Très large vainqueur à Zilina il y a trois semaines (7-0), Marseille joue son avenir européen mardi (18h30) sur la pelouse synthétique du Spartak Moscou à l'occasion de la 5e journée de la Ligue des champions. Battus par les Russes à l'aller au Vélodrome (0-1), les Phocéens, qui recevront Chelsea lors de la dernière journée, doivent s'imposer pour espérer sortir de leur poule, une victoire autre que 1-0 étant même synonyme de qualification dès mardi... Onze ans... Soit le nombre d'années qui séparent l'Olympique de Marseille de sa dernière qualification pour la deuxième phase de la Ligue des champions. Depuis, le club le plus titré de France a buté à quatre reprises sur la phase de groupes, incapable de finir parmi les deux premiers, le plus souvent à cause d'une entame de compétition ratée. Et cette saison n'a pas dérogé à la règle, avec deux défaites d'entrée (0-1 à domicile face au Spartak Moscou, 2-0 sur la pelouse de Chelsea) qui ont obligé les Olympiens à se lancer dans une usante course-poursuite. Deux victoires sur Zilina plus tard (1-0 au Vélodrome, 7-0 en Slovaquie), l'OM est pourtant parvenu à redresser cette situation compromise, au point même d'espérer à l'aube de la 5e journée une issue différente des années précédentes, à savoir une qualification pour les huitièmes de finale de la plus prestigieuse des compétitions européennes, ce qui serait une grande première pour le club (*). Et cette qualification, les hommes de Didier Deschamps peuvent même la décrocher dès mardi, à condition de s'imposer à Moscou sur un score autre que 1-0 (voir encadré). Louis-Dreyfus: "Une élimination serait une grande déception, pour ne pas dire un échec" Preuve de l'importance de ce déplacement en terre russe, la patronne en personne, Margarita Louis-Dreyfus, native de Saint-Pétersbourg, est montée au créneau médiatique pour, dans une interview accordée au Journal du dimanche le week-end dernier, mettre une gentille mais ferme pression sur l'équipe: "Nous avons l'ambition de faire grandir le club en franchissant chaque année un nouveau cap. L'an passé, la priorité était de remporter un titre pour la mémoire de mon mari et pour mettre fin à cette «malédiction» qui durait depuis presque vingt ans à Marseille. Cette saison, la direction a décidé d'investir de façon importante lors du mercato pour renforcer l'équipe et lui permettre de franchir le premier tour de la Champions League. Une élimination serait donc une grande déception, pour ne pas dire un échec pour le club." Difficile d'être plus explicite et nul doute que si la veuve de Robert Louis-Dreyfus ajoute avoir "une grande confiance en Didier (Deschamps) pour que notre équipe continue de s'améliorer et dans nos joueurs pour qu'ils retrouvent cette hargne et cette envie qui faisaient leur force l'année passée", cette confiance prendrait un gros coup de canif en cas de contre-performance moscovite. Le message semble passé, Didier Deschamps se montrant parfaitement conscient de l'enjeu d'un rendez-vous pas comme les autres: "Ce n'est pas un match important, c'est un match décisif, une rencontre couperet, il n'y a pas de séance de rattrapage possible." Un discours repris par l'Argentin Lucho Gonzalez qui ajoute, sur le site du club: "Ce sera tout simplement une finale. A partir du moment où on a gagné à Zilina, on savait que le match à Moscou serait une finale, alors je crois qu'il faudra être pleinement concentré et le vivre comme se vit une finale. On a déjà montré par le passé qu'on savait répondre présent dans ces moments-là, comme contre Bordeaux en Coupe de la Ligue, ou contre Rennes en fin de saison." Le Spartak amoindri La feuille de route marseillaise est toute tracée, reste maintenant à la suivre à la lettre, ce qui est à la fois loin d'être joué et dans les cordes des Phocéens. Loin d'être joué, car, comme souvent en Russie à pareille époque, c'est un temps hivernal qui attend une équipe de l'OM à peine sortie de l'automne et donc pas vraiment acclimatée à la rigueur du climat moscovite, contrairement à sa rivale. Ensuite parce que, contrairement aux Phocéens, les Russes ne sont pas obligés de s'imposer pour espérer se qualifier: un nul puis une victoire, probable, à Zilina, suffisent aux hommes de Valeri Karpine (qui a déjà croisé l'OM en quarts de finale de la Coupe de l'UEFA lorsqu'il évoluait au Celta Vigo, avec une élimination à la clé) pour franchir le cap. Enfin parce que même si elle traverse une période difficile, comme l'a prouvé sa défaite à domicile samedi dernier lors du derby face au CSKA (1-3), la formation russe a montré, notamment au match aller, qu'en adoptant une stratégie d'attente, elle était capable de déstabiliser une équipe marseillaise qui, à l'exception notable du match à Zilina, marque peu, le duo international Rémy-Gignac tardant à faire oublier Niang. Bref, Marseille sait que ce match sur le synthétique du stade Loujniki (où l'OM a déjà perdu en février 2008, 2-0 en 16e de finale de la Ligue Europa) sera autrement plus compliqué que celui disputé à Zilina, mais le champion de France possède aussi les arguments pour le rendre facile. En premier lieu un effectif au grand complet, au sein duquel éclate actuellement un André Ayew qui devient aussi décisif que ne l'était son père il y a presque vingt ans (Abedi avait notamment marqué le premier but de la victoire olympienne 3-1 en 1991 en demi-finale aller de la C1), qui permet aux Phocéens d'être beaucoup plus réguliers qu'ils ne l'étaient en début de saison. Depuis qu'ils se sont inclinés face à Chelsea fin septembre, les hommes de Didier Deschamps ne déplorent qu'une seule défaite, pour sept victoires et deux nuls. Certes, la manière n'a pas toujours été au rendez-vous, mais cette série est gage de sérénité pour une équipe qui semble indéniablement monter en puissance, son récent succès à Toulouse (1-0) l'a encore prouvé. Le Spartak pourrait donc bien faire les frais de la solidité retrouvée d'un OM décidée à laver l'affront du match aller. D'autant que l'équipe russe, seulement quatrième de son championnat à une journée de la fin de la saison, est amoindrie par de nombreuses absences sur blessures, en défense (Ivanov et Parshivlyuk), mais aussi en attaque (le Brésilien Alex, son compatriote Ari étant incertain). Autant d'éléments de nature à alimenter la confiance de supporters olympiens qui espèrent bien ne plus se contenter en février de la Ligue Europa en guise de lot de consolation. Ils ne sont pas les seuls... -------------------------------------- (*) En 1999-2000, l'OM s'était qualifié pour une deuxième phase de poules, les huitièmes de finale n'existant pas.