Imaginez Sedan ou Tours opposé au FC Barcelone en huitièmes de finale de la Ligue des champions. Cela vous paraît improbable. Et pourtant... L'Apoel Nicosie, qui a décroché mercredi son billet pour la deuxième phase de la compétition, a un budget équivalent à ces deux clubs de Ligue 2. Pendant que l'OM échouait face à l'Olympiakos dans sa quête du point nécessaire à sa qualification, le club chypriote, lui, le décrochait dans le froid et sur la pelouse du Zénith Saint-Pétersbourg, l'un des nouveaux riches de la scène européenne, propriété de Gazprom et vainqueur de la Coupe UEFA en 2008. Anecdote amusante, c'est la première fois qu'un club issu d'une île autre que la Grande-Bretagne atteint les huitièmes de finale de la Ligue des champions.
L'Anorthosis Famagouste, le pionnier
Le point obtenu en Russie parachève un parcours de haute volée, entamé par une victoire face à ce même Zénith et marqué par un succès contre le FC Porto, tenant de la Ligue Europa. Invaincu cette saison en Ligue des champions, l'Apoel détonne au milieu des cadors européens, comme l'avait fait la saison dernière le champion du Danemark, le FC Copenhague, qui s'était lui aussi qualifié pour les huitièmes, ou encore l'Anorthosis Famagouste, premier club chypriote à atteindre la phase de poules en 2009-10. Le petit au milieu des gros, ce sont aussi les effets tangibles de la réforme Platini, qui, depuis 2009, facilite l'accès des clubs les plus modestes à la phase de poules de la C1.
Les fruits de l'expérience
Mais la présence de l'Apoel en huitièmes n'est pas seulement le résultat d'une réforme. C'est aussi le fruit d'une habile politique sportive. A l'instar des clubs russes ou ukrainiens, l'Apoel s'est appuyé sur l'arrivée massive de plusieurs joueurs brésiliens. Le club a aussi su faire fructifier sa première expérience en Ligue des champions, en 2009-10. "Cela a aidé à doper la confiance et le moral. Et nous avons fait quelques bons choix de recrutement, compte tenu de notre nouvelle solidité financière", s'est félicité l'entraîneur serbe Ivan Jovanovic.
Cette première campagne européenne, soldée par trois nuls (dont un contre Chelsea) et trois défaites, a en effet permis au club de récolter 12 millions d'euros. Avec les points engrangés et les huitièmes de finale à venir, la campagne 2011-12 devrait être bien plus rémunératrice encore.
Chypre est en joie
La performance sportive de l'Apoel a rempli de joie les habitants de Nicosie, qui ont fait résonner les klaxons, mercredi soir. Même si le club est proche de la communauté grecque* et plutôt ancré politiquement à droite (à la différence de son rival, l'Omonia Nicosie), c'est l'ensemble des Chypriotes qui vibre avec l'Apoel, alors que la sélection nationale, elle, n'a guère brillé lors des qualifications à l'Euro 2012 (aucune victoire au compteur). "Le club prend une autre dimension, et tout le football chypriote va suivre", considère un supporter de Limassol rencontré, mercredi, dans les rues de Nicosie. Le football chypriote de clubs, lui, peut d'ores et déjà se targuer d'avoir un représentant assuré de disputer les huitièmes de finale de la Ligue des champions. Ce n'est pas le cas de tout les pays. A commencer par la France.
*Apoel est l'acronyme de "club athlétique de football des (chypriotes) grecs.