Moins d'un mois après l'annonce des recommandations de son groupe de travail, la Fifa, organisatrice de la Coupe du monde, va arrêter jeudi et vendredi lors de son comité exécutif le calendrier du Mondial 2022 qui aura lieu au Qatar. Il ne fait aujourd'hui plus aucun doute que cette Coupe du monde, la plus chère de l'histoire, sera la première à se dérouler en hiver. Reste à savoir quand. Le groupe de travail a émis l'hypothèse d'une compétition qui se tiendrait sur quatre semaines, du 26 novembre au 23 décembre 2022, soit quatre jours de moins que la dernière édition au Brésil, en 2014.
Aux yeux de la Fifa, cette fenêtre présente plusieurs avantages, à commencer par les températures moyennes, qui oscillent à cette époque de l'année au Qatar entre 23°C et 30°C (contre 41-42°C lors des mois de juin et juillet, où se tient habituellement la Coupe du monde). Cette fenêtre n’entrerait pas non plus en conflit avec les dates des JO d'hiver, prévus en début d'année 2022, et elle permettrait enfin de modifier a minima les calendriers des championnats européens, en anticipant simplement leur pause hivernale.
La Premier League, première opposante. Si la solution hivernale a reçu l'assentiment de l'UEFA et de son président, Michel Platini, prêts à modifier le calendrier de la Ligue des champions 2022-23, elle déplaît évidemment aux responsables des grands championnats. Ils l'ont déjà fait savoir et attendent désormais que les dates soient arrêtées pour affûter encore davantage leur discours.
En première ligne, on retrouve évidemment la… Premier League. Et pour cause, contrairement aux autres grands championnats européens, le championnat anglais ne marque pas de pause pendant l'hiver. Le mois de décembre est même celui où se dispute le plus de matches, avec notamment la tradition du "Boxing day", le 26 décembre, et trois journées autour des fêtes de Noël. "Il faut s'assurer que l'on puisse conserver intact notre programme des fêtes", tonne le directeur exécutif de la Premier League, Richard Scudamore (ici en photo), qui s'inquiète aussi de "l'intégrité du championnat, car une coupure de six ou sept semaines, ce n'est évidemment pas idéal".
En Allemagne, où les diffuseurs s'inquiètent de la concurrence avec les sports d'hiver, très populaires outre-Rhin, le manager de Mönchengladbach, Max Ebrl, estime que cette programmation "aura un impact sur le calendrier de la Bundesliga pour deux ou trois ans".
La tonalité est la même en Espagne, où la Ligue a estimé le mois dernier que ce calendrier "perturbera la déroulement normal des compétitions européennes et provoquera de graves dommages", mais aussi en France, où le président de l'OL, Jean-Michel Aulas, s'est fait le porte-parole des clubs de l'élite : "je suis totalement solidaire de l'ECA (association des clubs européens) et de l'EPFL (association des championnats professionnels européens) et je considère que la date retenue n'est pas la plus appropriée".
Vers des dédommagements financiers ? Devant la fronde des ligues professionnelles mais aussi des clubs les plus puissants, qui fournissent le plus grand contingent de joueurs participant au Mondial, la Fifa s'est dite prête à consentir à quelques efforts.
Son président Joseph Blatter, grand favori à sa propre succession pour un cinquième mandat en mai, s'est d'ailleurs récemment fait l'avocat d'une fin de tournoi au plus tard le 18 décembre, ce qui permettrait, notamment, de sauver le "Boxing day".
Mais les clubs, employeurs des joueurs, espèrent d'abord un dédommagement financier. "Il n'y aura pas de compensation financière, il y a sept ans pour s'organiser", a pourtant anticipé en février le secrétaire général de la Fifa, Jérôme Valcke. Mais pour Jean-Michel Aulas, le dossier peut encore bouger : "on a obtenu de l'UEFA des dédommagements pendant ses compétitions (notamment l'Euro). Nous sommes au début des discussions. N'oublions pas que la Fifa entre en période électorale. On verra une fois les élections passées (le 29 mai)".
Malgré tout, le Mondial en hiver a aussi ses défenseurs. Et ils viennent notamment… d'Angleterre. "Le Mondial arrive normalement à la fin d'une longue saison éprouvante, quand les joueurs sont cramés", insiste l'ancien international anglais Phil Neville. "D'un point de vue anglais, ce pourrait bien être la meilleure chose qui nous soit arrivée. On aurait une équipe fraîche comme jamais avant un Mondial." Un Mondial hivernal et perturbateur mais marqué par un vent de fraîcheur sur le plan du jeu ? Voilà qui pourrait peut-être même donner des idées à la Fifa pour le futur…
>> LIRE AUSSI - Mondial 2022 au Qatar : des soupçons de pots-de-vin