Contre les pronostics mais fidèle à sa légende, l'équipe de France de handball a remporté dimanche, au Danemark, contre le pays hôte (41-32), le troisième titre européen de son histoire après ceux acquis en 2006 et 2010. Il s'agit du résultat d'une équipe étonnante, qui a su confirmer ses succès passés et dépasser ses revers récents.
Il aurait pu jeter l'éponge après un dernier Mondial raté, conclu à la 11e place. Mais Claude Onesta a préféré repartir à l'aventure à la tête de l'équipe de France. Ce championnat d'Europe devait être une compétition de transition. Avant le début du tournoi, le sélectionneur des Bleus avait même déclaré : "en étant lucide, on ne peut pas faire partie des favoris". Et pourtant, après un parcours brillant lors des phases de groupes, à peine entaché par une défaite sans conséquence contre la Suède, les Bleus ont battu l'Espagne en demies puis le favori danois en finale. "Même dans les rêves les plus fous, on n'avait pas imaginé un scénario de ce type-là", a réagi à chaud Claude Onesta sur Canal+. "Je pense que les Danois se sont noyés tout seuls mais notre mérite a été de leur garder la tête sous l'eau." Mesuré dans son attitude, mais fort dans ses propos, Onesta a une fois de plus fait la démonstration de son talent de meneur d'hommes.
Les Bleus sont sacrés champions d'Europe :
Il avait été au cœur de la tempête, avec "l'affaire des paris" en fin d'année 2012. A 29 ans, Nikola Karabatic a réussi à redevenir ce qu'il était : à savoir le meilleur joueur du monde. Son Euro brillant, sur le terrain comme au bord, où il a souvent fait entendre sa voix, a été salué par le titre de meilleur joueur du tournoi. Agé de 34 ans, Daniel Narcisse a lui prouvé qu'il restait un compétiteur hors du commun. Avec 6 sur 7 aux tirs, il a souvent éteint les espoirs naissants des Danois. Un autre trentenaire, Thierry Omeyer, 37 printemps, a fait honneur à son statut d'icône. Le gardien de Montpellier, de retour de blessure en début d'Euro, a démarré la finale en fanfare. Auteur de 12 arrêts au final, il a pris d'emblée l'ascendant sur son vis-à-vis Niklas Landin, qui n'a stoppé que 4 tirs sur 24... Et que dire des deux ailiers Luc Abalo (7/9 aux tirs) et Michaël Guigou (10/11). Ces deux-là ont survolé les débats. Enfin, Jérôme Fernandez, qui n'a joué que 5 minutes dimanche, a eu le privilège de soulever le bouclier promis au vainqueur, le septième trophée de l'ère Onesta : trois Euro (2006, 2010 et 2014), deux Mondial (2009 et 2011) et deux JO (2008 et 2012).
Ils devaient faire leurs armes dans un groupe en reconstruction. Ils sont déjà champions d'Europe : Luka Karabatic, 25 ans, a prouvé lors de cet Euro qu'il n'était pas seulement que le frère de. Quant à Valentin Porte, 23 ans, il a totalement éclaté au plus haut niveau lors de cet Euro. Il a réussi une finale exceptionnelle, avec une réussite insolente aux tirs (9/11), et un "kung-fu" phénoménal, aussi spectaculaire que décisif, en fin de première période, sur une passe de Guigou. Ces deux-là, qui incarnent la nouvelle génération, ont marqué des points dans la perspective des prochaines échéances, et notamment les JO de Rio.
Le mérite d'Onesta est d'avoir réussi la synthèse entre cadres et jeunes joueurs, comme il l'avait déjà fait dans le passé, en installant par exemple Cédric Sorhaindo au poste de pivot. Lors de cet Euro, le coach tricolore a réussi à concerner tout le monde, de Guillaume Joli, spécialiste des jets de sept mètres, à Igor Anic, efficace aux tirs, et a délégué son pouvoir et parfois sa parole. L'ancien taulier de la défense, Didier Dinart, semble ainsi avoir réussi avec brio sa reconversion en tant que coach assistant. Ce savant mélange d'expérience et de confiance en soi permet aujourd'hui le maintien au plus haut niveau de l'équipe de France, dont le succès de dimanche a un goût sacrément savoureux, qui mêle l'inattendu à l'inexorable.