Fallait-il ou non rappeler Patrice Evra et Franck Ribéry ? Depuis sa prise de fonctions l'été dernier, Laurent Blanc ne s'est jamais posé la question en ces termes. En choisissant de ne retenir aucun des 23 joueurs présents à Knysna pour le match amical en Norvège, en août 2010, le sélectionneur des Bleus avait clairement dit qu'il avait soldé les comptes de la dernière Coupe du monde. Depuis, Patrice Evra et Franck Ribéry ont purgé leurs cinq et trois matches de suspension. Leurs retours étaient donc prévisibles. Sont-ils pour autant légitimes ? Qu'est-ce que le capitaine de la dernière Coupe du monde et son vice-capitaine officieux ont apporté par le passé à l'équipe de France ? Et que peuvent-ils encore lui apporter ? Eléments de réponse.
Ribéry, la révélation de 2006.Franck Ribéry a fait ses grands débuts chez les Bleus le 27 mai 2006, en match amical de préparation à la Coupe du monde, face au Mexique (1-0). Clin d'oeil de l'histoire (enfin le croit-on en tout cas à l'époque), son premier match est aussi le dernier disputé par Zinédine Zidane avec le maillot bleu en France. Les débuts de Ribéry sont d'ailleurs placés sous le haut patronage de Zizou. En Allemagne, lors de la Coupe du monde, Ribéry, devenu titulaire, brille dans son sillage plus que dans son ombre. Il marque son premier but en sélection en huitièmes de finale, face à l'Espagne (3-1), un but qui symbolise alors sa réussite avec les Bleus. Problème, ce constat vaut toujours cinq ans après. Entre discussions - et requêtes - à n'en plus finir sur son positionnement, blessures à répétition et affaires privées, Ribéry n'a retrouvé qu'en de très rares occasions le niveau qu'il avait montré en 2006. Et surtout pas en 2010. Baladé sur le front de l'attaque, il avait traversé la Coupe du monde sud-africaine comme un fantôme, incapable d'atteindre le niveau qui est le sien depuis plusieurs saisons au Bayern Munich.
Pour Blanc, "un indispensable". S'il n'avait pas été touché par une nouvelle blessure à un genou avant le match face au Brésil le 9 février dernier, Franck Ribéry aurait déjà fait son retour chez les Bleus. Car dans l'esprit du sélectionneur, un Ribéry en pleine forme est "indispensable" à l'équipe de France. A nouveau décisif avec le Bayern, Ribéry (7 buts en 48 sélections) a donc logiquement été rappelé pour ces deux matches. "Frank Ribéry est sur le retour, il est mieux physiquement, il a enchaîné depuis quatre, cinq matches sans problème physique. Il est en train de retrouver certaines qualités, notamment la vitesse", s'est justifié Blanc. Maintenant, sélectionner Ribéry pour le mettre où ? L'équipe de France a prouvé, en Bosnie ou face à la Roumanie, qu'elle disposait d'un onze type performant. Florent Malouda semblant inamovible à gauche, Ribéry devrait être titulaire à droite en lieu et place de Mathieu Valbuena, de retour de blessure. C'est désormais à Ribéry, l'ailier gauche, de faire fi de sa position pour se mettre au service du collectif. Ce qu'il a trop rarement fait sous le maillot de l'équipe de France.
Evra, "remplaçant" d’Abidal
Evra, le capitaine de 2010. Patrice Evra n'est pas ce que l'on appelle un titulaire indiscutable en équipe de France. Depuis le 18 août 2004, date de sa première sélection face à la Bosnie (1-1), le défenseur de Manchester United n'est apparu qu'à 32 reprises sous le maillot bleu (avec 26 titularisations). Transféré de Monaco à Manchester United en cours de saison 2005-06, il a mis du temps à "s'imposer" en sélection nationale. Il n'a ainsi disputé que quatre rencontres en phase finale, deux lors de l'Euro 2008 et deux lors de la Coupe du monde 2010, deux compétitions qui ont tourné à la débâcle pour Raymond Domenech et ses joueurs. En 2008, Evra se montra plutôt à la hauteur de sa réputation, défenseur latéral fort dans les duels et percutant en contre-attaque. Son parcours en sélection, qui reprend cette semaine, est entaché par cette phase finale 2010, où, propulsé capitaine, il s'est noyé avec tout le navire, sur le terrain comme en dehors.
Pour Blanc, "un inconnu". C'est "un joueur que je ne connais pas". Lorsqu'il a rappelé Patrice Evra en équipe de France, Laurent Blanc n'a pas caché qu'il ne connaissait pas Patrice Evra, devenu un taulier à Manchester. Alors qu'il s'est rendu plusieurs fois à Munich, Blanc a attendu le rassemblement des Bleus à Clairefontaine pour faire connaissance avec l'ancien Monégasque. C'est à la fois un signe de proximité avec Ribéry - Blanc et lui partagent le même agent, Jean-Pierre Bernès - et une preuve de moindre intérêt pour Evra. Car autant Ribéry a toujours paru incontournable dans la bouche de Blanc et dans ses plans, autant Evra apparaît comme un deuxième choix. Avec Sagna-Rami-Mexès-Abidal, Blanc avait trouvé sa défense type, avec Gaël Clichy en doublure d'Abidal. Le Barcelonais opéré d'une tumeur, Blanc a logiquement rappelé Evra, dans son esprit plus un numéro un bis qu'un numéro deux. C'est pour cette raison qu'il devrait débuter le match au Luxembourg, vendredi. Avec encore beaucoup de choses à prouver.