il est marrant. Mais il sait ce qu’il veut sur le terrain, il est très rigoureux. C’est un homme différent (de Bruno Bini), le discours est dit de manière différente et ça se passe très bien." Alors que certains observateurs attendaient que la transition post-Bini se fasse avec pertes et fracas, il n’en fut rien.
Le changement dans la continuité. La seule différence notable, c’est le discours et les termes employés. Bergeroo semble avoir écarté volontairement de son vocabulaire le "projet de vie" tant vanté par Bini durant ses sept années de mandat. Ici, il est question "d’orientation du travail". le technicien aquitain s’appuie quasiment sur le même groupe que son prédécesseur avec une majorité de joueuses de l’OL (9) et du PSG (7). La raison ? "J’ai appris une chose dans le métier. Quand vous arrivez, il ne faut pas tout changer", rappelle-t-il. "Il faut le faire petit à petit, par dose homéopathique".
Conscient et reconnaissant de ce qui a été entrepris avant lui, Bergeroo estime qu’il a "un devoir d’assumer le présent", mais aussi "un devoir d’assumer l’avenir." Et l’avenir passe par des jeunes joueuses prometteuses. Il n’a donc pas hésité à appeler la défenseure Griedge Mbock et la milieu de terrain Sandie Toletti, championnes du monde des moins de 17 ans l’été dernier.
Objectif podium en 2015. Pour se différencier de son prédécesseur, Bergeroo devra réussir là où Bini a échoué : réussir un podium lors d’une grande compétition internationale. Mais il ne veut pas griller les étapes. "On a mis des objectifs intermédiaires, car la Coupe du monde 2015, c’est encore très loin. On est sur un projet de quatre matches, après on fera un bilan." Et quand on lui parle de titre européen, mondial ou olympique, il concède ne pas "refuser le challenge", mais rappelle aussi que, pour le moment, les Etats-Unis, l’Allemagne ou encore le Japon sont devant les Bleues. "Il va falloir s’accrocher, mais si on arrivait à faire une médaille, ça sera une belle reconnaissance pour les filles," conclut-il. Ce serait également une belle récompense aussi pour un football français féminin qui ne cesse de s’améliorer.