12 octobre 1997. Tout au bout d'une course en ligne que les Bleus avaient domptée, Laurent Brochard, dit "La Broche", décrochait le titre de champion du monde sur route en devançant au sprint le Danois Bo Hamburger et le Néerlandais Léon van Bon. Depuis, le cyclisme masculin français a brillé dans les catégories espoirs - pas plus tard que vendredi encore… - et juniors mais est resté désespérément fanny chez les "grands'" sur cette course d'un jour, l'une des plus prestigieuses du calendrier. Pire, les Tricolores ont dû se contenter de deux podiums, deux 3ème place : Jean-Cyril Robin en 1999 et Anthony Geslin en 2005. Vingt ans de disette presque total, donc, comme il y en avait eu 18 entre le titre de Jean Stablinski en 1962 et celui de Bernard Hinault en 1980. Tentative d'explication.
L'attente du grand champion… Dans les années 1990 (et avec des méthodes pas toujours recommandables, comme l'a révélé l'affaire Festina), le cyclisme français tenait le haut du pavé. Laurent Jalabert, Luc Leblanc, titré en 1994, Richard Virenque et Laurent Brochard, tous ont connu les joies d'un podium. Et tous avaient les épaules pour espérer enfiler le maillot arc-en-ciel. Depuis, la France a tardé à se trouver un grand champion, un coureur capable de fédérer derrière lui toutes les énergies. "Je pense que, parmi les causes principales, on peut effectivement identifier le fait qu'on n'a peut-être pas eu, pendant ces vingt dernières années, une grande génération de coureurs de classiques", explique au micro d'Europe 1 le président de la Fédération française de cyclisme (FFC) Michel Callot. "C'est quand même une course d'un jour les Championnats du monde, quelle que soit la typologie du parcours et je pense que ça joue beaucoup." Depuis quelques saisons, avec Thibaut Pinot, Romain Bardet, Julian Alaphilippe ou encore Arnaud Démare, elle semble disposer d'un vivier pour briller sur tous les terrains.
… Et du grand sprinteur. Mais s'il y a un terrain qu'il faut maîtriser pour gagner aux Mondiaux, c'est bien le sprint. Depuis 1997, plus de la moitié des titres se sont ainsi joués au sprint, donnant au maillot arc-en-ciel des allures de maillot vert. Oscar Freire, Romans Vainstens, Mario Cipollini, Tom Boonen, Alessandro Ballan, Thor Hushovd, Mark Cavendish, Peter Sagan… Tous ont déjà été sacrés. Depuis quelques saisons maintenant, la France dispose elle aussi de sprinteurs de grand talent. C'est le cas désormais avec Arnaud Démare, vainqueur d'étape sur le Tour cette année et de Milan-San Remo en 2016, ou Nacer Bouhanni, déjà vainqueur d'étape sur la Vuelta et le Giro.
Fédérer les énergies et affiner les stratégies. Mais avoir des bons éléments est loin d'être une garantie de victoire. On a pu le constater l'année dernière quand l'équipe bicéphale montée par le sélectionneur Bernard Bourreau autour de Démare mais aussi de Bouhanni a fait flop. Comme d'autres nations, l'équipe de France a parfois du mal à fédérer ses énergies et ses talents.
Un anniversaire en fanfare ? La France peut-elle croire à un anniversaire en fanfare ? Oui, vingt ans après, Brochard peut avoir un successeur cette année. Et, s'il devait en avoir un, ce serait sans doute Julian Alaphilippe, désigné leader des Bleus à Bergen. "Il y a les qualités naturelles qui font qu'on n'avait peut-être pas sur les dernières années les meilleurs coureurs", considère Tony Gallopin, membre de l'équipe de France. "Mis à part depuis deux-trois ans, il n'y avait pas de coureurs français qui gagnaient de grandes classiques. Voilà, il n'y a pas de secret, le champion du monde, ce n'est pas la première grande course qu'il gagne, donc je pense qu'avec Julian, c'est le coureur qui a répondu le plus présent sur les grands rendez-vous, les grandes classiques. Ce ne serait une surprise pour personne que ce soit le prochain champion du monde." Mais quand il était devenu champion du monde, Brochard n'était pas la carte maîtresse. Tony Gallopin peut donc nourrir quelques espoirs…