Le cinquième titre historique décroché par la France, dimanche soir, face au Qatar a fait passer au second plan la performance extraordinaire du pays hôte. Extraordinaire, au sens propre. Car c'était la première fois qu'un pays non européen se qualifiait pour la finale d'un championnat du monde de handball. Extraordinaire aussi, parce que cette équipe n'était composée que de deux joueurs nés dans le pays. Les 14 autres venaient d'horizons aussi divers que la Bosnie, Cuba, l'Egypte, l'Espagne, l'Iran, le Monténégro, la Syrie, la Tunisie et même la France, avec Bertrand Roiné, ancien Bleu.
Après avoir réussi l'un des plus incroyables exploits de l'histoire des sports collectifs, cette équipe du Qatar est-elle appelée à se pérenniser ? "On se dit qu'ils vont aller jusqu'en 2016 et les Jeux olympiques parce qu'ils peuvent garder la même équipe", commente Alain Portes, consultant Europe 1 et sélectionneur de l'équipe de France féminine de hand. "Mais après, autant de moyens pour quoi ? L'intérêt du public là-bas pour le handball est artificiel. Les spectateurs donnent le sentiment d'être 'convoqués'. Pour qu'ils soient tous restés comme ça pendant la cérémonie de clôture, c'est suspect."
Si les spectateurs sont restés, qu'en sera-t-il des joueurs ? Un grand flou demeure autour de l'engagement de tel ou tel. Certains auraient bénéficié de passeports temporaires pour pouvoir disputer la compétition sous les couleurs blanche et pourpre du Qatar. "Sur les 14 joueurs, il y a à mon avis 14 motivations différentes", considère Alain Portes. "Pour certains, c'est l'argent, pour d'autres, ça peut être la reconnaissance, d'autres l'envie de participer à de grandes compétitions alors qu'ils sont barrés dans leur sélection ou que leur sélection est trop faible pour pouvoir participer à un championnat du monde ou à des Jeux olympiques. Le gardien du Barça, Danijel Saric (ci-dessus), l'a fait pour l'argent. Idem, on a proposé un contrat qu'on ne peut pas refuser au coach espagnol, Valero Rivera."
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En revanche, Alain Portes croit à la bonne foi des joueurs qatariens quand ils se présentent comme une "bande de potes". Et pense que le Qatar, auquel semble promis l'un des strapontins réservés pour le continent asiatique, devrait à nouveau être compétitif lors des prochains Jeux olympiques. Et après ? "Peut-être qu'ils pousseront jusqu'au prochain Mondial, en France, histoire d'être présent chez les champions du monde en titre." En vertu du règlement de l'IHF, les joueurs qui ont opté pour le Qatar ne peuvent de toute façon pas jouer pour une autre sélection dans les trois ans, soit jusqu'en 2018.
Déjà tourné vers 2022 ? Mais l'après, pour le Qatar, semble être déjà la Coupe du monde de football, en 2022. Au niveau organisation, le championnat du monde de handball, qui s'est déroulé sans accroc majeur, était une première répétition. Au niveau sportif, la question qui s'impose aujourd'hui est : le Qatar sera-t-il capable de refaire le même coup au foot ?
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Si l'on parle d'une sélection aux allures de mosaïque mondiale, avec d'anciens internationaux étrangers, la réponse est non. En effet, la fédération internationale de handball (IHF) est de loin la plus permissive. En football, un joueur qui a déjà représenté une nation chez les seniors ne peut pas en représenter une autre. Mais si l'on parle d'une sélection compétitive, capable de briller à domicile comme l'a fait la Corée du Sud en 2002 (demi-finales), alors la réponse est oui. Le Qatar ne se présentera pas au départ de "son" Mondial, en 2022, comme une victime expiatoire.
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Les bienfaits de l'Aspire Academy. Dans un passé récent, en jouant avec les règles de la nationalité et les règlements, le petit Emirat a déjà attiré des joueurs sud-américains pas assez bons pour leur sélection nationale. Mais le Qatar mise surtout sur la formation et son Aspire Academy, qui a impressionné Alain Portes, qui s'est déjà rendu trois fois dans le pays. "Là-bas, les sportifs ont tout ce qu'il faut pour travailler et progresser dans des conditions optimales", souligne le consultant Europe 1.
Et parmi ces sportifs, outre des athlètes ou des tennismen, on trouve également de jeunes footballeurs que le Qatar détecte aux quatre coins du monde grâce à son programme "Football dreams". Comme en handball, où l'équipe entraînée par Valero Rivera a gagné l'an dernier la Coupe d'Asie, le Qatar entend déjà progresser sur la scène continentale. Et, en 2014, le pays a remporté la Coupe d'Asie des moins de 19 ans, premier trophée majeur décroché par le football qatarien. Des joueurs de moins de 19 ans en 2014, en voilà qui en seront en pleine force de l'âge en 2022...