Pourquoi la fédération a-t-elle changé d'avis ?
Le 26 janvier dernier, la fédération espagnole de cyclisme (RFEC) proposait à son coureur une suspension d'un an apparaissant aux yeux de tous comme un "compromis". Contador a alors eu dix jours pour préparer sa défense, un dossier d'une quarantaine de pages qui a finalement fait la différence, même si la RFEC n'a pas clairement justifié sa décision finale. L'Equipe avançait mardi la possibilité d'un vice de procédure. Contador n'aurait jamais reçu une lettre adressée par l'UCI à la RFEC. Un article de la Constitution espagnole relative au "droit de l'accusation à être informée" n'aurait alors pas été respecté, ce qui aurait permis l’absolution de Contador. Néanmoins, lors du rendu de sa décision, la RFEC n'a pas évoqué cet élément.
Contador est-il définitivement sorti d'affaire ?
Non, car même s'il peut reprendre la compétition, le coureur espagnol reste sous la menace d'un appel de l'Union cycliste internationale (UCI) et de l'Agence mondiale antidopage (AMA). Les deux instances ont en effet la possibilité, dans les trente jours, d'amener le dossier devant le Tribunal arbitral du sport (TAS). Le président de l'UCI, Pat Macquai dit "vouloir prendre son temps" selon une information Europe 1. L'appel ne sera suspensif que si l'AMA ou l'UCI apporte la preuve que Contador a commis une faute ou une négligence significative. Dans l'autre cas, Contador pourra courir jusqu'à la décision finale du TAS.
Quand va-t-il faire son retour à la compétition ?
Dès mercredi ! Suspendu à titre provisoire par l'UCI depuis le 24 août, Contador fera son retour dans le peloton lors du Tour d'Algarve, une épreuve à étapes portugaise qui s'offre ainsi une publicité inattendue...
Contador sera-t-il au départ du Tour de France ?
C'est encore l'inconnu mais ses chances de défendre son titre en juillet prochain sont réelles. Si l'AMA et l'UCI ne font pas appel de la décision, Contador sera au départ. Amaury Sport Organisation n'a aucun moyen d'empêcher sa participation. Si l'AMA et l'UCI font appel - qu'il soit suspensif ou non -, le TAS doit rendre son avis dans un délai de quatre mois. A considérer que l'appel pourrait être officiel début mars, cela nous amène jusqu'à début juillet. Quelle que soit la décision finale rendue par le TAS, le Grand départ du Tour 2011, qui aura lieu en Vendée, ne se fera pas dans la sérénité...
Qui sont les grands gagnants de cette décision ?
En dehors de Contador lui-même évidemment, sa nouvelle équipe, la Saxo Bank, a poussé un grand "ouf" de soulagement. L'équipe danoise, qui a perdu cet hiver les frères Schleck, compte évidemment sur le Madrilène lors des grandes épreuves à étapes. "Il faut vivre avec cette incertitude et cette éventualité d'un appel", a expliqué le manager de l'équipe, Bjarne Riis, avant d'ajouter : "nous avons eu toujours en tête deux possibilités : il court ou il ne court pas". Pour un temps, cette incertitude est levée.
Quelle a été la première réaction de Contador ?
"Avant tout, je me sens soulagé et bien sûr très heureux de cette décision. Je viens de passer plusieurs mois très stressants, mais tout au long de cette affaire j'ai toujours été disponible pour toutes les enquêtes liées à mon cas", a expliqué le triple vainqueur du Tour dans des propos repris sur le site de sa nouvelle équipe, Saxo Bank. "Ce qui avait le plus d'importance pour moi, c'était que mon honneur soit reconnu et que justice soit faite", a-t-il ajouté dans une interview télévisée, enregistrée avant l'annonce officielle. Enfin, sur son compte Twitter, le Madrilène a remercié ses fans et parlé d'un "jour de justice" et d'une affaire qui, malgré tout, va "laisser des traces". Heureusement, pas de clenbutérol...
Comment réagit-on en France ?
Mal. Le président de la Fédération française de cyclisme (FFC), David Lappartient, a fait part mardi soir de sa "déception". "Dans le dopage, les dossiers arrivent les uns après les autres et on se doit d'être extrêmement sévère et intransigeant", a-t-il déclaré à l'AFP. "Même si les traces sont infimes, il y a un apport exogène qui doit être sanctionné. Le clenbutérol est une substance interdite, il n'y a pas de doses infimes autorisées." Chez les managers aussi, on frôle l'accablement. "J'ai l'impression que la fédération espagnole n'a pas fait preuve d'un grand courage", a ainsi réagi le manager de Cofidis, Eric Boyer, au micro d'Europe 1. "J'espère que l'UCI va réagir rapidement et efficacement."
"C'est désespérant", estime Eric Boyer :
Les autorités espagnoles ont-elles fait pression ?
"Il n'y a aucune raison juridique de sanctionner Contador." Cette phrase, publiée sur Twitter, est signée José Luis Zapatero, chef du gouvernement espagnol. Outre ce soutien politique, de poids, Contador a également bénéficié d'un environnement favorable à son absolution. Angel Juanes, le président de l'Audience Nationale, plus haute juridiction pénale d'Espagne, avait ainsi déclaré dans un entretien accordé à El Mundo : "dans la proposition de suspension d'un an (émise au départ par la fédération), on note déjà que le coureur ne s'est pas dopé et que l'absorption de clenbutérol est si infime qu'elle ne peut avoir servi à améliorer son rendement." Si rien ne prouve que les autorités espagnoles aient fait pression, l'ambiance était clairement à la clémence.
La fédération espagnole est-elle laxiste en termes de dopage ?
Si on ne peut l'affirmer de manière péremptoire, les faits sont là. La fédération espagnole a du mal à jeter la pierre à ses athlètes. L'an dernier, la RFEC et la justice espagnole avaient ainsi refusé d'ouvrir une enquête à l'encontre d'une autre star de son cyclisme, Alejandro Valverde, rattrapé par l'affaire Puerto. C'est l'UCI et l'AMA qui avaient obtenu devant le TAS la suspension pour deux ans de Valverde. Le président de la fédération française regrette ces décisions. "Sans mettre en cause le "miracle sportif espagnol", ça m'étonne que dans une grande démocratie comme l'Espagne, il y ait une sorte de volonté commune de ne pas reconnaître le problème du dopage", souligne-t-il.
Contador s'est-il dopé ?
C'est "la" question. Mais personne n'a la réponse. Car si des traces de clenbutérol ont bien été relevées à quatre reprises dans les urines du coureur espagnol sur le dernier Tour de France, elles sont si infimes - quelques picogrammes - qu'elles ne permettent pas de conclure à un cas de dopage avéré. En effet, le clenbutérol ne permet pas, à cette dose, d'améliorer les performances. Dans son courrier envoyé à l'AMA, l'UCI avançait quatre explications possibles au contrôle positif de Contador : ingestion de suppléments alimentaires contaminés au clenbutérol, ingestion de nourriture contaminée (explication avancée depuis le début par Contador), transfusion de dérivés sanguins contenant du clenbutérol (l’hypothèse d’une possible autotransfusion a été émise un temps par L’Equipe), injection de microdoses de clenbutérol. Aucune de ces quatre hypothèses n'a pu être prouvée.