Les footballeurs font un métier formidable, gagnent beaucoup d'argent et sont très heureux. La nouvelle étude de la FIFPro, le syndicat mondial des joueurs, rendue publique lundi, bat en brèche cette image d'Epinal. Selon l'enquête conduite par le docteur français Vincent Gouttebarge, responsable du secteur médical de la FIFPro, 38% des 607 joueurs en exercice et 35% des anciens joueurs interrogés* présentaient des syndromes de dépression et anxiété dans les quatre semaines précédant le questionnaire.
Des chiffres plus élevés que dans la population. Le chiffre chez les joueurs en activité est bien supérieur à celui relevé l'année dernière lors d'une étude similaire menée par la FIFPro dans les championnats australien et néo-zélandais (38% contre 26% de symptômes) et en léger recul chez les retraités (35% contre 39%). Mais ces chiffres sont surtout bien supérieurs à la moyenne de la population. En 2011, une étude du British Medical Journal portant sur 18 pays développés et en voie de développement révélait que 12% de la population en moyenne avait montré des signes sérieux de dépression dans l'année écoulée.
"Une culture de machos." "C'est vrai que les troubles psychologiques sont quelque chose de tabou dans le sport", explique Vincent Gouttebarge au micro d'Europe 1. "Quand on regarde dans la population générale, le changement a été fait il y a un dix-quinze ans mais dans le sport, on n'y est pas encore. C'est sûr qu'il y a dans certains sports un peu plus virils une culture de machos, et ce n'est pas facile de parler de ça avec son club ou avec ses collègues dans le vestiaire."
L'impact des blessures. L'étude montre également qu'une part significative des joueurs et ex-joueurs, respectivement 23 et 28%, souffre de troubles du sommeil. L'abus d'alcool implique lui 9% des actifs et 25% des retraités. L'étude fait également le rapprochement entre les blessures sérieuses et l'état dépressif. Les joueurs qui ont ainsi subi plus de trois blessures sérieuses ont ainsi deux à trois fois plus de chances de développer ces pathologies. "Quand il y a un joueur qui sort du groupe sur blessure et va se faire rééduquer, il n'a pas le même soutien au niveau social, donc là, forcément, ça peut devenir un gros problème. Il doit pouvoir être soutenu dans ces moments-là, par ses coéquipiers comme par son club", relève Vincent Gouttebarge.
Le drame Robert Enke. Ces dernières années, plusieurs faits divers alarmants, comme le suicide du gardien de but allemand Robert Enke, avaient jeté un éclairage cru sur l'un des derniers tabous dans le sport de haut niveau.
*55% des joueurs interrogés ont évolué au plus haut niveau durant la majorité de leur carrière et la proportion monte à 64% chez les ex-joueurs. L'étude introduit des données émanant de Belgique, du Chili, de France, de Finlande, du Japon, de Norvège, du Paraguay, du Pérou, d'Espagne, de Suède et de Suisse.