Il est des défaites qui interrogent. La déroute argentine contre le Venezuela le 13 octobre dernier (1-0) a suscité l'ire d'un peuple encore affecté par l'élimination précoce de l'Albiceleste lors de la dernière Copa America, compétition organisée de surcroît à domicile. A la veille de deux rencontres qualificatives pour le Mondial 2014, à domicile face à la Bolivie vendredi, puis en Colombie le mardi suivant, la pression populaire repose sur les épaules de Leo Messi. "Être capitaine de l'équipe nationale est une distinction que Messi mérite, tout simplement parce qu'il remplit toutes les conditions que doit avoir un capitaine: la combativité et un talent incommensurable, c'est une décision qui va favoriser l'unité du groupe. Il grandira aussi avec la fonction". Une déclaration signée de la légende madrilène Alfredo Di Stefano qui, dans un entretien accordé au site internet de la Fédération argentine, appelle de ses voeux l'intronisation de Messi en tant que capitaine de l'Albiceleste. Un cri du coeur auquel Alejandro Sabella, nommé sélectionneur suite à l'éviction de Sergio Batista en juillet dernier, n'est pas resté sourd. Dès sa prise de fonction, il décide de confier au Barcelonais le brassard de capitaine au détriment d'un méritant Javier Mascherano. Messi qui enchaîne les buts comme on enfile les perles avec le Barca déçoit jusqu'à présent en sélection. Le double Ballon d'or (2009-2010), dont les prestations en équipe nationale sont en dent de scie, seulement 3 buts lors des 10 dernières rencontres internationales, peine à devenir le détonateur d'une équipe moribonde. Preuve en est la débâcle en Copa America, où la sélection nationale a été éliminée prématurément en quarts de finale, à l'issue d'une séance de tirs aux buts haletante, par une équipe uruguayenne qui finira par s'adjuger le trophée. Des Argentins poussifs lors de la phase de poules, incapables de s'imposer face aux modestes boliviens (0-0) en match d'ouverture, qui retombent inlassablement dans leurs travers. Kempes, Maradona... Messi ? Sabella, fin connaisseur du football argentin, espère, en lui octroyant de nouvelles prérogatives, accroître l'emprise du natif de Rosario sur le collectif et ainsi rompre avec l'inconstance chronique lors des compétitions internationales dont font preuve les compatriotes de Javier Pastore depuis une vingtaine d'années. Car le retour des lendemains qui chantent à Buenos Aires est invariablement conditionné à l'émergence d'un leader charismatique qui soit en mesure de prendre le jeu à son compte lors des échéances majeures. A l'instar d'un Batistuta, auteur d'un doublé lors de la dernière victoire en date en Copa América (1993), Mario Kempes, milieu de terrain ayant fait les beaux jours du FC Valence à la fin des années 70, a incarné la figure de proue de l'équipe championne du monde en 1978. Que dire de l'icône intemporelle que représente Diego Maradona qui a mené ses coéquipiers jusqu'au zénith lors du Mondial 1986. L'Albiceleste trouve son équilibre dans l'alliance subtil d'un meneur à l'aura substantielle et d'individualités transcendées au profit du collectif. Dans un pays marqué par près de 40 années d'une dictature militaire intransigeante, ébranlé par une crise économique ravageuse, le ballon rond est l'opium du peuple par excellence. Dès lors, lorsque la sélection nationale vacille c'est toute une nation qui se crispe. Charge à Léo Messi, assisté de talentueux coéquipiers, d'endiguer cette spirale négative afin d'aborder la Coupe du monde 2014 au Brésil sous les meilleurs auspices. Élément de réponse dans les prochains jours au terme des confrontations décisives face à la Bolivie vendredi et la Colombie mardi.