L'info. La France a eu Jérôme Cahuzac, l'Allemagne a Uli Hoeness. La presse a révélé ce week-end que le président du conseil de surveillance du Bayern Munich, personnalité d'envergure en Allemagne, s'était dénoncé au fisc allemand en janvier dernier après avoir "négligé" de soumettre à l'impôt au moins 10 millions d'euros d'intérêts liés à des avoirs en Suisse. Dans un entretien à paraître mercredi dans le quotidien Bild, celui qui est également à la tête d'une grande entreprise de saucisses, reconnaît avoir commis une "faute grave". "Je veux faire table rase du passé. C'est ce que permet la loi", a-t-il insisté. L'affaire fait d'autant plus de bruit que le dirigeant bavarois passait jusqu'ici pour un "Allemand exemplaire, un modèle pour le pays tout entier", selon l'hebdomadaire Der Spiegel. Lequel posait même récemment la question : "la République peut-elle apprendre d'Uli Hoeness ?"
Le contexte sportif. Cette affaire a éclaté à quelques jours seulement de la demi-finale aller de Ligue des champions entre le Bayern et le Barça. Lundi, lors de la traditionnelle conférence de presse d'avant-match, le club bavarois a obtenu qu'aucune question ne soit posée sur le sujet... Avec Franz Beckenbauer et Karl-Heinz Rumenigge, Hoeness, 61 ans, incarne le Bayern Munich. Il en a été le joueur de 1970 à 1978 puis le manager pendant 30 ans avant d'en devenir le président du conseil de surveillance. Difficile de croire que cette "affaire Hoeness" n'a pas perturbé un tant soit peu la préparation de la rencontre, dont le coup d'envoi sera donné mardi à 20h45 à l'Allianz Arena.
Le contexte politique. Une chose est certaine : cette l'affaire s'est invitée dans le jeu politique. Retoqué en fin d'année dernière en raison de l'opposition de l'alliance SPD-Verts, l'accord de double imposition germano-suisse, qui prévoyait notamment l'anonymat des contrevenants, "aurait été la bonne solution", selon le gouvernement conservateur d'Angela Merkel, qui s'est dite "déçue" par le comportement d'Hoeness. De son côté, Jürgen Trittin, la figure de proue des Verts, a tiré de l'affaire une conclusion inverse : "heureusement que le SPD et les Verts ont empêché cet accord de "blanchiment d'argent" avec la Suisse". Selon certaines estimations, les dépôts des Allemands auprès des banques helvètes avoisinent les 200 milliards d'euros.
Le prêt. Le quotidien allemand Süddeutsche Zeitung a annoncé mardi que l'ancien patron d'Adidas, Robert Louis-Dreyfus, qui fut également propriétaire de l'Olympique de Marseille, avait prêté 2,5 millions d'euros à Hoeness sur un compte en Suisse. En 2000, Louis-Dreyfus a versé 5 millions de deutsche marks (2,5 millions d'euros) sur un compte à la banque suisse Vontobel et lui a apporté une garantie bancaire de 15 millions de deutsche marks (7,5 millions d'euros). Ces sommes auraient notamment servi à des spéculations en bourse. L'ancien manager du Bayern Munich aurait remboursé son ami un ou deux ans plus tard, selon le quotidien. Le versement de cet argent est intervenu alors que le club le plus titré d'Allemagne et Adidas négociaient une prise de participation de l'équipementier sportif allemand dans le Bayern. En septembre 2001, Hoeness avait annoncé l'arrivée à hauteur de 10% d'Adidas au capital du club bavarois pour 75 millions d'euros...