Il l'a fait ! Après 15 jours 4 heures 50 minutes et 48 secondes de mer, Lionel Lemonchois a remporté la neuvième édition de la Route du Rhum 2010 dans la classe Multi 50. Une deuxième victoire de rang pour le skipper de Prince de Bretagne, vainqueur en 2006 en multicoque de 60 pieds et toujours détenteur du record absolu de l'épreuve, d'autant plus belle qu'il avait été sur le point d'abandonner au large de l'Espagne... "Il n'a jamais rien lâché, il a eu une bonne journée de galères au début de la course, il ne s'est pas démonté et il a eu raison. C'est la preuve qu'il peut se passer plein de choses... Au moment où Lionel Lemonchois était sur le point ce lundi de couper la ligne d'arrivée de la neuvième Route du Rhum en vainqueur de la classe Multi 50, l'un des ses plus sérieux rivaux au départ de Saint-Malo, Yves Le Blévec, qui signifiait au passage son abandon officiel, ne manquait pas de louer la ténacité du skipper de Prince de Bretagne, vainqueur de sa deuxième Route du Rhum dans deux classes différentes, une performance inédite. Car avant de triompher sous le soleil de la Guadeloupe pour la deuxième fois de rang, Lionel Lemonchois est passé par tous les états, notamment les plus bas en début de course lorsqu'il fut sur le point d'abandonner. Naviguant depuis le départ dans une option nord à l'opposé des trajectoires sud de ses deux principaux rivaux, Franck-Yves Escoffier (Crêpes Whaou !) et Yves Le Blévec (Actual), le skipper de Prince de Bretagne avait assisté impuissant à la chute de sa grand-voile sur le pont, une pièce la retenant dans le rail ayant lâché. Pour réparer, il n'y avait pas mille solutions, la seule consistait à monter dans le mât du trimaran, ce qu'il avait tenté dans un premier temps, en vain. Du coup, le Normand avait lâché la course, faisant route vers les côtes espagnoles pour trouver un port abrité, mais l'homme est aussi tenace que dur au mal et, profitant de conditions de mer moins difficiles, il avait retenté le 3 novembre au matin l'ascension 30 mètres au-dessus de l'eau, cette fois-ci avec succès ! Au bout de quatre heures d'intenses efforts, il pouvait ainsi annoncer à son équipe à terre et à la direction de course, inquiètes de ne pas avoir de nouvelles: "C'est bon, je suis redescendu, j'ai récupéré les pièces, j'ai ma petite idée pour réparer tout ça. Appelez le voilier (le fabricant des voiles, ndlr) pour qu'il me donne son avis. Et sinon, envoyez la météo, pour moi c'est reparti, je suis d'ores et déjà en configuration course." Plus d'une année de pépins techniques Dès lors, commençait pour Lionel Lemonchois, neuvième au moment de ce deuxième départ à 300 milles du leader, une folle cavalcade, l'objectif étant pour lui de terminer sur le podium, les deux premières places, occupées par le tandem Escoffier-Le Blévec sur des machines au moins aussi performantes que Prince de Bretagne, semblant hors d'atteinte. Cinquième le dimanche 7 novembre, le lauréat du dernier Trophée Jules-Verne (avec Franck Cammas à bord de Groupama 3) apprenait dans la nuit les avaries de structure rencontrées à quelques heures d'intervalle par Escoffier puis Le Blévec qui lui offraient un boulevard vers le podium. Et pour la victoire ? Notre chroniqueur Yann Eliès ne cachait pas en fin de semaine dernière pencher pour un tel scénario: "Ce serait LA belle histoire de cette Route du Rhum de le voir s'imposer pour la deuxième fois de suite. Certes, ce n'est pas dans la catégorie reine, mais la manière dont il est revenu dans la course laisse rêveur. Il était tout proche de l'abandon, il a réussi à solutionner l'avarie à la force de ses bras, au propre comme au figuré, c'est une bien belle histoire." Restait cependant à coiffer sur le poteau un Lalou Roucayrol devenu leader à bord de Région Aquitaine-Port-Médoc et nanti en milieu de semaine dernière d'une grosse centaine de milles d'avance. La météo y mettra du sien en donnant un gros coup de main à Lemonchois, parvenu en 24 heures à combler tout son retard à la faveur d'une molle ayant littéralement «scotché» le skipper aquitain qui cédait les commandes vendredi dernier. Malgré la tentative de retour au nord de l'amateur Philippe Laperche (La Mer révèle nos sens), la victoire ne pouvait plus échapper à Lionel Lemonchois qui a fini par couper la ligne d'arrivée ce lundi à 17h52'48" (heure de la métropole) après 15 jours 4 heures 52 minutes et 48 secondes. Cette victoire inattendue fera le plus grand bien à un partenaire, Prince de Bretagne qui, en plus d'un an, avait surtout accumulé les pépins: le trimaran, dessiné par Nigel Irens et Benoît Cabaret, avait en effet subi une sérieuse avarie de structure un gros mois après sa mise à l'eau en octobre 2009, ce qui avait contraint son skipper d'alors, Hervé Cléris, à disputer la Transat Jacques-Vabre sur une vieille machine. Rebelote cette année avec en septembre de nouveaux soucis de structure décelés en septembre et solutionnés dans l'urgence. La victoire de Lionel Lemonchois, sa deuxième de rang après celle remportée en 60 pieds dans le temps record et toujours d'actualité de 7 jours 7 heures 19 minutes et 6 secondes (moins de la moitié du temps mis cette année !), fera donc le plus grand bien à toute l'équipe, skipper compris, nul doute que sa célébration ce lundi à Pointe-à-Pitre sera à la hauteur des frustrations accumulées !